Publié le 26 février 2020 à 9h56 - Dernière mise à jour le 4 novembre 2022 à 12h47
Le Secrétariat social de Marseille-Centre Chrétien de réflexion publie depuis 4 ans des documents sur les territoires de Marseille [[Pauvres à Marseille, Un besoin urgent de fraternité ! Philippe Langevin, Mai 2018, Centre Chrétien de Réflexion-Secrétariat social de Marseille]], du diocèse de Marseille [[La sauvegarde de notre maison commune, Territoire du diocèse de Marseille, pour une écologie intégrale, Philippe Langevin, Mars 2017, CCR-Secrétariat social de Marseille et CDES, comité diocésain économique et social de Marseille]], de la Métropole Aix-Marseille-Provence [[Aix-Marseille-Provence, Notre maison commune, pour une métropole solidaire, Philippe Langevin, 2015, CDES Comité Diocésain Économique et social, Centre Chrétien de réflexion-Secrétariat social de Marseille]] [[La Métropole Aix-Marseille-Provence, Une construction laborieuse, Philippe Langevin et François de Geuser, Octobre 2019, Centre Chrétien de réflexion-Secrétariat social de Marseille]]. Ces 4 publications veulent attirer l’attention des autorités publiques, des décideurs économiques sur la nécessité d’associer étroitement la population, la société civile de ces territoires à la co-construction de la maison commune que représente le territoire sur lequel elle vit. La population doit être considérée comme une ressource, car elle tient son expertise de son expérience de vie sur le territoire et des espérances qu’elle y projette.
La Métropole Aix-Marseille Provence a été présentée et préparée avec grand bruit et études soulignant les grandes potentialités et réussites de ce territoire, mais aussi ses limites liées à des inégalités sociales importantes qui contribuent à ralentir durablement attractivité et développement. Manifestement l’éventualité d’une intégration de 92 communes dans un territoire aux contours imprécis, autour de la Ville-centre, Marseille, qualifiée de monstropole (par Maryse Joissains-Masini), ou plus simplement de monstre (Philippe Pujol) à la réputation plus que sulfureuse n’a pas été suffisamment expliquée à la population. Des référendums ont été tenus qui rejettent massivement cette intégration, et 91 maires ont manifesté bruyamment leur opposition.
L’État ne voit pas d’autres solutions que la création, le 1er janvier 2016, d’Aix Marseille Provence Métropole, la suppression des 6 ECPI (Intercommunalités) qui la composent, par le biais de la loi. Il impose la gouvernance, les limites, le fonctionnement. Un calendrier de transferts progressifs des compétences entre Région, département, communes, et la Métropole est fixée. Les conseillers métropolitains sont pris sur les listes des conseils municipaux élus en 2014. Acte I d’une décentralisation privilégiant la métropole face aux communes dont on sait d’ores et déjà qu’il devra être complété et/ou corrigé avant 2020 par un acte II précisant limites, compétences et mode d’élection des conseillers. Avenir prometteur … !
Mais l’acte de naissance peine à s’écrire, et c’est seulement sur la base d’un pacte passé entre les maires et le Président Jean-Claude Gaudin qu’il est entériné par le conseil de la Métropole…. Ce pacte fige un partage des dépenses en sept parts, 6 parts représentant les deux tiers des dépenses pour les 6 anciennes ECPI (Intercommunalités, comme le Pays d’Aix, Le Pays d’Aubagne…), la septième pour la Métropole ! Ce pacte inverse complétement la donne, la Métropole et l’intérêt métropolitain, devenant subsidiaires, s’effacent devant les intérêts multiples et divers des communes qui se voient reverser annuellement ces « compensations » en contrepartie de leur adhésion au projet «AMP Métropole».
Certaines réflexions entendues lors du dernier Conseil de Métropole tenu le 20 décembre 2019, ou lors de la dernière réunion du conseil de territoire Marseille Provence (l’ancienne MPM, Marseille-Provence Métropole) permettent de mieux comprendre, sans doute, pourquoi la campagne métropolitaine ne soulève aucun enthousiasme des candidats maires, ni en faveur, ni en contre. «Les inspecteurs des finances nous ont dit: « réduisez les reversements aux communes », si vous le faites on vous aidera . Nous ne l’avons pas fait, parce qu’on a eu tellement de mal à constituer cette métropole, qu’on ne peut pas dire cela aux maires», (Jean-Claude Gaudin) ; il est manifestement plus important d’avoir le soutien des maires, en leur assurant des ressources pérennes que de voir augmenter la participation de l’État au projet métropolitain… «C’est vrai qu’il est difficile de dégager des sommes pour le projet métropolitain», constate le maire de Grans [[Propos cités par Julien Vinzent dans Marsactu le 20 décembre 2019]] et, le maire de Carry-le-Rouet, Jean Montagnac, vice-président de la Métropole et Président du conseil de territoire Marseille Provence est encore plus explicite sur ce que devra être le programme du futur Président de la Métropole : «Le Président de la Métropole qui décidera de baisser les attributions de compensation devra être sûr de sa majorité (Il faudrait) définir ce qu’est un projet d’intérêt métropolitain. J’espère que les prochains élus auront le courage de le faire. Nous, c’est vrai que nous ne l’avons pas fait.» [[Propos cités dans La Provence, compte rendu de la réunion du conseil de territoire Marseille Provence, nov 2019]]
Les services de la Métropole ont énormément travaillé ; des documents fondamentaux ont été préparés, concertés, votés souvent à l’unanimité qui permettraient de donner à la Métropole une vision, une ambition, et un chemin vers un vivre ensemble profitant à toutes et à tous, sur l’ensemble du territoire ; la société civile a elle aussi apporté ses contributions à la Métropole, mais a parfois eu l’impression que les élus lui reprochaient une certaine ingérence dans ce qui ne la regardait pas…
On peut comprendre qu’il n’y a pas bousculade…. pour devenir Président de la Métropole Aix-Marseille Provence. On peut aussi comprendre qu’effectivement les maires ne ressentent aucune nécessité de changer un fonctionnement qui leur assure un financement des projets de leurs municipalités sans avoir à en répondre devant qui que ce soit et surtout pas devant les électeurs de la Métropole… Comment faire en sorte que cette posture d’indifférence soit abandonnée au profit d’un engagement à appliquer les différents projets métropolitains ?
Philippe Langevin est économiste, Président de l’ARDL (Association régionale pour le développement local en Provence) – François de Geuser est statisticien, ex-fonctionnaire européen
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