IL ETAIT L’UN DE NOS « PAPABLES »

Publié le 13 mars 2013 à  4h00 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  16h16

François le premier pape venu des Amériques

L’Argentine avait son Messi, elle a désormais son pape : les 115 cardinaux réunis en conclave depuis mardi ont en effet élu l’archevêque de Buenos Aires, Jorge Mario Bertoglio, âgé de 76 ans, pour succéder à Benoit XVI. Le 266e successeur de Saint Pierre, premier jésuite à accéder à une telle fonction, a multiplié les entorses au protocole au cours de sa première apparition publique.

Quelle que soit la durée de son mandat, François marquera à jamais l'histoire en étant le premier pape venu des Amériques et le premier jésuite à accéder à cette fonction. (Photo Désabuzzé)
Quelle que soit la durée de son mandat, François marquera à jamais l’histoire en étant le premier pape venu des Amériques et le premier jésuite à accéder à cette fonction. (Photo Désabuzzé)

Il était 19h08 ce mercredi 13 mars 2013 quand une fumée blanche est apparue au-dessus de la chapelle Sixtine au Vatican : les 115 cardinaux réunis en conclave venaient d’élire le nouveau pape de l’Eglise catholique, le 266e successeur de Saint Pierre. Une mission qu’ils avaient accomplie en moins de deux jours, un temps similaire à celui qui avait permis de désigner, huit ans plus tôt, Benoit XVI. Beaucoup pourtant pronostiquaient en début de semaine un conclave plus long au vu de la situation troublée dans laquelle se trouve aujourd’hui l’Eglise aujourd’hui avec pêle-mêle les remous des scandales Vatileaks, des affaires de pédophilie ou de l’IOR, l’Institut pour les œuvres de religion dite la « banque du Vatican ». Alors pour de nombreux observateurs, cette courte durée du conclave semblait indiquer que le nouveau pape avait été choisi parmi les favoris. Car à leurs yeux, quatre tours de scrutin c’était bien peu pour permettre à un outsider de tracer son sillon en ces temps particulièrement incertains. Dès lors deux noms revenaient dans leurs propos avec insistance : ceux de l’archevêque de Milan, l’Italien Angelo Scola, 71 ans, et de l’archevêque de Sao Paulo, le Brésilien Odilo Sherer, 63 ans.
Mais quand à 20h12 le cardinal français Jean-Louis Tauran, à qui revenait l’honneur de prononcer le célèbre « Habemus Papam », ce n’est aucun de ces deux noms qu’il a prononcés. Car l’Argentine qui avait déjà un Messi, avec Lionel, le quadruple « Ballon d’Or », meilleur footballeur de la planète, a désormais un pape en la personne de Jorge Mario Bergoglio. Agé de 76 ans, l’archevêque de Buenos Aires depuis 1998 est notamment connu pour ses positions qu’il avait prises lors de la condamnation en octobre 2007 du père Christian von Wernich, inculpé de torture, acte qualifié de crime contre l’humanité commis lors de la dictature militaire (1976-1983). Le cardinal Bergoglio avait alors rejeté l’idée que l’Eglise puisse, en tant qu’institution, avoir une responsabilité dans les crimes commis lors de la « guerre sale », rejetant celle-ci sur des individus isolés.

Il ne figurait pas parmi les favoris des derniers jours… mais dans la short-list de Désabuzzé

Ses adversaires accusent en Argentine d’ailleurs celui qui était alors supérieur provincial des jésuites de Buenos Aires de ne pas s’être suffisamment opposé à la répression et même d’avoir livré à la junte deux curés qui ont survécu et témoigné. Des accusations que Jorge Mario Bertoglio a toujours réfutées.
L’annonce de cette élection surprenait l’ensemble des observateurs réunis sur les plateaux des chaines de télévision d’information continue, car l’archevêque de Buenos Aires ne figurait pas dans « les 6-7 noms » qui se murmurait ces derniers jours, mais elle ne prenait en revanche pas de court. En effet, dès le 12 février, au lendemain de l’annonce du départ de Benoit XVI, notre site l’avait dans sa liste des papables (cf. http://desabuzze.blogspot.fr/2013/02/les-papables.html).
Si l’âge du cardinal Bertoglio, 76 ans, peut surprendre à l’heure où l’on attendait un pape de rupture, le pape François, le nom qu’il s’est choisi, n’a toutefois pas tardé à multiplier les entorses au protocole établi. Tout d’abord, c’est sans l’étole de l’évêque de Rome qu’il est apparu au balcon. Comme si le nouveau pape avait voulu se présenter de la manière la plus humble à l’heure où on a beaucoup souligné ces derniers jours que les codes de l’Eglise n’étaient plus adaptés au monde d’aujourd’hui. « Le devoir du conclave était de choisir un nouveau pape et mes frères cardinaux sont allés le chercher au bout du monde », ont été ses premiers mots dans un discours prononcé en italien, visiblement improvisé mais déjà marqué d’une grande assurance. François a ensuite eu une pensée pour son prédécesseur Benoit XVI, avant de faire une nouvelle entorse au protocole en demander à ses fidèles de prier le Seigneur pour que ce dernier le bénisse : il a ainsi demandé la bénédiction de son peuple avant même de le bénir lui-même.

Un prélat réputé proche des pauvres et déjà dans l’histoire

Le mot « fraternité » est ainsi revenu à de nombreuses reprises dans son allocution. « Nous entamons ce chemin avec le peuple, un chemin de fraternité, d’amour, de foi pour nous tous. Prions pour qu’il y ait une grande fraternité dans le monde, pour que ce chemin soit fructueux pour l’évangélisation », a-t-il indiqué. Enfin, une fois la bénédiction terminée, il a ôté son étole comme si l’Argentin souhaitait via ce symbole redevenir un chrétien parmi les chrétiens, qui priera demain comme n’importe quel autre dans le monde. Une posture qu’exprime cette répétition du mot « fraternité » comme pour souligner que les fidèles étaient ses frères et sœurs, alors qu’ils pourraient les tenir pour ses fils et filles puisqu’il vient de devenir le père de l’Eglise catholique.
Sur un plan plus politique, on peut observer que les cardinaux ont choisi un pape latino-américain, la région du mode où la foi catholique est la plus dynamique aujourd’hui alors qu’elle est en perte de vitesse dans la vieille Europe. Il ne s’agit toutefois d’un Argentin alors que ce sont les voisins du Brésil et du Mexique qui comptent le plus grand bassin de catholiques dans le monde.
Enfin, les cardinaux ont choisi un pape plus âgé que ce qui était attendu puisque François est âgé de 76 ans. En ces temps troublés, on peut également considérer que le prélat jésuite, réputé pour être proche des pauvres, sera quelqu’un qui n’aura rien à perdre. Reste qu’en devenant évêque de Rome à 76 ans, contre 78 pour Benoit XVI, il devrait être à l’instar de ce dernier un pape de transition, peut-être pas dans le style et les prises de position, mais en tout cas en ce qui concerne la durée de son pontificat, car on lui prête aussi une santé fragile. Quoi qu’il en soit, François marquera à jamais l’histoire comme étant le premier pape venu des Amériques et le premier jésuite à accéder à cette fonction.

Andoni CARVALHO

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