3e forum des autorités locales et régionales de la Méditerranée

Publié le 5 avril 2013 à  1h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  16h11

Le temps est venu de changer de perspective

C’est sous la présidence de Jean-Pierre Elong Mbassi, le secrétaire général de Cités et Gouvernements Locaux Unis Afrique que s’est tenu, ce 4 avril, la présentation des synthèses des ateliers de la veille de ce 3e forum des autorités locales et régionales de la Méditerranée. Une séance qui aura mis en lumière les potentialités comme les menaces qui pèsent sur la Méditerranée, les possibilités comme les attentes des collectivités locales et territoriales.

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A elles seules, les questions que posent Jean-Pierre Elong Mbassi mettent en exergue l’urgence de la situation : « Comment construire une Méditerranée des peuples par delà celle des États ? Quel rôle politique, diplomatique, peuvent jouer les collectivités territoriales pour développer l’économie, la justice sociale, la solidarité, alors que nos débats de la veille ont bien montré les risques de repli identitaire, de repli sur soi ? Comment renforcer les liens entre les citoyens et les élus de proximité alors qu’une des dimensions mise en lumière par le printemps arabe est bien la dissolution du lien entre les citoyens et les politiques ? ».

L’importance de la place des femmes

Le deuxième atelier met en avant le fait que les collectivités locales, territoriales, sont plus que jamais nécessaires mais que, notamment au Nord de la Méditerranée, elles risquent, du fait de la crise, une perte d’efficience. Le deuxième atelier insiste sur l’emploi alors que plus de 40% des jeunes de la Méditerranée sont au chômage. L’importance de la formation, tout comme celle de développer des réseaux entre collectivités du Sud et du Nord sont avancées.
Fatna Elk’Hiel, remercie son Pays, le Maroc, « grâce auquel ce matin une femme est à la tribune ». elle indique que son atelier a mis en avant « l’importance d’une gouvernance démocratique locale ». Les bailleurs de fonds peuvent être de grands acteurs dans les mouvements en cours sur la rive Sud « mais il faut faire ensemble et non qu’ils imposent, comme cela fut trop le cas, un modèle ». Elle insiste : « Et puis il y a la question de la femme. Elle doit avoir une place réelle dans les sociétés ». Il faut, enfin « que les gouvernements locaux et régionaux soient présents et entendus sur la scène internationale ».

« Le Printemps arabe a des effets positifs mais il est embryonnaire, il faut donc attendre pour mesurer ses effets réels »

Nader Ghazal rapporte les travaux de l’atelier 4 dans lequel il a été question de la complexité des crises, de la question des réfugiés, Palestiniens mais aussi Syriens. « Il y a eu consensus pour dire que les pays du monde n’ont pu faire face à la crise syrienne, notamment sur le plan humanitaire. La Russie, la Chine et l’Iran sont du côté du régime, les autres avec les opposants. Le blocage qui en résulte se fait au dépens du peuple syrien ». L’atelier a enfin exprimé sa vive inquiétude face à la prolifération des armes dans cette région du monde. Avant de poursuivre : « Nous vivons dans un système clos, tout ce qui se produit quelque part a un effet sur le reste ». Puis de juger : « Le Printemps arabe a des effets positifs mais il est embryonnaire, il faut donc attendre pour mesurer ses effets réels ».
Peter Bossman, le maire de Piran, en Slovénie, considère, après ces rapports : « La Méditerranée est en crise, économique, politique, ce qui nécessite un engagement encore plus grand des autorités locales. Le crise économique qui touche le Sud de l’Europe risque de toucher le Maghreb puis d’affecter les relations dans l’ensemble du bassin méditerranéen. De plus, il est effectivement trop tôt pour mesurer les effets du printemps arabe puisque des pays sont en train de se former à la démocratie, une démocratie qui doit être construite par les peuples concernés ».
Concernant le conflit israélo-palestinien, il note : « Nous nous sommes reposés sur les autorités mondiales, sans résultat, il est temps que les collectivités territoriales se mobilisent, elles qui ont l’habitude de dialoguer. Et puis, enfin, il ne faut jamais oublier que lorsque l’on éduque un homme, on éduque un individu, lorsque l’on éduque une femme, on éduque une famille ».
Hasan Unter, Turquie, plaide pour le dialogue entre les individus, les cultures : « Plus les gens communiquent plus ils sont civilisés ». Puis de s’inquiéter : « Les États, consciemment ou pas, ont le réflexe de rendre les collectivités territoriales inefficaces ». Enfin, lui aussi insiste sur la question des femmes : « Lorsque les femmes communiquent, les choses changent. En Turquie nous avons voté un texte permettant la discrimination positive. Ainsi, lorsque c’est une femme qui achète un appartement elle bénéficie d’une aide de 5 000 dollars. Plus on renforce le statut des femmes, plus on renforce la société ».

« La France doit réviser sa politique de visa »

Michel Vauzelle, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur considère : « Les gouvernements du Nord comme du Sud recherchent des solutions pour que les populations se sentent respectées pas seulement lors des campagnes électorales mais tout le temps. L’élu doit connaître les besoins du peuple afin d’établir son programme, ensuite, lorsqu’il est élu, il doit continuer à organiser des rencontres avec la société civile, faire le point avec elle, c’est cela la démocratie participative. C’est dans ce lien que peuvent notamment être vues les raisons qui font que des engagements vont être tenus ou pas. L’élu, de bonne foi, a promis, mais des raisons techniques ou financières font qu’une décision doit être repoussée ». Il poursuit : « Une injure contre un élu c’est une injure contre la Démocratie ; un élu qui se replie sur son cercle de proches, c’est un élu qui se coupe de la société ». Il enchaîne : « Il ne faut pas croire que la démocratie soit un acquis, c’est un cheminement, c’est une conquête quotidienne ». Il insiste sur l’importance du scrutin de liste : « Il permet à des jeunes, des femmes, des personnes issues de la diversité culturelle d’être élues ». Il assène : « Il faut que le Nord arrête de donner des leçons au Sud qui n’a pas de leçons à recevoir. C’est cette posture qui a conduit à l’échec du processus de Barcelone. Il faut, Nord et Sud, chercher des solutions, renforcer la démocratie locale et travailler sur deux axes prioritaires : la lutte contre le chômage et le droit au logement, notamment pour les jeunes. Nous devons débattre, réfléchir, ensemble, construire des organisations très simples, avec un objectif modeste : le développement des micro-crédits, le développement des formations ouvrant des possibilités de stages au Nord comme au Sud. La France, à ce propos, doit réviser sa politique de visa ».
Jean-Pierre Elong Mbassi conclut : « Le temps est venu de changer de perspective. Il existe des potentiels en Méditerranée qui, faut-il le rappeler, sont à l’origine de notre civilisation, pourtant, depuis des années on insiste sur les manques, l’heure est maintenant à parler des possibles, d’une zone d’espoir ».

Michel CAIRE

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