Marseille: Tigran Mekhitarian sera sur la scène du Théâtre Massalia les 25 et 26 janvier dans « La vie devant soi »

Publié le 17 janvier 2019 à  10h09 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  20h44

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Destimed vie devant soicopieCe fut un des beaux spectacles de ce Off d’Avignon 2018. A la maison de la poésie on donnait «Deux frères», la très belle pièce de Fausto Paravidino, auteur italien né à Gênes en 1976 et qui était du 19 au 21 décembre dernier sur la scène de La Criée pour y proposer son spectacle « La ballata di Johnny e Gil » qu’il joua et mis lui-même en scène. Créée en France début juin 2008 dans le cadre du 3e Festival de l’Oise, «Deux frères» est une œuvre magnifique qui, bénéficiant du texte français de Jean-Romain Vesperini demeure poignante de bout en bout. Au départ deux frères donc Boris et Lev, qui unis par une relation quasi exclusive habitent ensemble dans un appartement où ils hébergent Erica. Une jeune fille libre, qui les trouble l’un comme l’autre mais dont la liaison avec Lev va déclencher un cataclysme. Et quand Boris tombe amoureux d’Erica, le drame semble inévitable, et les deux frères n’ont plus d’autre choix que de tout tenter pour écarter l’intruse de leur vie. Succédant à celle de Fabio Allesandrini donnée à sa création, la mise en scène collective coordonnée par Tatiania Breidi a débarrassé la lecture de la pièce de tout le pathos ordinairement exprimé. Jouant surtout sur les lumières et l’expression des corps ce travail est une des plus belles choses qui se puisse voir sur pareil sujet. Ayant subi des transformations notamment concernant le personnage féminin, «Deux frères» a bénéficié du jeu exceptionnel des trois comédiens, Théo Askolovitch, Lucie Brandsma, et Tigran Mekhitarian, magnifiques et solaires. De son personnage de Lev qu’il a incarné avec puissance et intériorité, Tigran Mekhitarian précise que «c’est un être maladroit, qui n’ayant pas les codes normés du langage, peine à communiquer, et qui n’ayant que peu de fierté ne parvient pas à dire les choses». Formidable comédien, Tigran Mekhitarian a beaucoup aimé interprété ce rôle aux côtés de son camarade de théâtre Théo Askolovitch, dont il admire le travail et qu’il a mis en scène dans «Les fourberies de Scapin» en 2017, (avec aussi dans le rôle de «Sylvestre» le formidable Louka Meliava, qui sera en mars à l’affiche du film de Remi Besançon tiré du roman de Foenkinos «Le mystère Henri Pick»), Théo une sorte de frère qu’il a retrouvé sur la pièce «Djihad» de Ismaël Saïdi, un spectacle de dénonciation des fanatismes soutenu en France par la ministère de l’Éducation nationale, et reconnu en Belgique d’utilité publique. Jamais là où on l’attend Tigran choisit de travailler en toute liberté. Né le 16 décembre 1992 à Vanadzor en Arménie, il connut là-bas des moments particulièrement difficiles. En 1993, les conséquences du séisme de 1988 et la guerre qui fait rage au Karabagh rendent les conditions de vie extrêmement difficiles. Sa mère décide de quitter l’Arménie. C’est à Menton dans le sud de la France que Tigran fait sa scolarité. De 2004 à 2011, il suit les cours d’art dramatique au conservatoire municipal de la Ville. Bac en poche, il « monte » à Paris pour parfaire sa formation. il s’inscrit au conservatoire du 8e arrondissement puis en 2013, il intègre le Cours Florent, où il recevra une mention. En 2014-2015, Il tourne dans de nombreux courts-métrages ainsi que dans une série où il tient le premier rôle « Rendez vous à Nice » pour les établissement scolaires. (diffusion États-Unis). Eté 2015, ce sera la création collective «Wonderland» au festival D’Avignon. Cette même année, après audition, il décroche un rôle dans «L’origine de la violence», film d’Elie Chouraqui (sortie avril 2016).

