Tribune libre de Marc La Mola : Éternel recommencement.

Publié le 10 mai 2017 à  20h17 - Dernière mise à  jour le 29 novembre 2022 à  12h30

J’ai des souvenirs intacts de l’élection de Mai 1981. François Mitterrand était élu et le peuple de gauche pleurait à chaudes larmes, l’espoir semblait revenir … Je me souviens des jours meilleurs attendus et des promesses non tenues, je me souviens d’une France égarée dans les années 80 où les cohabitations se succédaient inexorablement pour empêcher les gouvernements de gouverner, le législateur de légiférer et le peuple d’espérer.

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La politique de l’essuie-glace était de mise et c’est tantôt à gauche puis tantôt à droite que nous votions pour ne donner aucune majorité, pour n’accorder notre confiance à personne tout en vénérant un Président devenu spectateur d’une situation qu’il avait lui même machiavéliquement initiée.
Mais cette politique a ses limites et durant ces années d’errance le monde lui ne nous a pas attendus, il a avancé à grands pas, il a couru même et aujourd’hui nous avons encore du mal à rattraper le retard accumulé.

Alors cette période d’élection présidentielle vient de prendre fin et ce n’est pas trop tôt. Un illustre inconnu est élu et nous devons lui faire confiance pour deux raisons.
La première c’est que nous n’avons pas le choix et la seconde c’est que nous avons tous une part de responsabilité dans ce qu’est devenu le paysage politique Français. J’ai moi même pris part au politique bashing et n’ai pas été en reste en ce qui concerne les textes écrits contre l’un ou l’autre candidat. Je suis même passé du statut d’abstentionniste convaincu à celui d’électeur assidu et me suis surpris, notamment à l’aube du second tour, à motiver ceux qui refusaient de faire leur devoir de citoyen devenant de ce fait un véritable parangon d’une démocratie que j’ai moi même souillée allégrement par des textes, que même si j’en assume la paternité, restent véhéments et parfois peu objectifs.

Après toutes ces semaines de lutte de classe j’ai besoin de prendre du recul, besoin de réfléchir en n’ouvrant plus ma page Facebook afin de ne plus lire ou plutôt de ne plus subir les textes de toutes ces personnes, déçues par le résultat de l’élection, mais avant tout aigries donc agressives et à chaque fois totalement pas impartiales. Même s’il ne m’appartient pas de juger l’objectivité et la neutralité des «amis» Facebookiens qui transitent sur mon fil d’actualité, je suis en droit de m’insurger devant leurs propos qui font écho à ceux entendus au mois de Mai 81.

A cette date le programme commun était la référence. Il était le résultat d’une entente entre les socialistes et les communistes et était vu notamment par les «riches» comme une véritable catastrophe économique allant faire sombrer le pays dans ses plus sombres heures en laissant entrevoir des lendemains soviétiques, Bolcheviques même.
Certains avaient même annoncé l’arrivée des chars Russes dans Paris. Ils auraient déboulé par l’avenue de la Grande armée pour descendre fièrement les Champs-Élysées et aller s’immobiliser devant le Palais éponyme !

Je me souviens que ceux qui avaient un peu d’épargne songeaient à quitter le pays avec leur pactole, ceux qui en avaient un peu plus avaient tenté de le faire alors que ceux qui en détenaient beaucoup n’avaient pas attendu le soir de l’élection pour se faire la belle afin de protéger leur argent de ces communistes qui allaient tout rafler.
J’ai tout entendu, j’ai tout lu enfin je pensais avoir tout vu et tout lu mais ce que je peux encore lire aujourd’hui, concernant notre nouveau Président, dépasse largement toutes les inepties des années 80 et je crains une nouvelle fois que nous repartions dans une période de cohabitation politique durant laquelle rien ne se fera. Et je vois déjà les hordes de Français se ruer dans les rues pour protester contre un immobilisme d’un succédané de gouvernement mal servi par une Assemblée Nationale disparate composée de députés FN, d’Insoumis et de Républicains. Y verrons-nous des représentants de cette espèce maintenant disparue : les socialistes ? L’avenir nous le dira …

Donc ce que je peux lire sur les réseaux sociaux n’a rien à envier aux palabres stériles des opposants du PS des années 80 si ce n’est que leurs auteurs peuvent à ce jour bénéficier d’une information bien plus large permettant de minimiser les dérapages mais encore faut-il qu’ils fassent l’effort de s’y intéresser autrement qu’en s’abrutissant sur Facebook, Twitter et autres déversoirs à saloperies. Car, en effet, on peut y lire des aberrations trouvant leurs fondements je ne sais où tant elles sont capables de traîner leurs opposants dans la fange voire même dans la merde!

Cette campagne a opposé les Français. Elle les a même séparés et rendus violents tant ils ont été capables d’invectiver celui qui a eu l’audace, le courage de défendre la démocratie face à l’obscurantisme. Ainsi j’ai été moi-même traité de « sans-couilles », de mouton, de pigeon ou de tous autres sobriquets capables de salir l’homme sincère que je suis et anéantissant, en quelques posts, l’ensemble des combats que j’ai menés depuis que je suis auteur et ai la chance d’intervenir sur des plateaux télé. C’est ainsi…

Mais des années 80 et des deux septennats de Tonton que reste-t-il ?
Pas grand-chose diront les amnésiques et ceux qui font de la politique uniquement sur Facebook même si au quotidien ils peuvent évoluer dans une société connaissant les radios libres et la télé privée sur laquelle il se gavent d’ailleurs de télé-réalité, la culture ainsi développée, l’abolition de la peine de mort mais aussi dans le domaine social la 5° semaine de congés payés, le RMI (aujourd’hui RSA) et aussi l’ISF et encore les lois Auroux (Dialogue social dans les entreprises et les CHSTC), etc. etc.

Les chars Russes n’ont jamais défilé sur les Champs-Élysées mais la vie politique reste un éternel recommencement.

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