Musée Regards de Provence : François Bouché et « Vies silencieuses » à l’honneur

Publié le 17 octobre 2015 à  21h39 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  20h08

Le Musée Regards de Provence, à Marseille donne l’occasion, pour la saison automne/hiver 2015, de découvrir un artiste trop méconnu du grand public François Bouché, (1924-2005) une émotion qui permet de comprendre, éprouver pourquoi cet artiste est qualifié par certains critiques comme «l’un des grands sculpteurs du XXe siècle». Une centaine de pièces met en lumière sa passion pour le dessin et la peinture ainsi que sa vocation et virtuosité pour la sculpture monumentale et l’architecture. Quelques escaliers pour se remettre de cette émotion et s’apprêtait à en éprouver de nouvelles et on découvre la seconde exposition temporaire « Vies Silencieuses » à travers le prisme d’artistes du XVIIIe siècle à nos jours, révélant plus d’une centaine de compositions classiques, romantiques, modernes et contemporaines, de natures mortes, d’objets du quotidien ou rares, de fruits, légumes et autres victuailles, gibiers, poissons, entourés de vaisselles finement ciselées, accompagnés de vases de fleurs, de bouquets, de livres, d’instruments de musique… Une exposition qui éclaire là aussi, et on saisi pourquoi les Anglais préfèrent appeler «Vies silencieuses».

François Bouché
François Bouché
François Bouché
François Bouché

Bernard Muntaner a été l’élève de François Bouché, avant de l’exposer, de devenir son ami. «Il a aimé les femmes et a été aimé des femmes. Elles étaient aussi le sujet principal de ses dessins et sculptures». Et de nombreuses de ses sculptures portent le nom de femmes issues de la mythologie. Bernard Muntaner reprend : «Un jour, dans son atelier de Marseille, il prit une photo d’une femme élégante et me dit : c’est ma mère, elle est morte j’avais 13 ans»…

«C’était un excellent dessinateur, il connaissait l’anatomie parfaitement»

François Bouché
François Bouché

L’autre sujet récurent, reprend-il: « C’est la rencontre amoureuse, la relation de deux personnes, l’amitié ». «C’était un excellent dessinateur, poursuit-il, il connaissait parfaitement l’anatomie ce qui lui permettait de déformer les corps tout en leur donnant une présence réaliste vraisemblable». Dans son œuvre transparaît le Sud, le soleil, la vie et la sensualité. «Son travail illustre sa quête d’une réalité supérieure, où ses sculptures sont pétries de chair, de sang et d’esprit. La magie de ses formes rend ses œuvres à la fois massives et légères. Car il y a dans la sculpture de François Bouché un désir de faire s’envoler les formes dans l’espace, dans une extraversion formelle, mais également un état plus introverti, avec des corps qui se tournent vers l’intérieur, qui se recroquevillent pour entrer dans une méditation métaphysique, un recentrement de la pensée». Une œuvre nourrie des rencontres privilégiées de l’artiste avec de nombreux maîtres qui ont éclairé ses années de travail, dont les principaux sont Laurens, Derain, Giacometti, Moore, Richier, Braque et Brancusi. L’artiste façonne ses créations en les dépouillant de tout effet d’ornement et de théâtralité.

«La magie d’une vie silencieuse repose sur la sensibilité de l’artiste»

Tony Catany, Nature morte N°24, Photographie 80 x 80 cm, Collection Fondation Regards de Provence.
Tony Catany, Nature morte N°24, Photographie 80 x 80 cm, Collection Fondation Regards de Provence.
Dominique Angel, Pièce supplémentaire, 2003, Sculpture résine acrylique, feuille d’or et d’argent 75 x 60 x 60 cm, Collection de l’artiste.
Dominique Angel, Pièce supplémentaire, 2003, Sculpture résine acrylique, feuille d’or et d’argent 75 x 60 x 60 cm, Collection de l’artiste.

Un étage plus haut, une autre interpellation nous attend. «Vies silencieuses » nous interroge tous, dans notre relation aux objets. «Les objets qui nous entourent ne sont pas là par hasard, ils ont été placés à un certain endroit, précisément, à dessein, dans le souci d’un parti pris défini. Mais nous les entourons aussi ces objets d’une bienveillance, d’une relation affective, pour ce qu’ils dégagent de dimension symbolique, de notre histoire personnelle, familiale, de nos souvenirs», avance Bernard Muntaner. Et c’est parce que nous avons «une relation profonde», quasi charnelle avec les objets que leur représentation, en peinture notamment, «ne nous laisse pas indifférents». Ainsi, représenter un objet inanimé en termes plastiques, c’est lui restituer une âme, lui donner une nouvelle vie en lui conférant un nouveau sens. «La magie d’une vie silencieuse repose sur la sensibilité de l’artiste, sur sa capacité à manier les couleurs et la lumière qui entourent et éclairent les objets, à faire circuler l’air entre eux. Le pouvoir de sa mise en scène éveille des souvenirs sensoriels et des sensations autres que visuelles, auditives, olfactives, tactiles, gustatives». Mais c’est aussi l’affirmation d’un statut social, «les étoffes précieuses, les coquillages exotiques venus de loin, bijoux, pièces de monnaie, pièces d’orfèvrerie, qui symbolisent la richesse, à côté des armes, des couronnes qui rappellent le pouvoir». Et puis, parfois, dans la même œuvre, une tête de mort, rappelle où se veut une illusion de sagesse puisque ici tout est illusion. «Et pour l’artiste, la peinture d’objets inanimés est un sujet qui lui permet de montrer ses compétences en matière de réalisation illusionniste».

