Publié le 28 avril 2019 à 21h05 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h47
Décidément, cette saison à l’Odéon nous réserve de bonnes surprises et de belles découvertes… Après un mémorable «Petit Faust» de Hervé, après une «Auberge du Cheval Blanc» enchanteresse, Maurice Xiberras, le directeur général, avait convié «Irma la douce» à venir «travailler» en haut de la Canebière. Entre le Pont Caulaincourt, où elle vit de ses charmes et la chaleur du soleil marseillais, la dame n’a pas hésité une seconde. Et tout le petit monde qui gravite autour du «Bar des Inquiets» s’est retrouvé en sa compagnie autour du comptoir à deux pas des Réformés… Il y avait Bébert la méthode, Jojo les yeux sales, Dudu la syntaxe, Polyte le mou et tous les autres hébergés autour du comptoir par Bob le hotu et Gigi la loco. Tous observant avec tendresse, et parfois envie, la naissance de l’amour réciproque entre Irma la douce et Nestor le fripé. Place, donc, pour deux représentations, à la comédie musicale en deux actes signée Marguerite Monnot créée en 1956 avec Colette Renard dans le rôle titre puis jouée près de 1 000 fois dans la foulée… Preuve d’un succès certain. Ce dernier week-end, à l’Odéon, c’est Laurence Janot qui incarnait Irma, tête d’affiche d’une production à la mise en scène ébouriffante signée Jacques Duparc. On le sait, Laurence Janot affectionne tout particulièrement la comédie musicale ; une passion qui, associée à sa plastique de rêve, notamment liée à de longues années de pratique de la danse, aurait pu suffire à faire d’elle une parfaite Irma. Mais l’artiste ne s’est pas arrêtée là. Par son jeu de scène élégant et sensible elle a procuré toute son humanité fragile à cette Irma un peu perdue dans cet univers sordide où vient de jaillir pour elle la petite lumière de l’Amour en forme de lueur d’espoir. L’amour, c’est celui prodigué par Nestor le fripé, incarné par un Grégory Benchenafi au mieux de sa forme, beau gosse un tantinet jaloux, qui deviendra l’unique client d’Irma, travesti en Oscar. Suivront une disparition, un séjour au bagne de Cayenne, une évasion, la résurrection d’Oscar, la naissance de jumeaux et un happy end au terme de plus de deux heures d’une comédie menée tambour battant. Aux côtés du couple vedette, une pléiade de comédiens, chanteurs et danseurs placés sous la direction d’acteurs de Jacques Duparc, fait merveille. Duparc qui, sur scène n’est autre que Bob le hotu qui, en patron de bar, surveille ses ouailles en compagnie de sa moitié, Gigi la loco, à laquelle l’excellente Cécile Galois prête ses traits et sa voix. Francis Dudziak, Jacques Lemaire, Grégory Juppin, Florian Cléret, Jean-Claude Calon, Jean Goltier, Stéphane Defolie et Marc Piron déroulent avec grand(s) talent(s), les chapitres de cette comédie hors du commun. Avec un point d’orgue, une scène de procès totalement délirante où l’on se demande comment les protagonistes arrivent à ne pas piquer de fou-rires. Les danseurs, Laetitia Antonin, Anne-Lise Thebault, Loïc Consalvo et Rémy Kouadio font aussi largement partie de la joyeuse troupe et méritent bien des vivats qui ont ponctué la représentation. Un mot, enfin, sur l’excellence des musiciens dans la fosse, Christian, André et Sylvie Mornet, les deux premiers aux claviers, assurant la codirection musicale, Norbert Donadei, Michel Prats et Jean-Claude Vernet, soit accordéons, contrebasse et batterie pour accompagner avec talent une production qui fera date.
Michel EGEA