A Saint-Rémy de Provence : la résurrection du bestiaire de Jan van Naeltwijck

Publié le 3 août 2014 à  17h26 - Dernière mise à  jour le 9 juin 2023 à  21h53

« Tigre et ampoule », l’une des œuvres exposées dans la chapelle Notre Dame de Pitié. Aux reflets voulus par l’artiste viennent s’ajouter ceux des œuvres exposées et de vitraux de la chapelle. (Photo M.E).
« Tigre et ampoule », l’une des œuvres exposées dans la chapelle Notre Dame de Pitié. Aux reflets voulus par l’artiste viennent s’ajouter ceux des œuvres exposées et de vitraux de la chapelle. (Photo M.E).

2007 : l’atelier de Jan van Naeltwijck, artiste, explorateur, naturaliste, biologiste, passionné de Lotus (l’automobile, pas la fleur) est la proie des flammes à Saint-Rémy de Provence. Trente ans de vie partent en fumée. 2014 : le 3 juillet il inaugure sa première exposition depuis le sinistre. Le lendemain sa mère quitte ce monde. «Comme si elle avait attendu, pour s’en aller, que l’expo soit en place»,dit-il avec un sourire triste. Quelques jours plus tard, au milieu des œuvres accrochées aux murs de la chapelle Notre Dame de Pitié, à Saint-Rémy de Provence, un dernier hommage est rendu à la maman de l’artiste aventurier. Profond et émouvant. Un crucifix d’ébène, au Christ d’ivoire dont les pieds reposent sur un crâne d’ivoire lui aussi, s’appuie sur le haut de l’œuvre majeure de l’exposition accrochée dans le chœur de la chapelle. Histoire, peut-être, de rappeler au visiteur que, s’il est de passage dans ce lieu, il l’est aussi sur cette terre. Un objet d’art, ce crucifix, comme les affectionne Jan van Naeltwijck et qui pourrait entrer, sans problème, dans son cabinet de curiosités personnel.
Pousser la porte de Notre Dame de Pitié, c’est accepter d’entrer dans l’univers à la fois fascinant, étrange et surprenant d’un homme qui ne l’est pas moins. Là où le feu aurait pu détruire une vie, il en a donné plusieurs à Jan van Naeltwijck. Il décide de voyager comme un explorateur du début du siècle dernier. Islande, Bhoutan, Tasmanie, au volant de sa Lotus il parcourt les chemins du monde, prenant le temps de tout noter, dessiner, filmer, photographier. Et de voyage en voyage, il reconstitue sa vie, mais en donne aussi une à son double, Baltasar Gulfoss, un aventurier qui serait né en 1897 d’un père Islandais et d’une mère Corse. Et dont les traits ont une étrange ressemblance avec ceux de notre franco-hollandais.
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Ces dernières années, il n’a eu de cesse de travailler pour créer une nouvelle exposition intitulée «After the fire ». Peintures, photos, dessins et autres techniques: dans son atelier reconstitué, il a mis en scène les animaux qui le fascinent : oiseaux, tigres, éléphants, loups, hippopotames et bien d’autres dans des situations extraordinaires au sens propre du terme. Une exposition qui déborde d’onirisme tout en magnifiant le sens aigu de la précision de l’artiste. Chaque œuvre émeut, vibre, fascine. Jan van Naeltwijck établi des éclairages quasi divins, un peu comme ces traits lumineux perçant les nuages sombres pour focaliser sur un lieu très précis. Mais lui, ce sont les animaux qu’il illumine, avec un «je ne sais quoi» de mysticisme. Il magnifie un paon qui ne fait pas la roue, un vol d’aigrettes, une grue couronnée, un tigre de Sumatra, une gazelle. Il joue avec la matière, avec les reflets, avec les décors, maîtrisant de façon presque insolente l’utilisation du noir et du blanc mais aussi du sépia, parfaitement mis en valeur par la pierre des murs chargés d’histoire et de tons chauds, de la chapelle Notre Dame de Pitié. Alors, n’hésitez pas. Allez vous perdre au cœur de ce bestiaire envoûtant, quelques minutes ou quelques heures… Pour devenir aventurier à votre tour, sans vous en apercevoir.
Michel EGEA

Pratique
Exposition accrochée dans la chapelle Notre Dame de Pitié à Saint-Rémy de Provence jusqu’au 24 septembre, tous les jours de 10 heures à 12 h 30 et de 16 heures à 19 h 30. Visites sur rendez-vous au 06 83 57 58 33. L’artiste: Jan van Naeltwijck


Un chemin de vie étonnant

Dans cette photographie en forme d’autoportrait, on peut deviner la personnalité hors du commun de Jan van Naeltwijck.
Dans cette photographie en forme d’autoportrait, on peut deviner la personnalité hors du commun de Jan van Naeltwijck.
Jan van Naeltwijck est né aux Pays Bas le 14 novembre 1957. Enfant, il étudie la nature, dessine les oiseaux et enregistre leurs chants. Il arrive en France en 1974. Âgé de 16 ans, il mène des études de droit, puis intègre la Villa Arson, l’École National des Arts Décoratifs de Nice de 1979 à 1984. Il expose ses dessins et remporte un prix à la Biennale de la Jeune Peinture Méditerranéenne. C’est l’époque où il fréquente les ateliers de César, Arman, Poumeyrol et rencontre Christo, Ernest Pignon Ernest et Peter Greenaway.
Pour lui, débute alors une longue période d’exploration aussi bien artistique, que scientifique. Il étudie dans les musées d’Histoire Naturelle, les zoos et travaille surtout au Musée Océanographique de Monaco qui sera son « deuxième atelier ». Il fait un travail sur le Temps, étudie la biologie en employant des techniques modernes. Il réalise des vidéos, travaille avec des applications 3D, étudie les fréquences, met en scène animaux et objets, dessine la décomposition de fruits et d’animaux.
Musicien, il est l’auteur de deux CD («Quest for E.T.» chez NIL records et «Hydrodynamics» chez Hâtive). En 2000 il compose pour la pièce « X » au théâtre Rive Gauche d’après «Insert» de J. Byrum mis en scène et joué par Niels Arestrup.
En 1997, il participe au film «Georges Dandin» de Jean Claude Brialy avec Jacques Villeret, Mathilde Seigner et Jean-Pierre Darras, et «Séraphine» de Martin Provost, sorti en 2008 avec Yolande Moreau. Il travaille sur le scénario de «La Bête du Vaccarès» avec Denys Colomb de Daunant le créateur de «Crin Blanc» jusqu’à la mort de ce dernier en 2006. Il est l’auteur de deux livres sur la tauromachie, «Toril» avec le poète Daniel Schmitt en 1996 aux éditions Somedit et un livre de jeunesse «Tomasito et Saladelle » publié en 2005 aux éditions du Rocher.

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