Mars en Baroque – «Corpi Ingrati» : une première collaboration réussie entre Concerto Soave et le Ballet National de Marseille

Publié le 14 mars 2017 à  20h30 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h45

Danseurs contemporains, chanteurs et musiciens baroques réunis sur scène pour un spectacle qui interpelle. (Photo François Guery)
Danseurs contemporains, chanteurs et musiciens baroques réunis sur scène pour un spectacle qui interpelle. (Photo François Guery)

L’édition 2017 du festival Mars en baroque, qui se poursuit jusqu’au 31 mars, a été marquée par la création de «Corpi Ingrati – balli di Claudio Monterverdi» coproduit par Concerto Soave et le Ballet National de Marseille (BNM). «Corpi ingrati», les corps des ingrates qui refusaient de se soumettre aux désirs patriarcaux et au(x) plaisir(s) masculin(s). En 1638, Monteverdi compose un madrigal «Il ballo del ingrate» sur ce thème avec, comme protagonistes, Venus, une ingrate, Amour et Pluton. Unir danse contemporaine et musique baroque, tel le projet mené à terme avec succès par Jean-Marc Aymes, le directeur musical de Concerto Soave et les chorégraphes du BNM Emio Greco et Pieter C. Scholten. Allant bien au-delà d’un simple propos féministe, c’est une pièce qui s’élève contre tous les totalitarismes, contre la montée des populismes qu’ont décidé de créer les maîtres d’œuvre. Barbelés sur le devant des la scène, slogans accrochés aux murs, c’est sur un fragment de discours de Marine le Pen que s’ouvre le spectacle. Le ton est vite donné et l’articulation entre la bande son et le «live» de Concerto Soave fonctionne assez bien. La chorégraphie, brutale et dense, illustre le propos ; un peu trop, parfois, avec quelques répétitions en forme de clou trop enfoncé. Difficile de respirer pendant ces minutes intenses ; mais le sujet mérite cet uppercut scénique. De la puissance, il en faut aux danseurs du BNM et du BNMNEXT Carlos Diez Moreno, Bryony Harrison, Francisco Rodrigues et Kengo Nanjo. Le quatuor doit ici réaliser une réelle performance physique imposée par une chorégraphie sans concession. Ce qui est intéressant, dans cette création, c’est que la musique baroque ne pâtit pas du volume contemporain et vient apporter quelques virgules de repos intellectuel et sonore à l’auditeur. Là aussi la performance est notable car ce n’est pas un millefeuille qui nous est servi couche après couche, mais un plat aboutit et harmonieux. Il faut dire que Concerto Soave est au top de sa forme pour la première du spectacle avec Maria Cristina Kiehr et Anne Magouët, sopranos, Pascal Bertin, contretenor et Renaud Delaigue, basse. Quatre voix solides et bien placées. Sous la direction de Jean-Marc Aymes, derrière ses claviers, les instrumentistes ne sont pas en reste et imposent leur personnalité et leurs couleurs ; il s’agit d’Alba Roca et Simon Pierre, violon, Géraldine Roux, alto, Cécille Vérolles au violoncelle. Chanteurs et instrumentistes que nous avions découvert en première partie avec les interprétations de «Il Ballo di Tirsi e Clori» puis «Volgendo il ciel» du même Monterverdi. Au quatuor cité plus haut, s’était joint Lluis Vilamajo, superbe ténor baroque, dont on se demande, comme pour ses camarades solistes lyriques, s’il fallait les sonoriser. Une fois ce bémol énoncé, force est de reconnaître avec plaisir que l’événement de «Mars en Baroque» en fut réellement un et que cette première collaboration entre Concerto Soave et le BNM devrait être suivie de nombreuses autres… Tant mieux !
Michel EGEA
Pratique. Mars en Baroque déroule son programme jusqu’au 31 mars à Marseille. Renseignements : 04 91 90 93 75. marsenbaroque.com

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