La (dernière) chronique du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence : Rachmaninov de feu et carte blanche animalière

Publié le 13 avril 2015 à  17h54 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h49

Khatia Buniatishvili rayonnante pour donner Rachmaninov devant l’orchestre de région de Turin (Photo Caroline Doutre)
Khatia Buniatishvili rayonnante pour donner Rachmaninov devant l’orchestre de région de Turin (Photo Caroline Doutre)

Pour tirer le rideau sur la troisième édition du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence, samedi soir et dimanche après-midi, le Grand théâtre de Provence affichait complet à l’occasion de deux concerts exceptionnels. Samedi, tout d’abord, qui marquait de belles retrouvailles avec Kathia Buniatishvili, la jeune pianiste qui, il y a deux semaines, avait accepté de remplacer Martha Argerich au pied levé pour le concert inaugural du festival. Samedi, devant le Filarmonica Teatro Regio Torino la sublime interprète donnait le concerto pour piano n°2 de Rachmaninov sous la direction de Gianandrea Noseda. Dans une robe fourreau rouge, Kathia Buniatishvili a livré une interprétation de feu de cette œuvre au romantisme qui dégouline de toutes les notes d’une partition superbement construite. La soliste prend vite le pouvoir et c’est elle qui impose son tempo à l’orchestre, au risque de se placer en décalage, notamment au cours de deuxième mouvement. Puissante, éblouissante, elle tire le meilleur de son Steinway avec une aisance déconcertante, les cheveux dans les yeux et les mains redoutables d’efficacité sur l’ivoire et l’ébène du clavier. Une prestation qui devrait définitivement faire taire les grincheux qui ne voient en Khatia Buniatishvili qu’un produit issu du marketing et de la mode. Et s’il est vrai que la puissance du toucher, requise pour cette œuvre, correspond parfaitement au jeu de la jeune femme, son «bis» «haendelien», tout en légèreté, a prouvé que son toucher pouvait aussi faire preuve d’une extrême sensibilité. Un vrai grand moment de piano et de musique. Après la pause, l’orchestre et son chef offraient Shéhérazade de Rimski-Korsakov, de façon plutôt intéressante, le son chaud et les couleurs de l’orchestre arrivant à faire vibrer cette musique comme on est en droit de l’attendre, sans toutefois dépasser la limite qui transforme une bonne interprétation en interprétation exceptionnelle.

Un carnaval des animaux royal pour le final

Un casting de rêve pour un Carnaval des animaux qui fera date dans l’histoire du Festival et du Grand Théâtre de Provence (Photo Caroline Doutre)
Un casting de rêve pour un Carnaval des animaux qui fera date dans l’histoire du Festival et du Grand Théâtre de Provence (Photo Caroline Doutre)

Pour clore la manifestation, Renaud Capuçon avait décidé de jouer sa carte blanche. Et quelle carte blanche ! Un casting exceptionnel pour un Carnaval des animaux de Saint-Saëns qui fera date : A ses côtés, le directeur musical du festival avait convié Alexandra Conunova-Dumortier au violon, Gérard Caussé, alto, Edgar Moreau, violoncelle, Alois Posch, contrebasse, Mathilde Calderini, flûte, Paul Meyer, clarinette, Katia et Marielle Labèque, piano et, Guillaume Gallienne comme récitant ! Excusez du peu. A casting de rêve, interprétation royale, joyeuse, pleine de lumière et de beauté rythmée par la finesse des courts, mais percutants, textes composés et dits par Guillaume Gallienne. Un vrai cadeau pour petits et grands offert en cette fin d’après-midi dominicale par des musiciens visiblement heureux d’être conviés à la fête mais aussi, et surtout, de prendre du plaisir à jouer ensemble. Un final qui a marqué les esprits et attisé l’envie d’être déjà à la prochaine édition. Ce dernier concert avait débuté par une très belle interprétation du quintette «La Truite» de Schubert donné par Renaud Capuçon, Gérard Caussé, Edgar Moreau, Alois Posch et l’excellent pianiste David Kadouch. Entre poisson et carnaval, cette carte blanche très animalière a séduit.

Un violoncelle confié à un jeune musicien aixois

Jean-Baptiste Maizières, musicien d’Aix-en-Provence âgé de 17 ans s'est vu confier un violoncelle (Photo Caroline Doutre)
Jean-Baptiste Maizières, musicien d’Aix-en-Provence âgé de 17 ans s’est vu confier un violoncelle (Photo Caroline Doutre)

Poursuivant une action entreprise depuis la naissance du Festival du Pâques, le mécène de la manifestation vient de confier un instrument à un jeune musicien. Après un violon confié à Bilal al Nemr en 2013, un alto à Tess Joly en 2014, c’est un violoncelle «Crédit Mutuel-CIC» réalisé par Le luthier Pierre Barthel, qui a été remis à Jean-Baptiste Maizières, musicien d’Aix-en-Provence âgé de 17 ans et admis au CNSM de Paris. C’est le Président de l’établissement bancaire, Michel Lucas qui lui a confié l’instrument. En présence d’Ophélie Gaillard, qui joue aussi un violoncelle appartenant au Crédit Mutuel-CIC. Jean-Baptiste Maizières a eue l’occasion de donner un aperçu de son talent en duo avec Ophélie Gaillard et avec David Kadouch pour un beau moment de virtuosité. C’était dimanche en fin d’après-midi, en prélude au dernier concert du Festival (Photo Caroline Doutre)

Michel EGEA

Bilan de cette édition 2015

Le festival de Pâques a été suivi par 19 500 spectateurs, dont 18 000 places vendues sur les 21 concerts ; soit une augmentation de fréquentation de + 9,7 % par rapport à l’édition précédente et taux de fréquentation de 86,8 % soit +3,2 % qu’en 2014. L’origine géographique du public est ainsi répartie : étranger 6 %, France (hors Provence) : 26 % et Provence 68 %. Les 610 artistes qui s’y sont produits ont généré 1 100 nuitées. 1500 spectateurs ont pu assister aux manifestations gratuites : quatre master class de Renaud Capuçon, Nelson Goerner, Gautier Capuçon et Paul Meyer au conservatoire, deux animations musicales gratuites en ville, trois salons de musique et un concert à La Maison de Gardanne. L’édition 2016 aura lieu du 22 mars au 3 avril ; Hélène Grimaud, Yo-Yo Ma, Anne-Sophie Mutter, Valery Gergiev et Iván Fischer, entre autres, sont annoncés.

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