Rencontre avec la pianiste Fanny Azzuro, autour de son CD « Russian Impulse »

Publié le 5 février 2015 à  18h20 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h37

«Russian impulse» est un disque qui regroupe trois œuvres de trois compositeurs, à savoir Sergueï Rachmaninov, Sergueï Prokofiev, et Nikolaï Kapustin, réunis ici sous le piano de Fanny Azzuro. Avec «Variations sur un thème de Corelli» de Rachmaninov datant de 1931, la pianiste opte pour une interprétation impressionniste montrant ainsi que ces morceaux assez courts du compositeur s’apparentent à des tableaux. Pour la Sonate n° 6 de Prokofiev écrite en 1939, on peut parler de cinéma grand écran, l’interprétation faisant éclater toute la fureur de l’œuvre. Et puis, il y a les «Variations op. 41» que le compositeur Nikolaï Kapustin a composé en 1984 et qui montre l’étendue de la virtuosité de la pianiste. Entretien avec Fanny Azzuro.

Fanny Azzuro, un tiers Avignonnaise, un tiers Arlésienne, un tiers Parisienne. Trois tiers pianiste virtuose. (Photo Jean-Baptiste Millot)
Fanny Azzuro, un tiers Avignonnaise, un tiers Arlésienne, un tiers Parisienne. Trois tiers pianiste virtuose. (Photo Jean-Baptiste Millot)

Destimed : Comment est né l’idée d’un disque consacré entièrement à la musique russe ? Fanny Azzuro : Ce programme fait suite à la rencontre avec plusieurs pianistes russes. La première a eu lieu à Aix-en-Provence, avec Vladimir Viardo qui enseigne au Texas et qui venait donner une master-class. J’ai aimé sa passion d’enseigner et il m’a orientée vers Boris Petrushansky, un autre professeur, élève lui-même d’un des fondateurs du piano russe du XXe siècle. Cela m’a donné l’envie d’enregistrer de la musique russe, sans faire une intégrale d’un compositeur précis, mais de mélanger des styles et j’ai choisi trois grands compositeurs dont Rachmaninov et Prokofiev, ayant souffert de la pression stalinienne, en ajoutant un morceau de Kapustin, qui toujours vivant m’ouvrait des perspectives nouvelles.

Justement Kapustin, le plus moderne des trois, semble avoir décidé, par sa musique, du titre de l’album…
Tout à fait. Je suis passionnée de jazz et la musique de Kapustin, c’est du jazz qui chante, qui donne envie soi-même de chanter. Qui donne de l’impulsion vers le chant. C’est un piano rythmé, qui groove. Tout est écrit dans sa partition, qui est de lecture classique. Ses Variations sont une pièce avec des passages contrastés, une bulle d’air dans un programme assez lourd finalement. Cela impulse de la joie. D’où le titre « Russian impulse ».

Que représente pour vous Rachmaninov dont les « Variations sur un thème de Corelli » ouvrent le programme ?
Il était comme Prokofiev un grand compositeur et un grand pianiste. Il a créé une œuvre dense, a eu une grande carrière et j’aime le jouer. Quant à ces « Variations » elles sont très pianistiques, très agréables à jouer, les accords tombant sous les doigts. Le fait d’avoir comme moi de grandes mains a été un atout dans l’interprétation, car il y a des écarts importants notés sur la partition. Rachmaninov obligeant de s’emparer de tout le piano. Ensuite j’aime leur aspect varié. Ces pièces commencent doucement et se terminent dans une explosion de joie

Et Prokofiev ?
C’est un piano percussif, rythmique, notamment avec cette sonate numéro 6 dite « de guerre », violente dont l’aspect strident peut gêner. C’est très sauvage et cela tranche avec l’époque classique romantique, insistant sur les dissonances. C’était pour moi un défi que de jouer cette œuvre très physique.

Il y a dans votre disque un soin particulier apporté au son. Comment s’est déroulé l’enregistrement ?
On a enregistré dans la ferme de Villefavard lieu magique et le travail de l’ingénieur du son Étienne Collard a permis de souligner toutes les nuances de chaque œuvre. Oui vraiment on a fait avec lui un beau travail de captation.

Propos recueillis par Jean-Rémi BARLAND

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