«Le coq mort, de Bernard Buffet, dans son dénuement tragique est d’une puissance rare»

Bernard Buffet, Le coq mort, huile sur toile 96 x 114 cm, Collection Musée des beaux-arts de Marseille (dépôt du FNAC), @Adagp Paris, 2015 (crédit : Claude Almodovar et Michel Vialle).
Bernard Buffet, Le coq mort, huile sur toile 96 x 114 cm, Collection Musée des beaux-arts de Marseille (dépôt du FNAC), @Adagp Paris, 2015 (crédit : Claude Almodovar et Michel Vialle).

Des œuvres qui évoquent aussi la bonne chère, il est loin d’en aller de même avec «Le coq mort » de Bernard Buffet, œuvre de 1947, est-il le coq gaulois ? Est-il symbole des années d’occupation, de tous les drames. Toujours est-il que la bête, squelettique, a un fil à la patte et un pauvre navet pour seul accompagnement. L’ensemble, dans son dénuement tragique est d’une puissance rare. Chabaud nous amène dans une Provence chaude, trop chaude, où point de salut hors de la pénombre, alors qu’avec Lino, Ambroggiani…. elle est caresse voluptueuse, lumineuse, de printemps. On s’arrêtera devant les formes pures, dénudées des «Anones», œuvre de Xavier Valls qui n’est autre que le père de…. Avec Combas, la vie, pour être silencieuse, n’en est pas moins luxuriante, tandis qu’Olivier Bernex et Abdelouahab Zine, interroge tous les deux le temps, les origines, à travers des jarres.
Arman, Sans titre, 1980, technique mixte, carton marouflé sur panneau 80 x 105 cm, Collection Fondation Regards de Provence, @Adagp Paris, 2015.
Arman, Sans titre, 1980, technique mixte, carton marouflé sur panneau 80 x 105 cm, Collection Fondation Regards de Provence, @Adagp Paris, 2015.

Arrive Arman qui nous met au violon avec ses accumulations, répétition, empreinte, pochoir… Avant que la photo n’interroge à son tour le spectateur. Comment ne pas s’arrêter devant « La déesse Mère ». Que voit-on ? Veux-t-on voir ? Nous est montré? Sans oublier la luxuriance du travail d’Aurore Valade. Jusqu’à ce que les vies silencieuses rencontrent la nature morte avec cette « Pièce supplémentaire » de Dominique Angel ou «vanités 2012» de Nicolas Rubinstein. Une exposition qui offre bien des niveaux de lectures et un panorama particulièrement riche de la nature morte, ou, plutôt des vies silencieuses.
Michel CAIRE

S’inspirer et Créer au milieu des œuvres

Jean-Baptiste Olive, Verres, coupes et coupelles de fraises, huile sur toile 50 x 65 cm, Collection particulière (crédit : Jean Bernard).
Jean-Baptiste Olive, Verres, coupes et coupelles de fraises, huile sur toile 50 x 65 cm, Collection particulière (crédit : Jean Bernard).

Dans le cadre des expositions – Vies Silencieuses et François Bouché. Courbes & Espaces – le Musée Regards de Provence propose des ateliers d’art plastique, animés par une plasticienne, diplômée des Beaux-arts, Frederika von Maltzahn. Les participants sont amenés à « vivre » les natures mortes ou les sculptures et à expérimenter des techniques d’expression artistiques variées (fusain, pastel gras, gouache pochoir, techniques mixtes).

Ateliers exposition Vies Silencieuses

-Samedi 17 octobre à 14h30 (gouache pochoir) «La danse du violon» – Adultes
-Mercredi 21 octobre à 14h30 (pastel gras) « Le bouquet de fleurs» – Enfants et Adultes
-Samedi 24 octobre à 14h30 (pastel gras) « L’automne » – Enfants et Adultes
-Samedi 7 novembre à 14h30 (pastel gras) « Fruits et légumes » – Enfants et Adultes
-Samedi 14 novembre à 14h30 (gouache pochoir) « Mon objet préféré » – Adultes
-Mercredi 18 novembre à 14h30 (pastel gras) « A la campagne » – Enfants et Adultes
Consultez l’agenda des autres ateliers sur les pages des expositions sur museeregardsdeprovence.com
Les ateliers, tous différents et complémentaires, durent 1h30 (6 à 15 pers.). Frais de participation : 8 € (7 à 12 ans) / 12 € (à partir de 13 ans) (droits d’entrée aux expositions inclus & fournitures gratuites). Inscription obligatoire sur info@museeregardsdeprovence.com ou au 04 96 17 40 40

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