Le Ballet Preljocaj a donné pendant 2 jours un triptyque d’une grande beauté dans le cadre prestigieux du Théâtre de l’Archevêché d’Aix-en-Provence. Trois pièces très différentes dans le rythme et la couleur : Annonciation/Torpeur/Noces. La pluie qui commençait à s’inviter à la dernière soirée s’est retirée sur la pointe des pieds pour laisser le public profiter du spectacle.
Annonciation
Le décor est sobre, enveloppé de rouge et de noir. Marie est assise sur un muret en forme de L, il matérialise l’espace clos, synonyme de virginité. Marie pense, rêve. L’ange Gabriel pénètre soudain dans cet univers et annonce à Marie les bouleversements métaboliques qu’elle va vivre. Mais Angelin Preljocaj s’éloigne du texte et de la soumission de Marie à sa future maternité. Ici, elle exprime le doute, l’inquiétude voire la résistance. Le duo féminin offre une pièce subtile. Il associe extase et douleur.
Torpeur
C’est la pièce la plus récente du triptyque, elle date de 2023. « La torpeur est un état du corps entre la sidération, la prostration … et l’abandon. Cet état évoque un renoncement », mentionne Angelin Preljocaj. Le chorégraphe traduit ce lâcher prise, cet état suspendu par des figures harmonieuses où l’indolence et la sensualité envahissent les corps et la scène. Les dix danseurs se rejoignent au sein d’une figure parfaite, le cercle. La torpeur s’est muée en félicité absolue.
Noces
Noces, crée en 1989 est une danse frénétique. « Une étrange tragédie. Une tradition des Balkans… où la mariée vit un drame », explique Angelin Preljocaj. La pièce a traversé le temps. Dans une journée de douce ivresse, cinq couples s’affrontent au cœur d’un rituel barbare rythmé par Igor Stravinsky. Les femmes en tenues traditionnelles et des poupées de chiffon habillées en mariées se désarticulent. A travers ce rituel la future mariée quittera sa famille pour rejoindre celle de son conjoint. Une sorte de « rapt consenti ».
Joël BARCY