Conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur : la citoyenneté en débat

Publié le 26 avril 2015 à  20h17 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h50

C’est par une minute de silence en mémoire des victimes du crash de l’A320 dans les Alpes et à celles qui ont perdu la vie en mer en tentant de rejoindre l’Europe, pour fuir la guerre, la misère que la séance plénière a démarré. La première question a porté sur la citoyenneté. Et elle a suffi pour montrer que si la tête de liste aux élections régionales change au FN pour une plus jeune, plus dangereuse, le Front lui, est plus que jamais inquiétant.

(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)

C’est à Patrick Allemand (PS), premier vice-président de la Région qu’il revient de présenter ce dossier. Il rappelle que les événements tragiques du début de l’année 2015 ont mis en lumière que la crise profonde que traverse «notre République» est d’abord due «à sa difficulté à intégrer l’ensemble des citoyens à un projet de société, fondé sur des valeurs républicaines, qui permette à chacun d’être acteur de son présent mais aussi de s’inscrire dans un avenir à la fois individuel et collectif». Et de mettre en avant le rapport. Il précise immédiatement que la Région n’a pas attendu ces récents événements pour agir en ce sens. Il ajoute qu’elle a fait le choix d’exercer ses responsabilités de service public en privilégiant constamment la dimension participative et en instaurant un dialogue permanent avec les territoires, les acteurs socioéconomiques et les citoyens eux-mêmes. Pour la majorité régionale : «Face à la montée et à l’enracinement des processus de paupérisation, d’exclusion, de discrimination, de relégation et de défiance, il est apparu nécessaire d’interroger encore cette politique et de lui donner de nouveaux développements, notamment au bénéfice des jeunes qui sont les plus touchés par ces phénomènes».

«Cinq grands chantiers prioritaires pour que les jeunes prennent toute leur place sociale, politique et professionnelle »

De nouveaux espaces participatifs ont donc été mis en place. «Ils ont permis de structurer la concertation dans la durée en croisant approche locale et régionale et de dégager cinq grands chantiers prioritaires pour que les jeunes prennent toute leur place sociale, politique et professionnelle : la mobilité, le logement, la santé, l’accès à l’information et l’engagement». Quatre principes d’actions prioritaires ont été ainsi proposés au vote des élus régionaux. Développer et généraliser la mise en œuvre de certaines actions déjà expérimentées et visant la lutte contre le décrochage scolaire, l’accompagnement éducatif et la promotion de la citoyenneté; renforcer l’offre de formation du Service Public Régional et les mesures d’accompagnement des parcours d’insertion qui permettent aux personnes de s’inscrire dans une dynamique de réussite mais aussi d’acquérir des savoirs et ainsi de prendre toute leur place dans la société;
contribuer et désenclaver les territoires urbains, périurbains ou ruraux qui cumulent les indicateurs de fragilité sociale et économique et, afin de réduire les fractures et les inégalités géographiques, sociales, linguistiques et culturelles, y concentrer de façon prioritaire les moyens de l’action régionale; approfondir à partir des cinq chantiers prioritaires des États généraux de la jeunesse, la démarche participative avec les acteurs locaux et les citoyens eux-mêmes afin de travailler à la mise en œuvre concrète des propositions issues de ces chantiers et ainsi de mieux orienter la politique publique dans ces domaines.
Pour Daniel Sperling, (UMP): «C’est dès maintenant que nous devons lutter contre ceux qui veulent porter le fer et le feu par le terrorisme aveugle qui frappe indifféremment tous les peuples et toutes les religions. C’est maintenant que nous devons prôner les vertus de la République de la laïcité et de la citoyenneté qui sont les remparts aux dérives communautaires ou religieuses». «C’est maintenant, ajoute-t-il, que nous devons, par tous les moyens et qu’importe le terme « intégration ou assimilation », faire en sorte que l’ensemble des citoyens et habitants de notre Nation et ici de notre Région, puissent être sensibilisés et convaincus aux vertus de la République et du mieux vivre ensemble».

