Métropole Aix-Marseille-Provence : L’économiste Christian Saint-Étienne présente son projet «pour un territoire extraordinaire»

Publié le 25 juin 2015 à  15h36 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  19h18

Élus et représentants du monde économique se sont donnés rendez-vous ce 24 juin, au Palais de la Bourse à Marseille, pour la présentation des travaux du professeur Christian Saint-Étienne, sur la métropole réalisés à la demande de la CCI Marseille Provence. Lequel indique : «Je suis arrivé avec des a priori et j’ai découvert un territoire avec un potentiel extraordinaire». Et d’insister sur le fait que le monde est entré depuis les années 80 dans la troisième révolution industrielle, un phénomène qui se conjugue avec métropolisation. Alors que Jacques Pfister, le président de la CCIMPM avance pour sa part «Les choses évoluent, quelque chose est en train de se passer sur ce territoire».

Élus et représentants du monde économique se sont donnés rendez-vous ce 24 juin, au Palais de la Bourse à Marseille, pour la présentation des travaux du professeur Christian Saint-Étienne, sur la métropole(Photo Robert Poulain)
Élus et représentants du monde économique se sont donnés rendez-vous ce 24 juin, au Palais de la Bourse à Marseille, pour la présentation des travaux du professeur Christian Saint-Étienne, sur la métropole(Photo Robert Poulain)
Présentation à la presse des travaux du professeur Christian Saint-Étienne sur la métropole réalisés à la demande de Jacques Pfister, président de la CCI Marseille Provence (Photo Robert Poulain)
Présentation à la presse des travaux du professeur Christian Saint-Étienne sur la métropole réalisés à la demande de Jacques Pfister, président de la CCI Marseille Provence (Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)
(Photo Robert Poulain)

«Des travaux de l’OCDE mettent en lumière le fait que la durée de vie a stagné pendant 18 siècles. L’espérance de vie était de 23 ans en 1780, la mortalité infantile était phénoménale. Lorsque l’on arrivait à l’âge de 7 ans on pouvait espérer vivre jusqu’à 40 ans. La première révolution industrielle a tout changé, multipliant l’espérance de vie», souligne le Pr. Christian Saint-Étienne. Cette première révolution, c’est celle de la vapeur, elle est suivie par celle de l’électricité puis par celle de l’informatique. «L’activité, les modes opératoires et tous les systèmes de production et de distribution publics et privés, c’est à dire quasiment l’ensemble de l’économie, sont révolutionnés par l’informatique, internet et les logiciels en réseau». Pour lui, cette révolution résulte de trois mutations : scientifique et technologique; mutation capitalistique, entrepreneuriale et organisationnelle; mutation des usages privilégiant le cognitif sur le physique. «Nous avons créé le terme d' »iconomie » pour répondre à cette nouvelle donne», avance-t-il.

«La mutation vers l’iconomie s’accompagne par la métropolisation de la croissance»

Selon l’économiste: «La mutation vers l’iconomie s’accompagne par la métropolisation de la croissance. Cette économie s’enracine essentiellement dans les métropoles connectées, aux projets ambitieux et lisibles, fiscalement accueillants et bénéficiant d’une intégration harmonieuse des transports, des activités et de l’habitat». Et de mettre en exergue que les métropoles structurées, qui ont un projet clair, ont un développement du PIB par habitant deux fois plus important que les autres.
Pour Christian Saint-Étienne le territoire d’Aix-Marseille a tout pour réussir, rappelant qu’au plus une métropole a de filières économiques au plus elle peut se développer et au plus elle est solide. Or, poursuit-il:«Aix-Marseille-Provence dispose de deux projets structurants qui montrent que ce territoire est déjà entré dans la 3e révolution industrielle : le projet Henri-Fabre et Marseille Immunopôle, sans oublier The Camp, un écosystème d’innovation dédié à la transformation numérique et à la ville du futur, intelligente et durable. Le potentiel productif métropolitain s’appuie en outre sur sept filières en expansion : l’aéronautique, le numérique, le transport maritime-logistique, l’énergie, la santé, l’eau et l’environnement, l’art de vivre et le tourisme». On y trouve également «3 secteurs qui se réinventent» : la micro-électronique, le raffinage et la chimie, la métallurgie – sidérurgie. Et trois émergentes : l’économie créative, celle du sport et l’économie circulaire. Considérant: «Il faut maintenant créer une métropole qui fait envie, avec des événements sportif et culturel identitaires du nouveau territoire métropolitain».