Donner de la nourriture à ses partenaires de jeu

Soucieux d’incarner des personnages complexes, il aime quand le texte raconte quelque chose de fort. «Dans ce cas-là», dit-il, «il ne faut pas le « jouer » au sens strict du terme, mais donner autre chose, en donnant la réplique aux autres comédiens, avec la bonne intention, sans pathos, sans tomber dans le mélodrame.» Et quand on lui demande ce qu’est selon lui un bon acteur, il répond : «C’est quelqu’un qui pense à son partenaire, qui lui donne de la nourriture qui ne vient pas pour jouer uniquement pour le public. Un bon acteur c’est quelqu’un qui a de l’humanité.» Quant à savoir ce qu’est une bonne pièce Tigran Mekhitarian insiste sur l’idée d’une bonne accroche d’un solide prolongement et d’une fin structurée. Et qui a bien sûr un beau texte, sans lequel aucune pièce digne de ce nom mérite d’être jouée. Cela il l’a bien ressenti avec le «Salinger» de Koltès ou «Les yeux d’Anna» de Luc Tartar où il s’est comme d’habitude totalement investi. Heureux Tigran Mekhitarian l’est pleinement encore quand il évoque cette pièce «La vie devant soi» tirée du roman que Romain Gary publia sous le pseudonyme de Emile Ajar et qui lui valut le Prix Goncourt 1975. Un livre magique dont on peut écouter en livre audio une version abrégée proposée par Bernadette Lafont, Kamel Belghazi et quatre autres comédiens réunis pour la collection «Écoutez lire» des éditions Gallimard. «Les cauchemars, c’est ce que les rêves deviennent en vieillissant», peut-on entendre au fil de la plume de l’auteur. «La vie devant soi» au théâtre joué par Tigran Mekhitarian, aux côtés de Maia Le Fourn, et Nicolas Gousseff c’est une mise en scène de Simon Delattre, sur une adaptation d’Yann Richard et une musique live Nabila Mekkid (Nina Blue). Entre théâtre, marionnettes et musique, voilà une réussite que l’on pourra voir à Marseille, les 25 et 26 janvier au Théâtre Massalia. L’intrigue en est simple : Momo et Madame Rosa vivent à Belleville. Elle est juive, c’est une ancienne prostituée qui s’occupe des enfants des filles «parties se défendre en province». Momo est arabe et c’est lui, narrateur, qui nous raconte son quotidien avec son langage poétique et décalé. L’histoire d’amour qui les relie, Madame Rosa et lui, est la véritable toile de fond de ce roman peuplé de rencontres et de situations inattendues. Pour ne pas vivre sans amour, il faut choisir soi-même sa famille de cœur semble être la leçon principale de cette histoire à laquelle Tigran Mekhitarian souscrit pleinement. Le lien qui unit Momo, le petit Arabe débrouillard, à Madame Rosa, une vieille femme juive autrefois prostituée, est de ceux qui sont indéfectibles. L’adaptation théâtrale et musicale proposée par Simon Delattre fait souffler un vent d’espoir. L’altruisme, la solidarité et la générosité sont en effet au centre de cette représentation émouvante, drôle et ludique. Les personnages qui peuplent le récit sont incarnés en scène par une série de marionnettes. Façon de rappeler à chacun qu’il n’est pas vain de prêter l’oreille à l’enfant tendre qui sommeille en nous. Un esprit d’enfance qui définit bien en tout cas la personnalité, l’engagement de Tigran Mekhitarian, acteur également très physique, très sportif qui n’en finit pas de laisser sur les spectateurs venant l’applaudir de spectacle en spectacle des traces profondes, et un réel sentiment de fraternité.
Jean-Rémi BARLAND

« La vie devant soi » d’après Romain Gary. Théâtre Massalia – Friche Belle de Mai – 41, rue Jobin (entrée piétons) – 12, rue François Simon (parking) 13003 Marseille Représentations  » Petit Plateau » les vendredi 25 janvier et samedi 26 janvier à 19 heures – Pour la représentation du 26 janvier le spectacle adapté en LSF – Réalisation Accès Culture • Tarif(s) : Adulte/enfant : 8 € – Carte Massalia : 6 € – Billeterie : 04 95 04 95 75 – Standard: 04.95.04.95.70 – Plus d’info et réservation: theatremassalia.com/

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