La start-up marseillaise « Mon Émile » intègre l’accélérateur du groupe Ramsay

Publié le 24 juillet 2019 à  9h49 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  12h06

Il fait partie des petits nouveaux lauréats du Prevent2Care, accélérateur lancé l’année dernière par Ramsay Générale de Santé. Mais la spécificité d’Émile Brin, créateur marseillais de la start-up « Mon Émile », c’est qu’il sera le seul de la promotion à être positionné sur un marché porteur : la silver économie. Sa solution : un coach de vie pour faire du 3e et du 4e âge une seconde jeunesse.

Émile Brin, fondateur il y a un an de l’entreprise
Émile Brin, fondateur il y a un an de l’entreprise

L’initiative est récente : c’est l’année dernière en effet que Ramsay Générale de Santé, premier groupe hospitalier de France, a créé le Prevent2Care Lab, premier incubateur de startups dédiées à la prévention dans la santé. Objectif : accompagner gratuitement, sans prise de participation pendant une période de 9 mois 25 start-up qui innovent en la matière, ciblant ainsi des problématiques telles que les changements de comportement, le dépistage, le suivi des patients… Les lauréats se voient ainsi proposer des ateliers collectifs animés par des experts du juridique, du business, du marketing, un espace de coworking, des salles de réunion, un appui à la levée de fonds ainsi qu’un appui opérationnel. Tout a donc commencé en février 2018 avec un premier appel à candidature, ce pour accueillir ces jeunes pousses sur deux incubateurs, à Paris et Marseille. Et on rempile, donc. 2019 a fait l’objet d’une deuxième édition, avec un appel à candidature ouvert jusqu’au 15 avril dernier. Parmi les huit lauréats marseillais de ce nouveau cru, Émile Brin, fondateur il y a un an de l’entreprise « Mon Émile ». Son signe particulier : «Je suis le seul à m’illustrer dans la Silver Economie ». Et le marché lié aux besoins des seniors est on ne peut plus porteur, explique le dirigeant, par ailleurs jeune membre du cluster européen Silver Valley. «En 2035, les 3e et 4e âges dépasseront en France les 24 millions de personnes», précise-t-il. Selon une étude de l’Insee, un habitant sur trois serait âgé de 60 ans ou plus en 2050, contre un sur cinq en 2005… Bref, autant dire que c’est un secteur d’avenir. Un constat qui a forcément poussé l’entrepreneur à se positionner sur ce marché. «A la base, je voulais mettre en place une conciergerie dédiée aux seniors. Mais je voulais qu’il y ait en plus un suivi, un accompagnement, et la création d’un lien». Il en viendra donc au concept de « Mon Émile », un coach de vie amené à bien vieillir et à faire de cette étape de l’existence une seconde jeunesse. Pour ce faire, l’action du dirigeant se décline en trois phases : réalisation d’un bilan personnalisé, proposition de solutions adaptées et enfin, mise en œuvre.

Des besoins variés

Émile Brin se rend d’abord «au domicile du client pour évaluer sa situation et, si c’est le cas, la perte d’autonomie. S’il veut me recevoir bien sûr, mais ce n’est pas obligatoire. Je détermine alors ce qu’il attend de moi, ses différents objectifs». Et les cas de figures peuvent être très divers. «Certains ont besoin de systèmes d’aide en cas de chute, car ils commencent à avoir une perte d’autonomie, donc recherche de prestataires pour des travaux. Mais il se peut aussi qu’il n’y ait pas de problématique de ce type». Besoin de compagnie, d’une personne pour faire le taxi ou les courses… «Certains me demandent aussi d’organiser leur départ en résidence senior. Au Canada, où je me suis rendu, c’est très fréquent. Les personnes optent pour cela assez jeunes, dès la soixantaine… D’autres me demandent encore de les rapprocher de leur famille. J’ai connu ce cas de figure, et aidé un couple qui voulait quitter son logement de Martigues pour vivre près de ses enfants à Toulon». Les besoins varient forcément en fonction du profil. Un homme veuf, seul, aura davantage besoin d’être aidé sur le ménager. Alors qu’une femme isolée cherchera des solutions en termes de sécurité. «Elles aspirent à ce qu’on vienne régulièrement les voir pour discuter avec elles. Elles cherchent souvent aussi des activités. Je les aiguille alors vers les clubs développés par les municipalités, proposant lotos, repas… les loisirs demandés tournent souvent autour de la restauration du lien social» D’autres encore cherchent à se rendre utiles. «Beaucoup de seniors aspirent à être bénévoles, à s’investir dans l’aide aux devoirs, la transmission des savoirs, le parrainage pour ceux qui ont du mal à trouver un travail».