«Aix-Marseille-Provence doit capitaliser sur sa position géostratégique »

Alors pour l’universitaire: «Aix-Marseille-Provence doit capitaliser sur sa position géostratégique et la dynamique du développement du bassin méditerranéen pour prendre le leadership économique et scientifique en Europe du Sud et dans le monde méditerranéen. Elle bénéficie pour cela d’une fenêtre de tir historique au regard des investissements entrepris le long des routes stratégiques du transport maritime mondial : la réorganisation des flux logistiques mondiaux consécutive à la saturation des ports du Nord de l’Europe, le doublement du Canal de Suez et le développement attendu de l’Afrique». Il ne cache pas des faiblesses: «Elle a des dysfonctionnements à régler de toute urgence, à commencer par l’inadaptation et l’engorgement des réseaux de transport et l’insuffisance de l’offre de logements abordables». Face à cela, il plaide en faveur d’un master plan structurant sur 10 ans, piloté par la métropole. «Il permettrait de développer simultanément l’offre foncière et immobilière, construire les infrastructures portuaires nécessaires pour permettre au Port de tripler le trafic de conteneurs et développer son hinterland, d’ajuster l’offre de transports en commun en interconnectant les principaux bassins de vie et d’emploi et enfin, d’accélérer la construction de logements intermédiaires».
Il importe donc, selon lui, d’adopter très rapidement un pacte de gouvernance et financier. Afin de financer l’ambition de faire d’Aix-Marseille-Métropole «la capitale « iconomique » du bassin méditerranéen à horizon 2030, les autorités métropolitaines devraient alors s’accorder sur un pacte budgétaire et fiscal permettant de doubler sa capacité d’autofinancement nette estimée aujourd’hui à 150 millions d’euros pour le budget 2018, ce qui placerait la métropole dans la moyenne et de l’augmenter ensuite pour atteindre 700 millions d’euros en 2020».
Christian Saint-Étienne envisage deux scenarii financiers : le premier permettrait de dégager une enveloppe de 14 milliards d’euros sur la période 2020-2030, le second de 20 milliards. Cette volonté se matérialiserait par le premier contrat de plan métropole-État-région.
Concernant la gouvernance le document préconise cinq compétences stratégiques qui ne seront pas délégables : définition du projet métropolitain, mobilité, aménagement et développement économique, environnement et énergie, gestion des déchets. «La métropole devra ensuite déléguer aussi largement que possible toutes les tâches de gestion aux Conseils de territoire», indique-t-il.
Pour Jacques Pfister, le président de la CCIMP :«La métropole est une fabuleuse aventure pour notre territoire. Il faut voir grand tout de suite. L’annonce par le Premier ministre de 80 millions d’euros supplémentaires est une aubaine qui doit permettre à la métropole, non pas de prévoir un petit projet supplémentaire, mais de s’engager sur un endettement à long terme. Avec 80 millions par an, on peut emprunter près de 2 milliards d’euros et lancer tout de suite le projet de nouvelle gare à Saint-Charles».

