Publié le 25 juillet 2014 à 18h05 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h05
Spectateurs de «Fratricide» donné dans le cadre du Off en ce moment à La Luna attachez votre ceinture. Vous allez entrer dans une zone de haute turbulence. Pièce exceptionnelle tant au niveau de l’écriture que par l’interprétation vertigineuse des deux monstres sacrés que sont Pierre Santini et Jean-Pierre Kalfon, cette comédie aux allures de drame antique secoue, surprend, bouleverse, laisse des traces profondes.
Construite sur l’opposition classique de deux êtres que les liens familiaux ont enchaîné et que les circonstances et les choix personnels ont divisé, l’intrigue nous plonge au cœur d’une salle d’attente de notaire. Réunis après la mort de leur père, Jean, avocat (Pierre Santini) et Fabien (Jean-Pierre Kalfon), qui sort de prison où il purgeait une peine pour meurtre, se retrouvent pour la lecture d’un testament comportant, comme ils le découvriront stupéfaits, des clauses très contraignantes. Le passé revenant à la surface les deux frères qui ne se sont pas revus depuis 18 ans et qui sont fâchés depuis, règleront leurs comptes à fleurets mouchetés et, surtout se verront contraints d’aborder un lourd secret familial. Avec au bout une nouvelle condamnation personnelle ou l’espoir d’un pardon possible.
Ayant reçu cette pièce signée Dominique Warluzel des mains de Pascal Legros qui souhaitait les voir travailler ensemble sur scène Pierre Santini et Jean-Pierre Kalfon formés ensemble au cours Charles Dullin chez Jean Vilar au TNP ne semblent pas jouer tant ils sont criants d’authenticité, de vérité, de force physique et mentale. Classique la mise en scène conçue par Delphine de Malherbe a le mérite d’éviter de juger moralement un personnage par rapport à l’autre, et ce, par l’intermédiaire de l’ajout d’un détail important, puisqu’elle décide de charger Jean, l’avocat intègre, d’une faute passée (non mentionnée par l’auteur) qui le rend plus humain et surtout le rend plus du tout irréprochable.
Pièce sur la figure d’un père autoritaire, ayant divisé ses enfants, la fraternité, la paternité non voulue, l’adoption, le don de soi, et la rédemption «Fratricide» est un chef d’œuvre rappelant combien l’homme demeure en permanence tiraillé entre sa Nature et sa Liberté. Un moment de théâtre d’une profondeur psychologique intense porté par deux comédiens au sommet de leur art.
Jean-Rémi BARLAND
«Fratricide» de Dominique Warluzel. Au théâtre La Luna à 16h 05. Réservations au 04 90 86 96 28.
