Entretien de Noël avec Monseigneur Pontier: « Proposer un projet de vie face à une logique de mort »

Publié le 25 décembre 2016 à  9h40 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h45

Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille, Président de la Conférence des évêques de France en cette journée de Noël revient à nouveau sur une année douloureuse, marquée par la violence. Face à cela il rappelle: «Nous devons nous épauler au lieu de nous affronter pour construire un monde non pas parfait mais simplement humain»

Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille, Président de la Conférence des évêques de France (Photo Philippe Maillé)
Monseigneur Georges Pontier, Archevêque de Marseille, Président de la Conférence des évêques de France (Photo Philippe Maillé)

Monseigneur Pontier, en cette période de Noël, quel message faire passer alors qu’un attentat vient d’être commis à Berlin, sur un marché de Noël justement?
Monseigneur Pontier: C’est une tragédie. J’ai une pensée pour les victimes, pour les familles. Et, dans notre région, cela réveille les douloureux souvenirs de Nice. Et puis, je dois dire que j’ai été sensible à la façon dont les Allemands ont réagi à cette tragédie, avec une certaine sagesse, un sens des responsabilités. Cela donne l’envie de bâtir l’Europe pour s’enrichir de nos différences. Il y a également eu de belles réactions en France mais, différentes et c’est cette différence qui m’intéresse. Après, comment ne pas être interpellé par cette capacité de Daech a dépisté des gens, souvent jeunes, les retourner pour un projet de mort. Cela impose de se remotiver, de proposer un projet de vie, un projet de vie face à une logique de mort.

Comment garder l’espoir? Quel message d’espoir crédible transmettre alors que les attentats se succèdent?
Je pense aux victimes des attentats, je pense aussi aux Syriens, aux Irakiens, à ce qu’ils subissent depuis des années. Alors que faire? En tant que Chrétien, nous avons en nous, une confiance et un amour de l’humanité qui nous pousse à donner le meilleur de nous-même et je fais le pari que la bonté peut surmonter la méchanceté, l’engloutir, rendre plus humain. Il n’y a que la bonté qui peut dominer la violence. Et, à travers la naissance du Christ, Dieu, en se faisant enfant, vient de mettre de la bonté dans le monde. Nous transmet, dans les moments difficiles, ce message d’espoir.

Mais l’Histoire ne manque pas de périodes de violence…
Effectivement, la violence perdure, raison de plus pour être toujours plus un ami de la Paix. Ce message de fraternité dans la diversité des convictions de chacun est celui que nous pouvons construire. Nous devons nous épauler au lieu de nous affronter pour construire un monde non pas parfait mais simplement humain. De toute façon nous sommes sûrs d’une chose, si nous ne faisons pas le pari de la fraternité alors, la haine l’emportera. Alors, il n’y a pas d’autres choix, nous ne devons pas baisser les bras et nous montrer solidaires de ceux qui souffrent, proches et lointains.

Que penser de ce qui se produit à Alep?
Alep, Mossoul… Nous sommes devant une guerre sans horizon. Ceux qui auront tout tué n’ont pas un projet pour après. Et cette absurdité est rendue possible par les divisions entre les grandes puissances et les pays de la région. Nous avons un dialogue avec les chrétiens réfugiés dans la région, aucun d’eux n’a la moindre idée de ce qui va se produire après. Nous ne sommes pas en train d’assister à des libérations mais nous voyons une civilisation ancestrale, magnifique, anéantie. Et l’impossibilité des grandes nations de s’entendre, de voir l’ONU prendre des résolutions sont terribles. Car, pendant ce temps, des populations, hommes, femmes, enfants, vieillards meurent. Je ne reproche rien à l’ONU en tant que tel, je constate que les grandes Nations ne sont pas capables d’être responsables.

Où sont alors les raisons d’espérer?
Mais dans notre quotidien. Et je pense notamment à Marseille où il existe de très belles initiatives, de très belles rencontres. Et puis il y a la vie, tout simplement. A Berlin le marché est de nouveau ouvert, les gens ressortent. Nous, à Marseille, nous avons la Capitale européenne du sport 2017. Nous n’allons pas nous laisser enfermer chez nous.

Attendez-vous quelque chose de cette année Capitale européenne du Sport?
J’attends que nous revivions des moments tels ceux que nous avons connu en 2013 avec la Capitale européenne de la Culture. J’espère que nous aurons de tels événements où Marseille est heureuse de se fréquenter. Car c’est là que réside la beauté de Marseille, la fraternité existe dans cette ville et on est heureux de la vivre. Puis il y a le sport en lui-même, l’effort sur soi, la notion d’équipe, l’apprentissage de la défaite sans haine ni orgueil, le sport est une école d’humanité. Et puis il y a l’OM qui fédère. Quel que soit le quartier, la couche sociale, on voit des gamins avec sur les épaules le maillot de l’OM.
Michel CAIRE

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