L’avenir de la France ne se limite pas au choix entre le RN et LFI. La désintégration des partis ouvre la voie au rassemblement des démocrates pour former une nouvelle force politique où les différences doctrinales compteront moins que ce qui rassemble. Les électeurs doivent également en être convaincus si l’on veut éviter le pire.
Les médias ou les réseaux sociaux, en se focalisant sur le RN et LFI, donnent une vision déformée de la campagne des législatives. La vie politique ne se résume pas aux extrêmes. Il faudra compter également avec les candidats modérés des autres formations, celles issues de la majorité présidentielle, Horizons, LR et au sein même du Nouveau Front Populaire comme le courant incarné par Raphaël Glucksmann.
La République braquée par les extrêmes ?
Il n’y a pas de fatalité à voir Jordan Bardella ou Jean-Luc Mélenchon à Matignon. Même si leurs discours, largement relayés par les médias, conditionnent les électeurs, aucun des groupes n’est assuré d’obtenir la majorité absolue, avec un risque accru d’instabilité politique et de récession économique. Les deux « Leaders Maximo » en sont convaincus, raison pour laquelle le premier rétropédale en posant ses exigences et le second semble botter contre son camp.
En parallèle, les appels au rassemblement des démocrates issus des différents partis s’amplifient et gagnent du terrain dans les esprits. Pour donner plus de substance, les mots « coalition » ou de « grand centre », allant de la gauche modérée jusqu’à la droite républicaine ont été prononcés.
Vers une coalition de gouvernement
L’objectif est de constituer une coalition similaire à ce que l’on voit dans les autres pays européens pour peser face aux extrêmes. Cela requiert de rassembler des députés modérés issus de différents horizons politiques. Très inhabituel dans le cadre de la Ve République où la prééminence d’un seul groupe est la règle. La désagrégation des partis, – LR en étant le dernier avatar -, et la dissolution qui a fâché nombre de macronistes qui ont pris leur distance d’avec le président de la République, permettent de se libérer du carcan quasi-monarchique du régime présidentiel qui ne semble plus adapté à notre époque.
A cela deux conditions. La première, que les électeurs choisissent dès le premier tour, non pas selon leurs affinités habituelles, en fonction des partis, mais en fonction du profil modéré des candidats et parmi eux celui qui aura la plus grande chance d’être élu. Et la seconde, que les petits calculs personnels, ceux qui ont fait perdre confiance en la classe politique, et que les différences doctrinales ne prennent pas le pas sur l’intérêt collectif.
Si le RN ou LFI gagnent, la Russie de Poutine gagne !
Au sein des extrêmes les dérapages des certains candidats et leurs profils inquiètent. On y trouve dans le désordre, RN et LFI confondus, des xénophobes, des suprématistes, des antisémites, des antisionistes, des homophobes, des misogynes, des soutiens au Hamas, des liens avec des officines radicales, un absentéisme parlementaire, sans parler des enquêtes en cours ou des condamnations pour fraudes et autres emplois fictifs. De quoi fracturer durablement la société. Et cerise sur le gâteau, les programmes irréalistes des deux groupes nous entraîneraient vers une flambée de la dette, une crise économique assurée et son corollaire, le chômage de masse. Tout cela ne présage rien de bon
On ne doit pas négliger non plus la dimension géopolitique de cette élection. Paris s’est opposé à Moscou sur de nombreux dossiers. On peut citer : l’Ukraine, l’Iran, le Sahel ou la Nouvelle Calédonie (leurs ressources et leurs positions stratégiques). Comme cela s’est déjà passé ailleurs, on a pu constater l’ingérence du Kremlin lors d’une série d’incidents récents : les étoiles bleues taguées sur les murs, les mains rouges sur le mémorial des justes, les cercueils de la tour Eiffel ou les fake news dévalorisant régulièrement la France. C’est également le cas sur les réseaux sociaux où des robots et des « Trolls » attaquent de manière violente les « posts » de soutien à l’Ukraine ou incriminant Poutine, la Russie et ses alliés (la Chine, l’Iran, le Hamas…). Déstabiliser et affaiblir la France, c’est se débarrasser d’un opposant et fragiliser l’Europe.
Le plus troublant est que les deux extrêmes, malgré leurs différences, ont en commun un soutien que l’on pourrait qualifier d’indéfectible à Poutine. Parfois récompensés par des « emprunts russes » comme cela a été révélé récemment. Peu importe lequel des deux arrive au pouvoir, c’est le nouveau Tzarevitch qui gagnerait.
Aux grandes causes les grands moyens !
Nous vivons une période grave et historique car nos choix conditionneront notre avenir, celui de nos enfants et la place de la France dans le monde. Il est encore temps de redresser la barre pour éviter de se fracasser contre l’iceberg des extrêmes. Comme à l’époque où « de Gaulle » n’était pas encore « le Général », c’est en incarnant une grande cause rassemblant autour de lui des personnalités venant de tout l’échiquier politique qu’il est devenu l’icône de la France Libre. Les temps ont changé, et c’est à un collectif d’élus républicains soutenus par les électeurs qu’échoit cette mission.
Comme l’écrivait Sébastien Castellion en 1562, 200 ans avant Denis Diderot, «La postérité ne pourra pas comprendre que nous ayons dû retomber dans de pareilles ténèbres après avoir connu la lumière».
