On a vu aux Chorégies d’Orange : une onirique cantate « Carmina Burana » mise en images par Philippe Druillet

Publié le 18 juillet 2014 à  10h21 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  17h57

Tout l’onirisme de Philippe Druillet sur le mur d’Orange. Auguste n’en a pas cru ses yeux. Un énorme moment. (Photo Chris Picart)
Tout l’onirisme de Philippe Druillet sur le mur d’Orange. Auguste n’en a pas cru ses yeux. Un énorme moment. (Photo Chris Picart)
(Photo Chris Picart)
(Photo Chris Picart)

Œuvre populaire s’il en est, la cantate scénique Carmina Burana, les chants de Beuren, de Carl Orff, a un côté monumental, à la scène, avec l’utilisation d’une masse chorale volumineuse et d’un orchestre au complet dans sa configuration la plus importante. Son chœur initial et final, « fortuna imperatrix mundi » étant devenu un «tube » mondial… Jeudi soir, les pèlerins étaient donc nombreux, au pied du mur du théâtre antique d’Orange, pour entendre cette cantate scénique devant être «chantée avec instruments et images magiques», selon son titre complet. Et cela tombait bien, parce que les «images magiques» il y en avait. Et pas n’importe lesquelles puisque signées, pour l’occasion, par Philippe Druillet.
Ceux qui ont eu vingt ans avant 1980 conservent de Druillet les images de son univers sombre et si particulier qu’il mettait en scène dans chacune de ses bandes dessinées. Lone Sloane, Delirius, Yragaël et Urm le fou, Vuzz : outre un côté novateur, chacune de ces BD ouvrait la porte à l’imaginaire avec des femmes aux seins lourds, des petits hommes en érection, des chevaliers hideux et des planètes lointaines. Pour illustrer cette production de «Carmina Burana», Druillet a ressorti sa table à dessins, ses souvenirs et ses fantasmes avec le monumental mur d’Orange comme support. 40 ans après, pour les nostalgiques, un nouveau plongeon dans des abîmes de couleurs, un périple dans ces mondes étranges et fascinant devenaient possibles. Et Philippe Druillet avait le trac. « Seuls les cons qui ont une totale confiance en eux n’ont pas le trac… », 40 ans, après, Druillet a toujours le franc parler. Et à l’issue de la représentation, il était comme un gamin qui vient de découvrir un nouveau jouet. Remerciant avec insistance toute l’équipe technique qui avait permis ces projections. Totalement raccord avec les indications mentionnées sur la partition, les illustrations toute plus oniriques les unes que les autres, ont fasciné, parfois choqué, souvent séduit… Femmes bleues au pubis rouge, princesses bardées d’ornements métalliques, visages hideux et monstres du fond des temps : rien ne manquait. Pas même la roue de la fortune dont il est question dans la cantate. Un grand moment d’onirisme.
Et ce qui est fantastique, c’est que, ce soir là, musicalement, on était à l’unisson de cette ambiance si particulière. Le chœur de l’Orfeon Pamplonés, spécialiste, s’il en est, de cette œuvre et les enfants des maîtrises des Bouches-du-Rhône et de l’Opéra du Grand Avignon, étaient remarquablement préparés et ont donné toute sa dimension à la cantate.
Les trois solistes, la soprano Julie Bauer, le contre-ténor Max-Emmanuel Cencic et le baryton Armando Noguera, furent à la hauteur de cette interprétation dynamisée, presque dynamitée dans le bon sens du terme, par la direction de Fayçal Karoui. Remplaçant au pied levé Michel Plasson, «opéré dans la journée de jeudi », nous confiait Raymond Duffaut le directeur des Chrorégies, le jeune directeur musical ne s’est pas privé de faire rugir les chevaux de son bolide de luxe qu’était l’Orchestre national de Bordeaux-Aquitaine. Pour le plus rand plaisir des spectateurs qui ont réservé un triomphe aux protagonistes de cette production avec un final repris trois fois… Monumental.
Michel EGEA

A la télévision. Cette soirée sera l’un des temps forts du programme de France3 diffusé le 23 juillet prochain.

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