71e Festival d’Aix-en-Provence – « Les Mille endormis » entre rêve et réalité

Publié le 9 juillet 2019 à  10h26 - Dernière mise à  jour le 29 octobre 2022 à  12h00

Les endormis ont été installés dans le bureau du Premier Ministre (Tomasz Kumiega) ici en compagnie de son assistante Nourit (Gan-ya Ben-gur Akselrod). Photo Patrick Berger / Artcompress
Les endormis ont été installés dans le bureau du Premier Ministre (Tomasz Kumiega) ici en compagnie de son assistante Nourit (Gan-ya Ben-gur Akselrod). Photo Patrick Berger / Artcompress

Commande du Festival d’Aix, «Les mille endormis», opéra d’Adam Maor sur un livret de Yonatan Levy a été créé samedi au théâtre du Jeu de Paume. Un sujet sensible pour un conte d’où la légèreté et même l’humour ne sont pas absents. Mille détenus administratifs font une grève de la faim et le Premier ministre décide de les endormir. Mais les dormeurs Palestiniens vont provoquer des insomnies aux Israéliens et il est décidé d’envoyer un agent déguisé en arabe endormi dans le monde du sommeil palestinien pour détruire la cellule terroriste des rêveurs lucides qui ont creusé des tunnels psychiques dans le monde des rêves juifs. Cet agent n’est autre que Nourit, l’assistante du Premier ministre, qui ne reviendra pas car elle découvrira que les mille endormis ont construit une patrie spirituelle libre et supraterrestre détachée des contraintes physiques, temporelles et étatiques. S’il signe le livret, Yonatan Levy réalise aussi la mise en scène au cœur d’un décor unique où les endormis sont positionnés autour du bureau du Premier ministre. Une ambiance particulière mise en valeur par des lumières soignées, avec un minimum de déplacement des quatre protagonistes pour un maximum d’efficacité visuelle. Pour mettre en musique ce livret en hébreu, Adam Maor a puisé une grande partie de son inspiration aux sources de la musique classique orientale avec des incises plus occidentales qui procurent quelques tonalités de science fiction à sa partition, l’utilisation de l’ordinateur n’étant elle aussi pas étrangère à ces couleurs particulières. L’ensemble et cohérent et, vocalement, cette production bénéficie d’un quatuor idéal avec, tout d’abord, la soprano Gan-ya Ben-gur Akselrod, dont le répertoire va de Haendel et Mozart jusqu’aux pièces les plus contemporaines. La voix est souple, directe et ne manque ni de couleurs, ni de nuances. Son final des «Mille endormis» est tout simplement somptueux. A ses côtés, Tomasz Kumiega est un Premier ministre tonitruant mais juste et élégant.
David Salsbery Fry est un inquiétant et humoristique chef du service général de sécurité et Benjamin Aluni, qui cumule les rôles du ministre de l’Agriculture, d’un manifestant et du cantor, fait valoir le côté précis et aérien de sa belle voix de ténor. A la tête de l’ensemble United Instruments of Lucilin, l’un des interprètes principaux de la musique de Maor, Elena Schwarz propose une lecture fouillée et sensible de la partition. Une création des plus intéressantes qui devrait connaître un bel avenir mérité.
Michel EGEA

Pratique. Autres représentations les 10, 12 & 14 juillet (à 20 heures) au Théâtre du Jeu de Paume. Plus d’infos et réservations : festival-aix.com
Retransmission direct le 10 juillet sur France Musique

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