Rebondissement dans la réforme de l’auto-entreprise : la Fédération des Auto Entrepreneurs et Evo’Portail, leader dans l’accompagnement des auto-entrepreneurs ont pris connaissance des arbitrages arrêtés entre Bercy et Matignon ce mercredi midi. Le régime ne sera pas limité dans le temps mais les seuils de chiffre d’affaires seront abaissés. D’autres mesures en matière de fiscalité et d’encadrement laissent les représentants des auto-entrepreneurs circonspects.
C’est un véritable feuilleton fait de rebondissements. Grégoire Leclercq, président de la Fédération des Auto-Entrepreneurs (FEDAE) et Ludovic Badeau, PDG Evo’Portail, leader dans l’accompagnement des auto-entrepreneurs, qui ont mené la fronde contre le projet de réforme de l’auto-entreprise initié par Sylvia Pinel, ont accueilli les arbitrages annoncés ce mercredi 12 juin à midi à l’issu du Conseil des Ministres comme « une douche écossaise ». En effet, si la limitation dans le temps abandonné, plusieurs points d’insatisfactions demeurent. « Sur la forme, la grogne ne va pas s’adoucir tant la réforme a connu des errements et revirements à n’en plus finir. Sur le fond, la réforme ampute le régime de l’auto-entreprise de sa simplicité et de sa souplesse au profit des lobbies notamment », estiment les deux représentants.
Sur les seuils de chiffre d’affaires, le gouvernement a décidé d’abaisser le plafond pour les activités de services, artisanales et professions libérales à 19 000 € (au lieu de 32 600 €) et pour les activités de commerce à 47 500 € (au lieu de 81 500 €). « Toutes charges déduites, les salaires des auto-entrepreneurs ne seront qu’au mieux égal au SMIC dans la meilleure des situations », note Ludovic Badeau. « C’est tout de même incroyable que l’on encadre les revenus de ceux qui n’arrivent pas à en avoir et que l’on recule pour encadrer les salaires des grands patrons », s’étonne Grégoire Leclercq.
Sur l’accompagnement des auto-entrepreneurs, aucune précision n’est apportée sur la formation des populations et les dossiers sont gelés. Aucune ligne budgétaire n’est précisée si ce n’est un groupe de travail associant les partenaires concernés par la réforme. « On reste dans un discours pavé d’intentions », jugent les deux représentants.
« Une régression dans la liberté d’entreprendre »
Sur les modalités de franchissement des seuils, Ludovic Badeau et Grégoire Leclercq jugent que « le dispositif censé protéger les auto-entrepreneurs en matière de cotisation fiscale et sociale et de son différentiel lors du passage en réel de droit commun est parfaitement inapplicable. Même s’il aurait pour effet de préserver la trésorerie des structures. »
Sur la contribution foncière des entreprises, « l’épée de Damoclès plane toujours sur la tête des auto-entrepreneurs ». Alors que l’exonération de la CFE a pris fin au 1er janvier 2013, le gouvernement n’a pas statué sur ce point et laisse les auto-entrepreneurs patienter jusqu’à l’automne alors que les demandes d’imposition arriveront dans les boites aux lettres dès le 1er novembre. « Un nouveau cafouillage n’est pas à exclure », s’alarment les deux représentants. La FEDAE demande que la CFE soit annexée sur le pourcentage de chiffre d’affaires des ressortissants.
Ludovic Badeau et Grégoire Leclercq affichent en revanche leur satisfaction sur l’approfondissement des données statistiques prévu par le gouvernement. « La distorsion de concurrence, le salariat déguisé très marginal n’étant pour le moment basé que sur des assertions gratuites, nul doute que cela aura pour effet de renvoyer sine die toutes les critiques caricaturales émises sur les auto-entreprises ces derniers mois », se réjouissent par avance les deux représentants.
Au final, le président de la FEDAE et le PDG Evo’Portail qualifient les mesures du gouvernement d’« un coup de rabot qui laissera des traces » sur le plan social et humain. « Une régression dans la liberté d’entreprendre, un nouveau mauvais coup pour la croissance et pour l’emploi. Un manque d’ambition pour la France », déplorent-ils.
S.P.