Camp des Milles: Hommage rendu à Elie Wiesel lors du vernissage de l’exposition « de Superman au chat du Rabbin « 

Publié le 6 juillet 2016 à  23h46 - Dernière mise à  jour le 28 octobre 2022 à  15h28

Durant la Seconde Guerre mondiale, au cœur même du Camp des Milles et de l’engrenage de la barbarie dont il fut l’un des rouages, l’art et la culture trouvèrent leur place grâce aux nombreux intellectuels et artistes qui y étaient internés. Malgré leurs conditions de vie, ces internés surent résister à l’horreur en continuant d’exercer leur art, y compris sur les murs du camp. Parmi eux, Franz Meyer réalisa des dessins du camp qui constituent une véritable bande dessinée, et qui servent aujourd’hui de support pédagogique pour les 9-12 ans.

exposition-evenement--de-superman-au-chat-du-68.jpgC’est pourquoi le Site-mémorial présente au public les super-héros de bandes dessinées américaines, et surtout leurs créateurs qui se sont dressés pendant la 2e guerre mondiale contre l’antisémitisme, le fascisme et la barbarie qui frappaient le Vieux Continent et menaçaient leur propre pays. Cet engagement, cette résistance par l’art se poursuivirent après la fin des hostilités, portés par des survivants de la Shoah ou par leurs héritiers, conscients de la nécessité durable d’un travail de mémoire et de vigilance dont l’œuvre la plus marquante est l’album «Maus» d’Art Spiegelman.
Une grande exposition temporaire fut ainsi inaugurée ce mardi 5 juillet, devant environ 150 personnes, au Site-mémorial du Camp des Milles « De Superman au chat du Rabbin», adaptée de l’exposition réalisée par le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme de Paris. Pour Alain Chouraqui, Président de la Fondation du camp des Milles, « Au moment où menacent à nouveau les crispations identitaires et nationalistes, il est essentiel que le grand public réalise que la résistance aux extrémismes, aux racismes et à la xénophobie n’est pas seulement l’affaire de super-héros ou d’artistes engagés, aujourd’hui encore, c’est l’affaire de tous, chacun à sa manière, avec son crayon, son pinceau, mais aussi dans son langage le plus quotidien : c’était d’ailleurs l’un des messages forts portés par Elie Wiesel ».
L’ouverture de ce vernissage fut en effet marquée par un premier et vibrant hommage rendu à Elie Wiesel au Camp des Milles. Avant de faire respecter un temps de recueillement, Alain Chouraqui souligna à quel point Elie Wiesel symbolisait la mémoire de la Shoah et l’universalité de ses leçons pour agir contre toutes les barbaries ; combien aussi Elie Wiesel, malgré ce qu’il a vécu, continuait de croire à la force de la transmission et à l’éducation des jeunes, source de son engagement immédiat en faveur du projet de mémoire et d’éducation du camp des Milles. Évoquant enfin quelques souvenirs personnels, et en particulier la force du verbe d’Elie Wiesel, Alain Chouraqui rappela son œuvre littéraire et reprit avec émotion quelques phrases de «La Nuit», incontournable récit de l’horreur qu’il vécut à son adolescence :
« Jamais je n’oublierai cette nuit, la première nuit de camp qui a fait de ma vie une nuit longue et sept fois verrouillée.
Jamais je n’oublierai cette fumée.
Jamais je n’oublierai les petits visages des enfants dont j’avais vu les corps se transformer en volutes sous un azur muet.
Jamais je n’oublierai ces flammes qui consumèrent pour toujours ma foi.
Jamais je n’oublierai ce silence nocturne qui m’a privé pour l’éternité du désir de vivre.
Jamais je n’oublierai ces instants qui assassinèrent mon Dieu et mon âme, et mes rêves qui prirent le visage du désert.
Jamais je n’oublierai cela, même si j’étais condamné à vivre aussi longtemps que Dieu lui-même. Jamais.
[…] L’oubli signifierait danger et insulte. Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois. Et si, les tueurs et leurs complices exceptés, nul n’est responsable de leur première mort, nous le sommes de la seconde ».

D.T.

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