«Que l’État prenne plus au sérieux nos demandes»

Le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin, considère: «Il faut avancer groupé». Il rappelle qu’en matière de métropole, «nous avons raté un train en 1966 lorsque Gaston Defferre a refusé le projet métropolitain du Général de Gaulle». S’il s’affirme comme un fervent défenseur de la métropole, Jean-Claude Gaudin n’en réclame pas moins que «l’État prenne plus au sérieux nos demandes», tout en concédant: «On ne peut tout attendre de ce dernier».
Martine Vassal, la présidente du Conseil départemental 13, considère:«Grâce au travail accompli par Jean-Claude Gaudin, Guy Teissier, Maryse Joissains, les conditions sont réunies pour attirer les entreprises, créer de l’emploi. Aujourd’hui la métropole doit permettre de développer l’économie, c’est là son rôle majeur. En matière de transport en commun, il faut se mettre autour d’une table. Il faut développer le réseau ferré. Une ligne de fret existe, elle pourrait être développée et nous permettre de rejoindre l’axe rhodanien. Il faut travailler sur l’axe aéroportuaire, il n’est pas concevable qu’il n’existe pas de transport en commun en site propre entre l’aéroport et la ville centre. Pourquoi ne pas le financer en créant un centre des congrès? Les Cartreize sont efficaces mais ils ne suffisent pas. En ce qui concerne le réseau routier on ne peut plus accepter que la réalisation de la L2 prenne quarante ans. Et on ne peut pas accepter non plus que l’État nous vole entre 50 et 80 millions». Elle estime: «L’avenir de l’emploi c’est l’entreprise. Il nous revient, collectivités, de permettre au monde économique de créer, développer des entreprises. Pour cela nous devons, en premier lieu, proposer du foncier, du transport et des logements».

«Cette présentation me fait penser à la métropole de projets à laquelle je crois»

Maryse Joissains Masini, la maire d’Aix-en-Provence s’associe «à l’enthousiasme général», avant de juger: «Cette présentation me fait penser à la métropole de projets à laquelle je crois, pas à celle votée par l’Assemblée Nationale. Vous parlez des chefs d’entreprise, des universitaires, des talents qui existent sur ce territoire. Vous ne parlez pas du projet technocratique qui a été voté. Et si cette dernière qui l’emporte dans 10 ans, nous aurons simplement des dettes à gérer. Alors, pour cette métropole de projets, il va nous falloir nous entendre sur son organisation, la gestion des fonds». Et de préciser: «C’est là ce que je reproche à la Mission Interministérielle, elle ne nous aide pas à avancer sur des questions très concrètes. Les idées ont les a. Le projet Henri-Fabre on en a réussi la moitié, celle qui manque, c’est celle où l’Etat n’a pas apporté les fonds qu’il devait ».
Guy Teissier, le président de MPM donne acte à Maryse Joissains. «La Loi ne va pas nous permettre de développer la métropole. La sommes des 6 budgets des EPCI ne fait pas un budget et ce ne sont pas les 50 millions d’euros annuels qui vont nous permettre d’avoir de grands projets lorsque l’on sait que les 1 200 mètres de tram que nous venons de réaliser nous ont coûté 57 millions. C’est à nous qu’il reviendra de financer en commun des projets. Nous savons que nous avons des carences, des retards, il nous faut y remédier, créer de l’attractivité qui attirera des investisseurs et, ainsi, créer un cercle vertueux».
Laurent Thery, le Préfet délégué en charge du projet métropolitain de réagir: «Nous avons besoin de la métropole et c’est le gouvernement qui l’a décidé, c’est le Parlement qui l’a voté puis, ce sera aux élus de prendre les décisions et pas aux technocrates. Ensuite la dotation ne sera pas de 50 millions mais de 85 par an. Et il faut bien savoir qu’Aix-Marseille, avec Paris et Lyon, sont les trois métropoles principales et ce sont celles qui ont le plus de chance de se développer à l’international».Concernant les transports, il rappelle: «Nous avons publié un livre blanc qui propose plusieurs scénarii». «Nous avons également lancé, ajoute-t-il, une consultation internationale, trois équipes ont été sélectionnées pour proposer chacune une vision de cette métropole».
Michel CAIRE

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