Cinéma. « Tenet » de Christopher Nolan ou comment éviter la 3e guerre mondiale avec pour arme l’inversion du temps !

Publié le 4 octobre 2020 à  12h56 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  12h13

© Warner Bros
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John David  Washington © Warner Bros
John David Washington © Warner Bros

Christopher-Nolan est un réalisateur qui aime prendre le temps de raconter des histoires. Avec «Tenet» -sorti sur les écrans donne de l’oxygène financier aux salles de cinéma longtemps fermées pour cause de Covid-19- il donne l’étrange impression de flâner puisqu’il développe son récit sur 2h30. Cela pourrait paraître long, (ça l’est d’ailleurs) sauf qu’ici le spectateur, à qui on ne laisse aucun répit, est secoué par une succession de scènes d’actions l’empêchant ainsi de jeter un coup d’œil à sa montre. A la différence des protagonistes de ce thriller futuriste qui vont, quant à eux, affronter un voyage dans le temps à reculons. Temps inversé, bons et méchants guerroyant pour soit détruire l’humanité soit sauver l’espèce humaine, on ne comprend pas forcément tout, parfois on ne saisit rien, le but étant sans doute de placer les personnages et ceux qui suivent leurs luttes mortelles au même niveau de doutes et d’interrogations. Déstabilisé, malmené, extrêmement dubitatif, parfois complètement déboussolé, le spectateur est mis dans le même état que les guerriers du récit, contraints de subir des événements dont ils ne perçoivent ni les tenants ni les aboutissants. C’est la force du film. C’est aussi sa faiblesse tant on peut rester à l’extérieur de tout ce fracas de sons et d’images durant lequel la musique devient un accessoire essentiel du récit. Dans les moments doux elle disparaît, la technique participant de la narration ne la gangrène pas, et elle enrichit astucieusement l’histoire. Et puis, il y a le savant traitement des héros, qui, évoluant tous dans un univers particulier vivent à des endroits différents, entre passé et futur sans d’ailleurs que l’on sache bien où l’on est, mais surtout et c’est regrettable qui doit faire quoi. Avec en fil rouge le combat de l’amour d’une mère pour récupérer son fils, un enfant, sorte d’Arlésienne au masculin que l’on ne voit jamais que l’on distingue au loin lors de l’épilogue. Le film de Nolan tient de la bande dessinée, de l’opéra rock, du polar estampillé Jodorwsky, ou Bilal. Par son aspect « mission dans la mission » le film prend une dimension humaine, et nous nous attachons autant aux super héros sauvant la planète (après tout c’est leur job), qu’au cœur de cette mère se battant pour récupérer l’enfant qu’elle a mis au monde. «On est ceux qui évitent au monde ce qui aurait pu lui arriver»? signalent les deux agents de l’espace-temps sautant d’une voiture à l’autre pour le bien de l’humanité. Dire que les acteurs -John David Washington, l’agent de la CIA et Robert Pattinson, son allié, se battant pour endiguer les risques d’une Troisième Guerre mondiale, Kenneth Branagh, le méchant russe, Elisabeth Debicki, retenue en otage par ce dernier- sont extraordinaires demeure un faible mot. Ils arrivent à imposer leurs talents même quand ils s’adressent à des machines. Christopher Nolan signant un film que les Français ne parviendraient à réaliser, avec pour ingrédients supplémentaires un vol de plutonium, une image travaillée à l’extrême, et au final une super-production survitaminée, surpuissante, avec peu d’émotions mais un brio digne des grands maîtres du cinéma mondial.
Arnaud PÉLISSIER

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