Aucun vainqueur, ce dimanche soir, dans les élections générales espagnoles ? Si, un seul, le parti d’extrême droite Vox qui, avec au final 52 députés élus là où il ne comptait que 24 sortants, devient bel et bien, comme Destimed le redoutait, la troisième force politique du pays. Des chiffres qui interpellent lorsque l’on sait que la formation dirigée par Santiago Abiscal ne comptait aucun élu à la chambre des Cortes jusqu’au printemps dernier…
On recense un semi-vainqueur, le Partido Popular (PP) qui, avec 88 sièges au lieu de 66 en avril dernier, regagne du terrain, même s’il demeure loin de son rival historique le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE). Bien qu’arrivé en tête avec 120 sièges, ce dernier ressort affaibli de ce quatrième scrutin législatif en quatre ans : en recul (123 élus au printemps dernier), on voit comment le parti dirigé par Pedro Sanchez pourrait parvenir aujourd’hui à former un gouvernement alors qu’il a échoué il y a quelques mois quand les courants apparaissaient plus porteurs… D’autant que le même temps, les socialistes ont perdu la majorité au Sénat, capital en Espagne lorsqu’il s’agit d’appliquer l’article 155, qui a notamment été crucial dans la gestion de la crise catalane [[L’application de l’article 155 permet d’obliger une communauté autonome à respecter la Constitution et les lois.]]. Une mission d’autant plus compliquée que les alliés «naturels» du PSOE ressortent eux aussi touchés : Unidas Podemos perd 7 sièges (35 au lieu de 42) et Mas Pais (né d’une dissidence de Podemos) n’en remporte que trois… Enfin, une confirmation, Manuel Valls est bel et bien un «chat noir» en politique. Ciudadanos, le parti où il a trouvé refuge de l’autre côté des Pyrénées, enregistre une débâcle perdant 2,5 millions d’électeurs (10 sièges au lieu de 57). Une «claque électorale» qui a poussé son leader Albert Rivera à annoncer qu’il abandonnait la politique, comme l’avait fait avant lui Lionel Jospin en 2002… A l’arrivée, ni la gauche (158 sièges via ses différentes composantes) ni la droite (152 sièges, Vox compris) ne sont en mesure de disposer d’une majorité à la Chambre des députés (176 sièges requis). Et alors que le PP avait indiqué être ouvert à toutes les éventualités, Pedro Sanchez a déjà repoussé l’idée de former un grand gouvernement de coalition nationale. Dès lors, il devra chercher des alliances du côté des élus régionalistes, en premier lieu le Partido Nacionalista Vasco (PNV, 7 élus), ou du côté des 10 élus de centre-droit de Ciudadanos pour parvenir à une majorité de 180 élus. Ou alors se résoudre à gouverner avec une majorité relative. Dans un cas comme dans l’autre, que des aspirants à l’indépendance se retrouvent «faiseurs de roi», ou que le futur gouvernement dispose d’une marge de manœuvre forcément réduite faute de majorité absolue, l’Espagne apparaît plus que jamais dans une impasse politique…
Andoni CARVALHO