Opéra Nice Côte d’Azur. Une ouverture de saison pharaonique

Publié le 17 novembre 2021 à  9h40 - Dernière mise à  jour le 3 novembre 2022 à  8h50

Après Einstein («Einstein on te beach» en 1976) et le Mahatma Gandhi («Satyagraha» en 1980), c’est avec un opéra consacré à Akhenaton qu’en 1984 le compositeur Philip Glass décide de boucler son cycle consacré à trois figures de l’histoire de la spiritualité humaine. Ce dernier ouvrage, «Akhnaten», vient d’ouvrir la saison lyrique à l’Opéra de Nice.

Néfertiti, Julie Robard-Gendre et Akhnaten Fabrice Di Falco. (Photo Dominique Jaussein)
Néfertiti, Julie Robard-Gendre et Akhnaten Fabrice Di Falco. (Photo Dominique Jaussein)

A quelques encablures de la frontière italienne et des registres «bel cantistes», il fallait oser ouvrir une saison lyrique à Nice avec un ouvrage composé par l’un des maîtres du minimalisme musical et de la répétitivité. Pour corser le tout, le récit de l’intrigue est livré en anglais et le texte chanté en akkadien, hébreu et haut-égyptien. La prise de risques a payé et le succès obtenu par les trois représentations programmées prouve que lorsqu’un spectacle est d’extrême qualité, il est capable d’être accepté et apprécié par le plus grand nombre ; et de la qualité, cette production n’en manquait pas.

Une partition lancinante et fascinante

A commencer par celle d’un orchestre fortement réduit du côté des cordes (c’est la volonté de Philip Glass) laissant la part belle aux vents. Les instrumentistes ont longuement travaillé l’œuvre, puisqu’elle a déjà fait l’objet d’une vidéo pour cause de confinement, et construisent l’univers sonore du compositeur américain avec rigueur et précision. Il faut dire que le directeur musical Léo Warynski est un familier de l’œuvre de Glass et possède toute la maîtrise du mathématicien qui, note après note, dévoile une partition lancinante et jamais pesante. Le chœur de l’Opéra, lui aussi, se plie aisément aux rigueurs de la répétitivité.

Un distribution de qualité et homogène

Pour relever la gageure d’un chant aussi étrange que difficile à livrer, les solistes ont pris, eux aussi, des risques avec, notamment, un trio exceptionnel composé du contre-ténor Fabrice Di Falco dans le rôle-titre, Julie Robard-Gendre, Néfertiti et Patrizia Ciofi, la reine Tye. Les aigus maitrisés et bien projetés du premier qui fait aussi preuve d’aisance dans le registre plus grave, la couleur et la précision de la mezzo et les beaux aigus de la soprano ont eu raison des difficultés évoquées plus haut. A leurs côtés, le trio masculin Joan Martin-Royo, Horemhab, Frédéric Diquero, Amon et Vincent le Texier, Aye est d’une belle homogénéité dans la qualité tout comme les princesses Mathilde Le Petit, Rachel Ducket, Mathilde Lemaire, Vassiliki Koltouki, Laetitia Goepfert et Aviva Manenti.

L’excellence de Lucinda Childs

Quant au rôle parlé du scribe, c’est Lucinda Childs qui s’y colle par vidéo interposée. Elle vient conter la vie d’Akhenaton, rythmant l’œuvre comme on tourne les pages d’un livre. Lucinda Childs signe aussi la mise en scène et la chorégraphie de la production. Un travail d’excellence d’une grande intelligence et qui est en parfaite adéquation avec la musique de Philip Glass. Ici aussi le minimalisme est de rigueur, un vaste disque doré et mobile, vision solaire, occupant la totalité de l’espace où se produisent solistes et danseurs. Les tableaux sont superbes et les vidéos d’Étienne Guiol sont remarquablement construites. Oui, c’est de la très belle ouvrage et le succès est amplement mérité !
Michel EGEA

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