Corentin Delias : « Jouer, c’est se persuader d’un mensonge et d’y croire ». Rencontre avec un jeune comédien originaire d’Avignon bientôt à l’affiche du long-métrage « Château de sable »

Publié le 23 juillet 2020 à  19h13 - Dernière mise à  jour le 31 octobre 2022 à  11h52

Né en Avignon le comédien Corentin Delias passionné aussi de musique rêve de tourner dans un film d’horreur (Photo Pierrick Pham Van Suu)
Né en Avignon le comédien Corentin Delias passionné aussi de musique rêve de tourner dans un film d’horreur (Photo Pierrick Pham Van Suu)

Un jeune homme court vers la femme qu’il aime. Il la rejoint, lui attrape le bras et lui exprime son désarroi devant ce qui lui apparaît comme la manifestation de la fin de leur histoire. Gênée celle-ci lui explique qu’il y a peut-être quelqu’un d’autre dans sa vie, mais surtout qu’elle est enceinte de quatre mois. Leur dialogue devient alors tendu. En quelques images ouvrant sa bande démo Corentin, Delias impose sa griffe de comédien. Présence, expressions tout en finesse, et surtout un don pour faire respirer les silences, manière dont il donne la réplique à sa partenaire en l’écoutant jouer, il se passe quelque chose dès qu’il apparaît. Né le 1er décembre 1997 en Avignon, ce lycéen fou de musique qui souhaitait devenir ingénieur du son, envisagea un instant d’entrer dans une école de gendarmerie. «Le métier d’acteur m’est tombé dessus en quelque sorte, de façon inattendue, et je crois que cela m’a sauvé la vie », confie-t-il en guise de présentation. «Lors d’une soirée j’ai rencontré Alexandre Masson qui a organisé une sorte de casting improvisé pour son court-métrage intitulé « Lucide ». Il m’a donné une réponse positive quelques temps après, et j’ai tourné sous sa direction en compagnie d’Élodie Tabbo. Cela m’a plu. J’ai alors délaissé l’école de gendarmerie et me suis lancé totalement dans l’aventure théâtrale et cinématographique».

«Lucide», court-métrage d’Alexandre Masson.

«Fort et sobre « Lucide » met en scène Alex passionné par les rêves, plus particulièrement les rêves « Lucides ». Il tente d’en faire en dessinant des lieux avant de s’endormir, et ça marche ! Euphorique à l’idée de pouvoir contrôler ses rêves, il en parle à son meilleur ami, qui partage un point de vue complètement différent. Mais peu importe, Alex devient de plus en plus accros à ses rêves, jusqu’à trouver la « réalité » ennuyante. Encore devant ses dessins, Alex est à court d’idées, Il ne sait plus quoi dessiner. Mais soudainement lui vint l’idée de dessiner Lisa, une fille de son université. Sans surprise, il la retrouve dans son rêve, mais il y a quelque chose de bizarre; alors qu’Alex a l’habitude de tout contrôler dans ses rêves, là, il est totalement impuissant face à cette fille. Elle semble si… Réelle. Perturbé, Alex ne cesse de repenser à ce rêve; et il renouvelle l’expérience. Une véritable histoire se crée entre lui et cette fille dont il rêve, alors qu’ils se croisent tous les jours à l’université sans même se parler. Est-elle réelle ?» Ce résumé proposé par l’équipe de production donne bien la teneur du film et la poésie qui s’en dégage. Corentin qui y est plus que convaincant a vécu ce tournage comme un tremplin. «Je me suis inscrit alors au Cours Florent de Montpellier, et je crois que ce fut la meilleure décision de toute ma vie» insiste-t-il avant d’expliquer: «Non seulement parce que j’y ai commencé à apprendre mon métier mais en raison du fait que j’ai rencontré deux personnes qui ont changé ma vie, à savoir Mathis Gil et Maxime Bensoussan. Très rapidement on a sympathisé, on est devenus amis, et on a fondé ensemble « Les détenteurs » notre groupe de théâtre et de cinéma.» Puis ce sera Paris, et des portes qui s’ouvrent qu’on ouvre parfois, avec toujours l’idée d’échanger, avant de signer des projets.

«Jouer c’est se persuader d’un mensonge…»

«Jouer, c’est se persuader d’un mensonge et d’y croire », dit-il. Version théâtrale du mentir-vrai romanesque cher à Louis Aragon. «C’est un partage aussi et pour le mener à bien je travaille beaucoup». Et de confier : «Je me suis aperçu que tous mes soucis dans la vie, toutes les épreuves que j’ai surmontées, souvent avec l’aide des autres m’ont enrichi en tant qu’acteur. Cela m’a même permis de mieux me connaître, et sans doute peut-on mieux jouer quand on a eu des peines», ajoute ce passionné de théâtre qui fut marqué par son rôle de «Coelio» dans «Les caprices de Marianne », personnage en qui il s’est reconnu. Pratiquant le piano depuis l’âge de 5 ans définissant Chopin comme «le bos », vouant à Liszt, Schubert et Beethoven une grande admiration, Corentin Delias ne joue pas du piano pour se montrer, mais l’utilise comme une soupape de décompression. Et cela lui permet de mieux penser à ce qu’il voudrait faire en tant qu’acteur au cinéma comme au théâtre.

