Saint-Jacques de Compostelle : 80 morts dans l’accident du train, le conducteur au banc des accusés

L’accident du train qui a déraillé mercredi soir à proximité de Saint-Jacques de Compostelle a fait 80 morts et 130 blessés, dont 35 sont dans un état critique. Selon les premiers éléments de l’enquête, le conducteur allait trop vite et aurait freiné trop tard. Le syndicat des conducteurs pointe pour sa part la signalisation, qui n’avait pas été adaptée à la grande vitesse.

Le bilan de l’accident du train à grande vitesse Alvia, le TGV, qui a déraillé près de Saint-Jacques de Compostelle, s’est encore alourdi ce jeudi 25 juillet pour grimper à 80 morts. A 17h30, 60 autopsies avaient été réalisées et 67 cadavres avaient été pleinement identifiés, par leurs empreintes digitales ou grâce à l’autopsie, a indiqué le vice-président de la Xunta, le gouvernement régional de la communauté autonome de Galice, Alfonso Rueda. Mais on ne connaît pas encore la liste complète des défunts. Les autorités ont demandé aux passagers qui ont pu sortir du train sur leurs propres pieds de se manifester afin de comparer les données des voyageurs avec celles des victimes. Rappelons que 222 personnes voyageaient à bord de l’Alvia accidenté : 218 passagers et 4 membres d’équipage, dont deux ont péri.
Sur 130 blessés, 94 sont toujours hospitalisés. Parmi eux, 35 sont dans un état critique : 31 adultes et 4 enfants, selon les explications de la conseillère de la Santé de la Xunta, Rocío Mosquera. Elle assure que toutes les familles ont déjà été alertées et que dans la plupart des cas, elles se trouvent auprès des blessés. Le ministre des Affaires étrangères britannique, Willam Hague, a pour sa part rapporté qu’un citoyen du Royaume-Uni a été blessé dans l’accident. D’autre part, en dépit du grand nombre de blessés, les autorités sanitaires ont averti que, pour le moment, les dons de sang ne sont plus nécessaires.
Jusqu’à la mi-journée, il y avait encore des inconnus parmi les blessés. Une fois connu le nom des blessés, « le défi consiste à identifier les personnes qui sont mortes », a expliqué le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy. « De nombreuses fois, ce n’est pas facile mais les familles ne peuvent pas vivre dans l’incertitude », a-t-il souligné lors de sa première apparition publique à Saint-Jacques de Compostelle à environ 0h30 dans la nuit de mercredi à jeudi.

« Je devais aller à 80 et je vais à 190 »

Des 80 personnes décédées, 7 sont mortes dans des hôpitaux galiciens. Pour faciliter les démarches, un bureau judiciaire a été installé à la morgue où travaillent des fonctionnaires, des juges et un procureur, ce qui permet aux familles des victimes d’effectuer les démarches pour récupérer les corps.
Le juge d’instruction numéro 3 de Saint-Jacques, qui enquête sur l’accident, a appelé à témoigner comme prévenu le conducteur, Francisco José Garzón Amo. Il souffre de blessures légères et a été admis dans un hôpital de Saint-Jacques, gardé par la police nationale. Le conducteur, qui se vantait il y a quelques mois sur Facebook de conduire à 200 km/h, n’était pas sous l’emprise de l’alcool. Tous les indices semblent indiquer qu’un excès de vitesse est à l’origine du drame : il conduisait à 190 km/h dans une courbe limitée à 80, comme il l’aurait reconnu. Un signal l’aurait averti qu’il devait réduire sa vitesse à 80km/h. Il abandonnait alors les voies refaites fin 2011 pour recevoir un jour les trains à grande vitesse, pour se retrouver sur un tronçon de l’ancienne voie.
Le conducteur, après que le train ait déraillé, aurait alors appelé, selon « El Pais », depuis son mobile le service de 24h d’urgence et aurait lâché : « Je devais aller à 80 et je vais à 190 ». Selon le quotidien madrilène, la phrase figure littéralement au présent dans l’enregistrement apporté au juge dans la nuit de mercredi, alors que l’accident avait déjà eu lieu. Le conducteur y parlait également des « pauvres voyageurs » et exprimait son désir qu’il n’y ait pas de morts. La compagnie Talgo, qui possède des contrôles internes de vitesse de ses convois a confirmé jeudi informellement aux autorités que le train allait à « une vitesse extrême ».
Tout semble aussi indiquer que le conducteur a freiné trop tard. Il a lui-même assuré, dans sa première reconstitution des faits, qu’il avait activé l’alerte dans son cadre de commandes et qu’il a poussé à ce moment-là le bouton qui communiquait qu’il avait reçu l’avertissement qu’il allait plus vite que la vitesse permise. Pourquoi alors n’a-t-il pas freiné ? Pourquoi un agent ferroviaire avec des années d’expérience a-t-il attaqué ce virage du tracé à une vitesse démesurée ?
Le secrétaire général du syndicat des conducteurs, Juan Jesus García Fraile, a quant à lui blâmé le système de signalisation. La voie était dotée d’un système de contrôle ASFA, plus ancien que le ERTMS, qui dispose un mécanisme freinant automatiquement les trains quand ils dépassent la vitesse permise. La voie a été rénovée pour l’adapter à la haute vitesse mais pas la signalisation. Le train est une série 730, pratiquement neuf. Il possédait deux locomotives et huit wagons.

Andoni CARVALHO

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