Opérette à Marseille – Une exceptionnelle «Belle Hélène» ouvre la saison à l’Odéon

Publié le 16 octobre 2016 à  10h06 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  15h38

La belle Hélène au bain : charme et séduction de Laurence Janot (Photo Christian Dresse)
La belle Hélène au bain : charme et séduction de Laurence Janot (Photo Christian Dresse)
Toute la troupe réunie pour l’un des grands tableaux de cette production qui est à inscrire dans les annales des grandes heures de l’opérette à Marseille (Photo Christian Dresse)
Toute la troupe réunie pour l’un des grands tableaux de cette production qui est à inscrire dans les annales des grandes heures de l’opérette à Marseille (Photo Christian Dresse)

Il a vraiment bon goût, Pâris, lorsqu’il offre la pomme de la discorde à la plus belle des déesses au Mont Ida de l’Odéon, de la Canebière, de Marseille. Avouons qu’à sa place nous aurions choisi la même Aphrodite… Pâris, Ida, Aphrodite, mais aussi Ménélas, Agamemnon, Hélène : oui, il s’agit bien de l’opéra bouffe d’Offenbach « La Belle Hélène» qui ouvrait en ce samedi de milieu d’octobre, la saison d’opérettes dans ce haut lieu du genre, quasiment unique en France, qu’est le théâtre de l’Odéon. Et quelle belle Hélène ! Une nouvelle production où les petits plats ont été mis avec les grands. Sur scène, tout d’abord, où l’expression des plats prends tout son sens lorsque l’on sait qu’ici ce sont de grands décors (réalisés dans les ateliers de l’Opéra) qui ont été mis dans un petit espace. Décors minimalistes mais d’une redoutable efficacité pour symboliser un palais grec antique. Éclairages parfaitement réglés, costumes superbes, il ne restait plus à Bernard Pisani que de signer une mise en scène à succès dont il a le secret. Il ne s’en est pas privé, d’autant plus qu’il bénéficiait d’une distribution acquise à ses idées et idéale pour les faire vivre (les idées !). Et voilà une «Belle Hélène» au goût du jour, avec des jeux de mots qui font mouche, avec une charade modernisée désopilante et des bouts-rimés qui ont touché la salle ; «j’aurais aimé être un artiste… » Un travail proche de la perfection pour Bernard Pisani qui, une fois de plus (on a encore en mémoire sa mise en scène de «Phi-Phi» ici même il y a quelques mois), propose un spectacle agréable, comique sans outrance, élégant et dynamique, réjouissant et jouissif. Un beau triomphe facilité par une distribution de haut niveau, dont nous parlerons un peu plus tard, mais aussi, peut-être surtout, par le directeur musical de la production, Emmanuel Trenque. Celui qui, depuis un peu plus d’un an, fait briller le chœur de l’Opéra, avait été convié par Maurice Xiberras et sa complice de l’Odéon Sophie Duffaut, à prendre en main les destinés musicales de cette «Belle Hélène». Travail, répétitions, bonne humeur : il n’en fallait pas plus pour signer une réussite. Dans la micro-fosse du théâtre, l’orchestre fait des merveilles, précis, nuancé, coloré, dynamique. Au diapason, quoi ! Et sur scène le chœur Phocéen, renforcé, est impérial à toutes les tessitures. Impérial, ou plutôt royal, lorsque ce sont les rois emplis de vaillance qui s’avancent… Mais avant les rois, ce sont la reine et sa suivante qui séduisent… Laurence Janot, dans le rôle-titre, n’a pas sa pareille. Elle a le port de la danseuse classique, la beauté naturelle et la voix bien placée. Que demander de mieux, d’autant plus qu’elle sait user, sans abuser, de son sex-appeal ; du grand art, scénique et lyrique. A ses côtés Carole Clin est une idéale Bacchis, élégante, physiquement et vocalement. Nelly B et Lorrie Garcia sont, elles, d’espiègles et charmantes hétaïres.
Avant d’attaquer le chapelet royal, disons tout le bien que nous pensons de la prestation de Samy Camps, vibrionnant Oreste, de celle de Michel Vaissière qui incarne un Calchas omniprésent, généreux scéniquement et vocalement, et tressons une couronne de lauriers, plaqué or, au Pâris de Kevin Amiel. Le jeune ténor, pour sa première à l’Odéon, a fait valoir son jeu, sa belle ligne de chant et son aisance aux côtés de vieux routiers (ce n’est pas péjoratif !) de l’opérette. A commencer par Dominique Desmons, l’époux de la reine, Poux de la reine poux… Le roi Ménélas ! Puisant son humour chez de Funès, usant de cet humour avec délicatesse tout en chantant avec joie, n’allez pas chercher plus loin un autre Ménélas. Philippe Ermelier est un puissant Agamemnon, Jean-Marie Delpas, le bouillant Achille attendu, Jacques Lemaire et Yvan Rebeyrol, les deux Ajax qui brillent sans avoir besoin de la musique de Bizet… Vincent Jacquet, Philocome, et Patrice Bourgeois, Euthyclès, complétant avec talent cette distribution. Enfin, comment passer sous silence les figurants, Stéphane Defolie et Bruno Simon, qui on égayé les rêves de nombre de dames (elles nous l’ont dit) qui ont assisté à la représentation, ainsi que le quatuor de danseurs composé de Chloé Scalese, Angel Gabriel Cubero Alconchel, Grégoire Lugue Thebaud et Liya Semenkova-Tobiass, divine Aphrodite dont nous parlons dans les premières lignes de cet article et à laquelle est revenue cette pomme dorée que nous aurions bien aimé lui remettre. Mais nous ne sommes pas Pâris. Dommage !
Michel EGEA

Pratique. Dernière représentation ce dimanche 16 octobre à 14h30, à l’Odéon, sur la Canebière à Marseille.

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