Passionné de films d’horreur.

Quand on demande à Corentin Delias de citer son film préféré il répond sans hésiter «Le pianiste», une œuvre qui l’émeut au plus haut point. Mais c’est vers un autre cinéma qu’il aimerait se tourner. En l’occurrence il souhaiterait ardemment jouer dans un film d’horreur. «C’est un de mes rêves», dévoile-t-il et de citer «Mariann » la série française de Samuel Bodin diffusée sur Netflix, qui raconte l’histoire de la jeune écrivaine Emma, qui réalise que les personnages qu’elle a inventés dans ses romans d’horreur existent dans le monde réel. Ou encore d’évoquer « Ils » un thriller de Xavier Palud et David Moreau, qui l’a beaucoup marqué. «Je remercie Netflix, poursuit-il, de mettre de l’argent dans des films de genre qu’on n’a pas l’habitude de voir.» En parallèle Corentin Delias vante «Je suis une légende» avec Will Smith, ou les films de Tarantino, avant tout pour leurs scènes de dialogues. « Dans leurs longs métrages, il y a l’idée que n’importe quoi peut devenir n’importe qui et c’est du pain bénit que de jouer cela.» Et de préciser qu’un bon réalisateur «c’est quelqu’un dont tu te dis quand il tourne qu’il a des étoiles dans les yeux. On sent qu’il est heureux et sa joie se communique aux spectateurs. »

«Château de sable» avec Mathis Gil et rêve d’un César

En août Corentin Delias participera au long métrage «Château de sable » des réalisateurs, Pierrick et Elliott Pham Van Suu frères dans la vie et à l’écran, qui l’engagèrent ainsi que Mathis Gil sur leur film qu’ils tourneront avec Pierre Delion, un autre metteur en scène, en Normandie du 3 au 20 août et en septembre-octobre. Ayant joué aussi dans plusieurs courts-métrages Corentin Delias envisage avec de la chance, de la volonté, de la persévérance, et du travail une longue carrière. Qui pourrait être ponctuée, dit-il, non sans humour mais avec le plus grand sérieux de l’obtention d’un César. « C’est un autre de mes rêves. Parce que cela voudra dire que je suis reconnu par mes pairs. Et surtout que je pourrai au moment du discours de réception dénoncer ceux que j’ai croisés et qui se sont mal conduits (rires). Mais vous savez j’aime les gens (re-rires) ». Ce que confirment celles et ceux qui ont fait travailler ou qui connaissent ce comédien généreux.
Jean-Rémi BARLAND

Questionnaire de Proust et Pivot
-Si vous étiez un animal : Un aigle
-Une couleur : le bleu
-Un arbre : aucun car je n’aime pas l’immobilité
-Un pays : la France
-Un compositeur : Chopin
-Un morceau de piano : La sérénade de Schubert
-Un sentiment : la peur
-Votre écrivain préféré ?J.K. Rowlings
-Votre ville préférée ? Avignon bien sûr
-Le don de la nature que vous aimeriez avoir ? Sauver la planète terre parce que on va tous crever
-La qualité que vous préférez chez un homme ? La bienveillance
-La qualité que vous préférez chez une femme ? La persévérance
-Qu’appréciez- vous le plus chez vos amis ? Qu’ils m’aident pour tout et tout le temps
-Votre occupation préférée ? Écouter de la musique
-Votre devise favorite ? A tout moment
-Votre juron ou gros mot préféré ? Sa grand-mère…
-Votre drogue favorite ? La musique
-Le métier que vous n’auriez jamais aimé faire ? Aucun, tous les métiers ont leur importance
-Le bruit que vous détestez le plus ? La mastication
-Un homme ou une femme pour illustrer un nouveau billet de banque ? Un des inventeurs de l’euro… pour qu’il assume…
-Votre regret dans la vie politique actuelle ? Que les politiques ne s’écoutent pas
-Quel est votre état d’esprit ? Tout faire pour jouer dans des films
-Quel est votre rêve de bonheur ? Avoir un César pour non pas remercier mais dénoncer lors de mon discours de réception tous ceux que j’ai croisés et qui se sont mal conduits
-Quel serait votre plus grand malheur ? Ne pas avoir le César
-Si Dieu existe qu’aimeriez-vous qu’il vous dise quand vous arriverez au Paradis ? Il est trop joli ton César….(rires)

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