«Un amalgame de bonnes intentions»

Il déplore: «Les politiques listées là sont avant tout des compétences obligatoires de la Région, encore heureux que vous ayez réalisé des politiques et des actions là où la loi vous oblige de les mettre en œuvre. Le reste est confus, un amalgame de bonnes intentions pour arriver à 4 propositions qui sont intégrées dans le dispositif régional depuis longtemps et qui ne sont pas à la hauteur de la situation. De plus, aucune enveloppe financière n’est assortie à ces 4 propositions censées modifier les choses». Et de conclure en élevant à hauteur d’exemple la politique conduite à Marseille en matière de mieux vivre ensemble. Succès garanti sur les bancs de la majorité.
Aïcha Sif, EELV pour sa part de souligner: «Dans un monde en crise accuser l’Autre, le croyant ou le non croyant est banal». Elle rappelle : «45% des jeunes des Zones Urbaines Sensibles sont au chômage. C’est donc peu dire qu’il faut favoriser l’accès à l’emploi, permettre la reconnaissance individuelle et la construction d’autonomie sociale, développer l’offre de transport en commun. Nous devons faire vite, il y a urgence. Le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie gagnent du terrain».

«Vivre ensemble avec nos différences qui sont une richesse et la base même du partage »

Selon elle : «Le besoin de sécurité, le renforcement de la vigilance policière ne doit pas être l’unique réponse. Et c’est au peuple qu’il appartient de réagir. Il importe d’affirmer sans cesse que le racisme n’est pas une opinion mais un délit; de rappeler l’importance de la tolérance et que le défi majeur auquel nous sommes confrontés et celui du vivre ensemble avec nos différences qui sont une richesse et la base même du partage».
Elle plaide pour que les places redeviennent des lieux d’échange, rend hommage à toutes les migrations «elles ont enrichies notre région». Souhaite que soit réinventée «une identité ouverte car, sinon, c’est une identité anti-sociale qui l’emportera. A l’obscurantisme nous devons opposer les Lumières et l’amour de la République».
Nathalie Lefebvre, Front de Gauche, insiste pour une société de Liberté, d’Égalité, de Fraternité, d’Humanité de Solidarité… Puis de revenir sur les propos de Daniel Sperling: «Nous n’avons pas de leçons à recevoir alors que la mairie de Marseille baisse les subventions aux associations culturelles et refuse de mettre en place les activités périscolaires». Pour elle : «Dans ce Pays, la République et la conquête des droits sociaux vont de pair. Or, on assiste à l’enracinement de la paupérisation et à une montée du racisme et de l’individualisme». Évoquant : «Les 5 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté et les 10 millions qui repoussent des soins».

«Le chef de l’État renvoie dos à dos progressistes et réactionnaires»

Nathalie Lefebvre considère que cette engrenage ne peut prendre fin que par l’intervention citoyenne. Et de juger, après avoir pris acte des efforts accomplis par la Région pour réduire les inégalités, «comment recréer du vivre ensemble lorsqu’on gère l’État comme une entreprise, lorsque 179 festivals culturels sont supprimés en 2015 pour cause de baisse de subvention. Lorsque le chef de l’État renvoie dos à dos progressistes et réactionnaires».
Le propos de Valérie Laupies, FN, sera en rupture avec les intervenants précédents. «Nous avons eu affaire à des attentats islamistes synonymes de racisme anti-occidental et vous condamnez les contribuables à payer. La discrimination positive que vous proposez les rend exsangues». Elle parle enseignement, évoque ce qui se passe devant «son» école, tout cela pour conclure : «Nous ne souhaitons pas donner plus à ceux qui considèrent les Français comme des ennemis».
Gaëlle Lenfant, vice présidente de la région déléguée à la jeunesse, aux solidarités avoue être surprise par les propos de Daniel Sperling «alors que vous savez que nous faisons tout pour les jeunes et que nous avons remis en place l’enseignement civique pour que les jeunes deviennent des citoyens éclairés. Vos critiques sont d’autant plus déplacées que tout le monde sait ce qui se passe à Marseille en matière de rythmes scolaires». Concernant le FN, elle assène : «Mme Laupies propose de sortir de la République pour entrer dans un monde d’individualisme. Et non, il ne s’agit de votre école mais de celle de la République».
Philippe Chesneau, EELV de lancer au FN : «Vous cultivez la haine et la division pour détruire le lien social. Vous êtes des apprentis-sorciers».
Michel CAIRE

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