Marseille: « Il est temps de redonner du sens et de la vigueur à la décentralisation, de parier sur les libertés locales »

Publié le 27 septembre 2018 à  10h22 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  13h46

Les élus de droite, du centre et de gauche ont fait entendre leur opposition, mercredi soir à Marseille, à la veille de l’Assemblée générale de l’Association des régions de France, à la volonté recentralisatrice du Gouvernement. Occasion pour eux de lancer l’appel de Marseille, un moment historique, comme l’indiquera Renaud Muselier, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur: «C’est la première fois que les trois plus grandes associations d’élus locaux se réunissent et parlent d’une même voix».

Hervé Morin, Martine Vassal, François Baroin, Gérard Larcher, Dominique Bussereau  (Photo Robert Poulain)
Hervé Morin, Martine Vassal, François Baroin, Gérard Larcher, Dominique Bussereau (Photo Robert Poulain)
Hervé Morin, président des régions de France va dans le même sens: «Ce que nous faisons est un geste politique. C’est la première fois que nous sommes ensembles alors que tout est fait pour nous diviser. Nous sommes tous réunis et nous sommes des militants des territoires, de la décentralisation et de la démocratie». Tandis que François Baroin, le président de l’Association des maires de France (AMF) jugera qu’il en aura fallu beaucoup pour que son association et celles des départements et des régions se mobilisent ainsi: «car nous sommes violemment modérés et nous sommes organisés pour trouver, au pire, le plus petit dénominateur commun». Il dénonce une volonté de diviser communes, départements et régions: «Un jeu dans lequel nous n’entrerons pas». «Nous venons de vivre une année exigeante, incertaine et extraordinairement décevante», juge-t-il avant de préciser: «Nous ne sommes pas un syndicat d’élus et d’abord il n’y a rien de plus beau qu’un syndicat, rien de plus beau que des élus. Surtout quand les représentants des territoires ne sont pas des succursales de l’État». «Ce combat, poursuit-il, ne nous oppose pas à Paris, son maire et des élus ont signé l’appel, il nous oppose à la haute administration qui n’a jamais accepté la décentralisation».

«Nous sommes revenus au temps des « Précieuses ridicules »»

Dominique Bussereau, président de l’Association des départements de France (ADF) évoque «Les précieuses ridicules» dans laquelle il est dit: «Hors de Paris point de salut pour les honnêtes gens». «Hé bien nous sommes revenus au temps des « Précieuses ridicules »», lance-t-il. Parle d’un État qui «fait le coucou dans le nid de notre bonne gestion. Pourtant une vraie décentralisation est possible, facile et souhaitable». Il réclame: «un État à nos côtés et pas dans la défiance. Nous, Régions de France, départements de France et association des maires de France incarnons l’esprit de la décentralisation. Sans confiance il n’y a pas de progrès économique, social et surtout pas de démocratie». Pour Gérard Larcher, Président du Sénat : «Il est temps de redonner du sens et de la vigueur à la décentralisation, de parier sur les libertés locales. Le gouvernement doit s’engager dans un dialogue sincère avec les collectivités mais pour cela il doit respecter les élus du territoire». «J’ai une seule et même conviction, c’est à partir de ses territoires que la France pourra se transformer», déclare Martine Vassal, la présidente du département des Bouches-du-Rhône et nouvelle présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence. Déplore les transferts de charges, l’absence de compensations de l’État. Souligne la question des migrants mineurs non accompagnés: «Bien sûr que nous sommes prêts à prendre nos responsabilités, encore faudrait-il que l’État fasse de même». Alors, pour elle, le chef de l’État «doit entendre l’appel de Marseille. La décentralisation doit être repensée, la recentralisation bannie ».

«La République a d’abord été communale»

Le politologue Dominique Reynié, rappelle que «la République a d’abord été communale» et la globalisation actuelle renforce ce besoin de proximité : «Nous avons un besoin croissant d’être d’un lieu sur lequel on peut agir». Phénomène renforcé, selon lui, par la numérisation qui encourage «un partage, une pluralité des valeurs» et de conclure en plaidant pour une pluralité de niveaux de compétences et des financements croisés. Tandis qu’Agnès Lebrun, maire de Morlaix dénonce : «La verticalisation actuelle du pouvoir dépouille de leurs prérogatives les maires et envoie une funeste signal à nos concitoyens: cela ne concerne plus vos maires donc cela ne vous concerne plus». André Viola, le président PS du Conseil départemental de l’Aude avoue ne pas en revenir: «Si on m’avait dit voilà deux ans que je viendrais à Marseille pour tenir un meeting commun avec des élus de droite je ne l’aurais jamais cru. C’est là un exploit à mettre au crédit de notre Gouvernement». Quitte le mode humoristique pour affirmer: «Il n’y a pas deux démocraties en France, celle issue du scrutin présidentiel et des législatives de 2017 et la démocratie locale, nous devons être respectés car nous sommes tous des élus de la République». D’autant que François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire prend un exemple passé pour montrer «les méfaits des technocrates». «Voilà des années des technocrates ont décidé de réduire le numerus clausus dans la santé pour faire des économies ce qui conduit aujourd’hui à l’existence de déserts médicaux».
Michel CAIRE

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