Entre les directions de Erwartung à la Fenice et de La Traviata à Grenoble et Paris, Jérémie Rhorer a profité de quelques jours de résidence au Grand Théâtre de Provence d’Aix pour retrouver la partition du Requiem de Verdi et la travailler avec son orchestre « Le Cercle de l’Harmonie », l’impressionnant Audi Jugendchorakademie et les solistes Axelle Fanyo, soprano, Agnieszka Rehlis, alto, Ivan Magri, ténor et Alexander Tsymbalyuk, basse avant de donner l’œuvre à Aix-en-Provence le 13 novembre et le lendemain à Dijon.
Tout, ou presque, a été dit et écrit sur ce Requiem composé par Verdi pour son ami, le poète Alessandro Manzoni. A commencer par Verdi lui-même qui s’est longtemps demandé s’il y avait une utilité à composer une messe de Requiem alors qu’il y en avait déjà tant et tant. La douleur engendrée par la disparition de son ami aura raison de sa retenue et le Requiem de Manzoni sera créé à Milan sous la direction du compositeur un an après le décès du poète.
Est-ce pour rompre avec les messes de morts composées jusqu’alors, toujours est-il que, tout en respectant la liturgie catholique romaine, Verdi donne une réelle dimension opératique à son œuvre. Les interventions des solistes sont autant d’airs inclus dans un spectaculaire environnement lyrique soutenu par des parties chorales puissantes et romantiques à souhait; bien entendu, au sommet de la pyramide, le Dies Irae s’élève en majesté à trois reprises…
Les solistes, lorsqu’ils ne sont pas submergés par la masse musicale de l’orchestre et des choristes, font entendre de belles choses et si l’on apprécie la basse précise et tranchante d’Alexander Tsymbalyuk, c’est Axelle Fanyo qui impressionne dans son « Libera Me » dont elle livre une interprétation intense avec précision et couleurs. Quant à Jérémie Rhorer par sa direction limpide, sans artifices, il développe le volet romantique et opératique de l’œuvre tout en lui conservant une réelle spiritualité. Au service de la qualité d’ensemble, les instruments d’époque du « Cercle de l’Harmonie » sonnent à la perfection. De la belle ouvrage saluée par de longs applaudissements d’un théâtre archi-comble.
Michel EGEA