A l’Odéon de Marseille, les mousquetaires dévergondent le couvent

Publié le 21 mai 2016 à  21h56 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h45

C’est ainsi que s’achève le sermon sur l’amour de Brissac, faux capucin mais vrai mousquetaire, qui va plonger le couvent dans un état jamais connu jusqu’alors… (Photo Christian Dresse)
C’est ainsi que s’achève le sermon sur l’amour de Brissac, faux capucin mais vrai mousquetaire, qui va plonger le couvent dans un état jamais connu jusqu’alors… (Photo Christian Dresse)

Si vous ne savez pas quoi faire ce dimanche après midi, un seul conseil: courez à l’Odéon, en haut de la Canebière, pour assister à la deuxième, et dernière, représentation de l’opérette de Louis Varney, «Les Mousquetaires au couvent». Non contents de faire une cure de rire, ce qui est toujours bon, vous allez passer un moment des plus agréable, et ce pour plusieurs raisons.
La première de ces raisons c’est la qualité de la musique composée par Varney. Partition solide, bien structurée, grands airs plus proches de l’opéra comique que de l’opérette, pas de faiblesse dans l’écriture : de la belle ouvrage que l’on apprécie de la première à la dernière note.
La deuxième raison, c’est la qualité de l’interprétation de cette musique… L’orchestre de l’Odéon étoffé à 23 musiciens est placé sous la direction efficace de Bruno Membrey. Dynamisme, couleurs, chaleur : rien ne manque pour insuffler la joie sur scène où une joyeuse troupe se régale à jouer et chanter. A commencer par Jennifer Michel, accorte et voluptueuse soubrette de l’auberge du Mousquetaire gris, dont la voix gagne en maturité au fil des rôles qui lui sont confiés. La jeune soprano monte en puissance et c’est tant mieux. Dans le rôle de Marie, Caroline Géa est irréprochable. Tant dans l’incarnation de la jeune amoureuse que vocalement. Son grand air du deuxième acte, à genoux sur un prie dieu, tire les frissons; la voix est souple, chaude, émouvante et la ligne de chant idéale. La toute jeune Marie Oppert incarne Louise, toute jeune elle aussi. Elle a la beauté de l’adolescence et le côté mutin de la jeune fille qui découvre la vie. Sa voix est fine, bien placée, c’est une fleur entrain d’éclore. A suivre. Danièle Dinant est une mère supérieure idéale et dans le rôle travesti de Sœur Opportune, Claude Deschamps génère fous rires sur fous rires… Du grand art. Sneji Chopian, Lorrie Garcia et Priscilla Beyrand complètent la population du couvent qui s’avère un peu atteinte par la nymphomanie ou par le culte de la dive bouteille. Casting parfait, aussi, chez les hommes avec deux mousquetaires de haut niveau : Lionel Delbruyère et Enguerrand de Hys, le premier incarnant Brissac et le deuxième, Gontran. Delbruyère est un baryton solide, presque tonitruant au premier acte, qui va ensuite trouver un équilibre avec le reste de la distribution pour livrer un sermon sur l’amour mémorable. Enguerrand de Hys, est un beau ténor, voix limpide et précise, belle technique, belle ligne de chant élégante et souple. C’est Jacques Lemaire qui incarne l’abbé Bridaine avec le talent de comédien qu’on lui connaît. Quant au comte de Pontcourlay, c’est le grand Mikhaël Piccone qui s’y colle. Grand par la taille, mais aussi par ses qualités vocales que l’on devine au cours de ses (trop) rares intervention dans cette œuvre. Pierre-Olivier Bernard, Patrice Bourgeois, Emmanuel Géa, Philippe Léonard et Damien Rauch complètent la partie masculine du casting et sont à féliciter, de même que les membres du Chœur Phocéen.
Enfin, troisième raison, et non la moindre, la mise en scène de Jack Gervais qui est d’une modernité séduisante tout en respectant l’époque et le lieu (la Touraine sous le règne de Louis XIII). Le metteur en scène organise un crescendo scénique dont le point d’orgue est ce sermon sur l’amour livré par Brissac, travesti en capucin, devant les Ursulines et leurs jeunes pensionnaires plus promptes à donner des coups de langue sur de grandes sucettes bâton que de réciter des « Ave Maria ». Un sermon qui se terminera dans une débauche générale, Brissac lutinant une none à la jarretière fleurie, Bridaine se trouvant pris de tremblements avec la mère supérieure sur les genoux et les jouvencelles en folie assistant à ces scènes sans sourciller. Rien que pour cette scène finale du deuxième acte, Jack Gervais mérite bien d’être de la patrie opérette. Il n’y a donc aucune raison pour ne pas vous rendre ce dimanche après-midi à l’Odéon. Vous ne le regretterez pas, promis !
Michel EGEA

Pratique. « Les Mousquetaires au couvent » ce dimanche 22 mai à 14h30 à l’Odéon, 162 La Canebière, Marseille (1er)- odeon.marseille.fr

Articles similaires

Aller au contenu principal