Viser le national avec Ramsay

Ainsi, pour faire face à cette multiplicité de demandes, Émile Brin a mis en place un écosystème capable de satisfaire tout un chacun. Soit 84 activités à proposer, 38 professionnels et 17 associations, le tout basé en Provence-Alpes-Côte d’Azur. «Le spectre des activités est large, cela va du loto au club de golf. Il peut y avoir des activités gratuites, à l’instar de ces balades proposées par la SPA avec les chiens à l’adoption, ou payantes puisque le fait de clubs privés… J’ai mis en place diverses propositions en fonction du budget». Un concept qui, en un an, a su convaincre près d’une trentaine de clients âgés de 70 à 80 ans, de Marseille à Nice. Puisque pour l’heure, il a focalisé sa démarche commerciale sur la Région. C’est logique, au vu de son fonctionnement : avant de pouvoir s’imposer sur d’autres territoires, il faut d’abord réunir suffisamment d’acteurs du cru, publics, privés, associatifs, et dupliquer ce modèle d’écosystème… C’est justement le but de l’accélération via Ramsay : aller au national. «Déjà, le fait de savoir que j’étais accompagné par un grand groupe de santé m’a apporté davantage de visibilité et des contrats supplémentaires». A savoir qu’auparavant, Émile Brin avait d’abord été suivi au sein de l’incubateur de l’école de Kedge Business School. Le modèle économique, quant à lui, est basé sur de l’abonnement. «Je ne me suis pas commissionné sur les premiers clients afin de tester différents business models. Au final, l’abonnement est évolutif. La base, c’est entre 30 et 50 euros par mois, modulé en fonction du nombre de problématiques». Outre les particuliers, Émile Brin a réfléchi à un modèle à double détente, puisqu’il se positionne aussi sur le BtoB. « Je vends mes services aux comités d’entreprises. Ce qui peut intéresser les salariés, eux aussi en recherche de solutions pour leurs parents. Là ce n’est pas la même démarche, mes prestations rentrent dans le budget des CE ». Et visiblement, de premières touches ont déjà été faites avec des entreprises plutôt intéressées par la démarche d’Émile Brin.

La concurrence redoutable des grands groupes

Mais outre la double détente en termes de business model, l’important sera donc de s’étendre. Ce qui passera par le recrutement. «Un coach ne peut bien gérer qu’une trentaine de clients par mois, après cela devient plus difficile. Je recherche donc dès à présent des personnes qui ont la fibre dans ce domaine, sont dans la bienveillance… et ont un carnet d’adresse d’une trentaine de clients potentiels. Mon objectif étant d’en embaucher 8 à 10 d’ici 2020 ». Ce, en s’étoffant sur Provence-Alpes-Côte d’Azur et en visant l’Occitanie, dans un premier temps. Une stratégie plutôt bien ficelée en ce qu’elle limite les risques, les futurs coachs venant déjà avec un fichier de clients potentiels. Mais il faut ce qu’il faut, puisque les concurrents ne manquent pas à l’appel. Il y a tout d’abord le public, qui capte de grosses parts de marché, dans la mesure où «certains seniors ne veulent pas tracter avec le privé. Mais les Pôles infos seniors, les Maia ne fonctionnent pas très bien. Et peu de gens les connaissent… » Côté privé, il faut notamment compter avec un groupe à la force de frappe conséquente : « La Poste ». «Elle s’affirme comme un concurrent sérieux et entend se développer sur le secteur de la silver économie. Il y a déjà un service de postiers qui se rendent au domicile des personnes pour leur faire la conversation, dont les prestations se paient aussi par abonnement. Ils proposent également un système de télésurveillance basique, mais qui fonctionne bien. La notoriété du groupe joue forcément pour lui ». Et il ne compte pas s’arrêter là : il mise aussi sur le développement de maisons de retraite… Toutefois, Émile Brin croit en sa stratégie, et sa capacité à proposer une offre globale, en prenant en compte l’ensemble des problématiques du client. «Et puis, avec le suivi dont je me charge, je deviens pour ces derniers un tiers de confiance». Au point qu’il a même créé une charte de déontologie, à laquelle adhèrent ses prestataires et intervenants.
Carole PAYRAU

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