Orléans. On a vu la Création de « La vie est un songe » de Calderon dans la mise en scène onirique et très shakespearienne de Christophe Lidon

Publié le 20 avril 2019 à  13h41 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  11h43

« La vie est un songe » de Calderon avec Gérard Desarthe, Gaël Giraudeau, Jérôme Anger et Dominique Pinon (Photo Cyrille Valroff/ le CADO)
« La vie est un songe » de Calderon avec Gérard Desarthe, Gaël Giraudeau, Jérôme Anger et Dominique Pinon (Photo Cyrille Valroff/ le CADO)

C’est dans l’écrin du Centre National de Création Orléans Loiret (Cado), que la nouvelle adaptation théâtrale signée Michael Stampe, qui signe aussi la traduction, de la pièce de Pedro Calderon de la Barca «La vie est un songe» a été donnée. Adepte d’un classicisme inventif, Christophe Lidon qui dirige ce lieu, et dont le travail sur les pièces d’Antoine Rault notamment force l’admiration, a véritablement dépoussiéré les situations, rendu plus lisible encore les rapports entre les personnages et a proposé une mise en scène exigeante, et très belle sur le plan visuel. De cette épopée symbolique où plane l’ombre du conte «Le dormeur éveillé» que l’on trouve dans les «Mille et une nuits», Christophe Lidon en fait une œuvre forte taillée dans une langue lyrique. L’intrigue qui, comme souvent dans les chefs d’œuvre, tient dans la main, se centre autour de Sigismond, qui par certains aspects rappelle le prince du Danemark, Hamlet, lorsqu’il s’interroge sur la réalité, avec cette réplique célèbre : «Être ou ne pas être. Dormir, rêver peut-être». C’est un homme libre dont le destin peut se résumer tel que le présente l’Avant-scène Théâtre où est publiée la pièce dans cette version : «Des signes funestes, le verdict des astres, tout enjoint le roi Basile d’éloigner l’enfant qui vient de lui naître tandis que meurt sa femme. On a prédit que Sigismond n’apporterait que le malheur. Il est donc enfermé dans une tour, loin du monde, avec pour seul lien d’humanité, le fidèle Clotalde. Le temps passe. Un jour, alors qu’il pense remettre le pouvoir à son neveu et à sa nièce, le roi Basile se repent et fait revenir son fils qui découvre brutalement le palais et la vie des autres… De grands bouleversements vont s’ensuivre, mais Sigismond trouvera la sagesse.». On ne saurait mieux dire et force est de constater que l’on entend mieux le texte dans cette version de Michael Stampe. «J’ai totalement confiance en lui, confie Christophe Lidon, il a adapté pour moi Carlo Goldoni, et Stefan Zweig. Nous sommes très complices» ajoute-t-il non sans avoir rappelé qu’il a mis en scène son texte «L’art de Suzanne Brut». «Michael n’a pas renoncé au caractère très littéraire, très écrit de ce répertoire du Siècle d’or. Il a allégé l’œuvre sans perdre la cohérence. Il y a un verbe, des phrases qui ont du souffle». Dans des costumes superbement conçus par Chouchane Abello-Tcherpachian, des lumières signées Marie-Hélène Pinon, le tout sur une musique de Cyril Giroux, tandis que Léonard assure l’ajout d’images vidéo, tous les comédiens joue en troupe. Citons-les tous : Frédéric Andrau (Astolphe) Jérôme Anger (Clotalde), Gérard Desarthe (le roi Basile), Lina Et Arabi (Rosaura rebaptisée ici Rose), Valentine Galey (Etoile), Gaël Giraudeau (Sigismond), et Dominique Pinon (Clairon) illuminent le texte au-delà des mots, dans les silences et les gestes dispensés avec une économie de moyens constante. Signalons au passage que Gaël Giraudeau a joué Hamlet, (dans une adaptation en théâtre immersif intitulée «Helsingör» de Léonard Matton), tout comme Gérard Desarthe en 1988 sous la direction de Patrice Chéreau et que leur interprétation s’en ressent. Et puis il y a cette longue toile aux reflets argentés tendue sur la scène et que l’on soulève au fil du récit. Elle a pour mérite de servir de marqueur pour séparer les scènes les unes des autres, et renforce surtout l’aspect onirique de la pièce de Calderon. Pour un moment de théâtre puissamment suggestif…
Jean-Rémi BARLAND
«La vie est un songe» de Calderon, mis en scène par Christophe Lidon. Adaptation de Michael Stampe. Texte de la pièce et du spectacle publié à L’avant-scène théâtre. N° 1461. 94 pages, 14 €.

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