Lettres adressées aux candidats des municipales à Marseille par Jean-Benoît Vion

Jean-Benoît Vion écrit à tour de rôle à tous les candidats aux municipales de Marseille. A tout seigneur, tout honneur, il a ouvert cette rubrique épistolaire par une missive adressée au sénateur-maire UMP Jean-Claude Gaudin. Ce lundi sa lettre est destinée à Patrick Mennucci, tête de liste socialiste.
Destimed

Cher monsieur le député-maire Patrick Mennucci

Puis-je me permettre de vous envoyer cette courte missive en cette fin d’année 2013. Une année, particulièrement épuisante, pour vous, physiquement et nerveusement… 2014, risque fort d’être une année plus rude encore. Vous allez entrer en campagne électorale. Ah les campagnes, c’est votre métier, vous êtes un super professionnel dans ce domaine. Je reviendrai sur tous vos combats pour propulser vos amis.

Et je me demande, qui peut orchestrer une campagne politique pour Mennucci si ce n’est Mennucci lui-même. Les uns et les autres disent que vous êtes un vrai magicien dans ce domaine, « le meilleur ». Même vos adversaires le reconnaissent.

Mais ce n’est pas toujours le « jack pot ». Vous l’avez très bien décrit dans votre livre, Ma candidate, publié en 2007 sur la campagne de Ségolène Royal. Le résultat n’a pas été à la hauteur de vos espérances mais il vous a apporté une expérience pour préparer l’avenir. Vous avez découvert, à cette occasion le monde impitoyable des médias parisiens qui vous avaient baptisé Ségolin. J’ai toujours considéré ce surnom comme ridicule et je regrette que vous l’ayez assumé. C’est un peu comme si en 2008 lors des dernières élections municipales, l’on vous avez baptisé « Guérinin ». A l’époque, vous étiez directeur de campagne du candidat socialiste, un certain Jean Noël Guérini. Auparavant, vous étiez directeur de campagne de Vincent Peillon, un parachuté dans le Sud-Est pour les élections européennes. Cher Monsieur Mennucci, vous aimez vos poulains mais je me demande si vous ne leur portez pas la poisse !

Je plaisante bien sûr. Vous êtes sorti vainqueur d’une primaire socialiste douloureuse. Des anciens militants du PS m’ont expliqué qu’ils avaient mal vécu cette période. L’un d’eux m’a dit : « C’est pire que la bataille Fillon-Coppé à l’UMP durant l’automne 2012, mais eux on s’en fout. Les débats des primaires étaient nuls, pitoyables et surtout ridicules. Je me suis fâché avec des amis de 30 ans à cause des 6 candidats qui se déchiraient, chacun avez son favori. Depuis, nous nous sommes réconciliés car il faut que Marseille reviennent à gauche. Mennucci, ce n’est pas mon pastis préféré mais je resterai fidèle à ma carte socialiste.»

Il a raison ce vieux socialiste élevé sous l’ère Defferre. Vous savez qu’une campagne électorale entre « amis » ouvre des blessures qui mettent de longs mois à cicatriser. Les coups de poignards, même verbaux, sont douloureux pour les électeurs marseillais. Ils n’oublient pas les petites phrases assassines, qui réjouissent les journalistes parisiens, mais, eux, ils aiment les idées et les projets socialistes pour leur ville.

Cher Mr Mennucci, vous allez rentrer en 2014 dans une zone de turbulences contre laquelle vous devrez vous battre sur tous les fronts. Vos adversaires, je n’en doute pas, vous saurez leur répliquer. Mais, à votre place, je me méfierai beaucoup des gros trous d’air qui vont venir par le souffle de vos amis politiques.

Vous avez réussi à rassembler tous les hauts responsables socialistes sous votre aile. Ouvertement, les uns et les autres vous soutiennent sans arrières pensées. Mais, êtes-vous certain de la fidélité de tous et du soutien de leurs proches ?
Un exemple entre 10, Samia Ghali…
Figurez-vous que j’ai rencontré cette jeune femme pour la première fois dans votre bureau. Nous étions Place du 4 septembre, en 98, dans la permanence de Michel Vauzelle pour les élections régionales. Vous étiez déjà, eh oui, directeur de campagne et vous m’avez présenté une jeune et jolie candidate pour une interview. Je m’en souviens, vous m’aviez dit avec votre faconde habituelle : « Je la laisse parler à ma place, elle est brillante, vous verrez, elle ira loin ». Une chose est certaine, vous êtes un visionnaire.

En échange de quelques promesses qu’elle a obtenues et que vous tiendrez, j’ai l’intime conviction qu’ elle vous aidera sans arrières-pensées.
Je ne suis pas certain que tous les socialistes, notamment des quartiers Nord partagent son enthousiasme naissant. Pour eux, vous serez toujours « le candidat de Paris ». Il est vrai que vous êtes très proche des « chefs » de la rue Solférino et de Jean Marc Ayrault. Deux membres de son cabinet, Christophe Chantepy et Camille Putois, étaient à vos côtés pour la campagne de Ségolène Royal.

Pape Diouf me confiait récemment, « Mennucci est très bon, c’est un homme intelligent, sympathique, chaleureux, mais un handicap, il est trop proche des socialistes parisiens et à Marseille tout ce qui touche Paris de près ou de loin, on n’aime pas cela… ».

Vous le savez, dans les semaines qui viennent, une autre grosse épine dans le pied risque de vous tracasser. Elle viendra se planter là où vous l’attendez déjà. Jean-Noël Guérini. Il s’est rendu, sans vous prévenir, mardi dernier pour une opération séduction dans un centre social à quelques mètres de votre mairie du 1er arrondissement, un camouflet qui vous a mis quelque peu en colère : « Scandaleux, avez-vous dit à La Provence, Jean-Noël Guérini n’a qu’un but, pérenniser le système Gaudin avec qui il a un accord depuis bien longtemps. »

Alors là, je me gausse franchement. Car, ce n’est pas un secret d’État d’apprendre que Gaudin préfère Guérini à Mennucci mais en revanche, j’espère que vous allez donner aux électeurs le contenu de cet accord.

Cela ne vous a pas échappé, la campagne sera sans pitié. Vos adversaires ne vont pas vous épargner, vos ex amis encore moins… Je ne suis pas certain que le Président du Conseil Général ait conservé votre livre Nous les Marseillais sur sa table de nuit. Dans cet ouvrage, Vous n’hésitez pas à dénoncer le système « mafieux » de Guérini…
Respectueusement Vôtre
Jean-Benoît VION

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