Comme chaque année, le Secours Catholique – Caritas France publie son rapport statistique annuel, avec le soutien de la Fondation Crédit Coopératif, qui rend compte de l’évolution de la pauvreté en France et de ses conséquences sur les personnes en situation de précarité. L’organisation a rencontré près d’un million et demi de personnes dans ses accueils et son regard s’est plus particulièrement porté sur les difficultés d’accès à l’emploi des plus pauvres. Le constat est sans appel : le marché du travail leur est inaccessible. Pour Bernard Thibaud et François Soulage, respectivement Secrétaire général et Président du Secours Catholique : « Dans les accueils du Secours Catholique, l’année 2012 ne marque pas de ruptures. La pauvreté continue de s’étendre. Elle concerne un plus grand nombre de couples avec enfants, elle reste prédominante dans les familles monoparentales et touche de manière plus dure encore les personnes de nationalité étrangère. Le chômage poursuit sa course vers les sommets, la précarité tient lieu de mode de vie ».
Moins d’une personne sur cinq rencontrée dispose d’un emploi
Parmi les personnes accueillies par le Secours Catholique, moins d’une personne sur cinq dispose d’un emploi dont près du tiers sont des travailleurs à temps partiel. Les personnes au chômage représentent près de 68% des actifs rencontrés et 70% de ces personnes au chômage ne perçoivent aucune indemnité chômage.
Les jeunes paient un tribut encore plus lourd : 77% des jeunes chômeurs accueillis ne sont pas indemnisés. Ces situations enfoncent inexorablement les personnes rencontrées dans davantage de précarité. Pour François Soulage, « trouver un travail aujourd’hui en France, relève de la course d’obstacles et de la compétition. Dans ce contexte, c’est un peu la double peine pour les plus pauvres qui, sans réseau et sans accès à la formation professionnelle, sont encore plus défavorisés pour trouver un emploi ».
Trop de barrières pour accéder à l’emploi !
En 2012, seuls 2,4% des actifs ayant fréquentés les accueils du Secours catholique avaient eu accès à la formation professionnelle. « Il est donc impératif de redistribuer les crédits qui y sont dédiés au service des plus éloignés de l’emploi. » Le Secours Catholique propose également de faire de la Responsabilité sociale des entreprises (RSE), un outil de lutte contre le chômage en renforçant davantage les liens entre les entreprises et les structures d’insertion.Il milite pour que les différents acteurs de l’emploi : entreprises, pouvoir publics, structures d’insertion, associations et partenaires sociaux coopèrent sur un même territoire au bénéfice de la création d’emploi et de la mise en réseau des personnes les plus éloignées de l’emploi.
Les responsables du Secours Catholique expliquent : « Nous avons voulu, dix ans après le rapport intitulé « France précaire », interroger de nouveau le lien à l’emploi des personnes que nous accueillons. Le constat est simple, l’emploi salarié est de moins en moins accessible aux plus fragiles. Quand ils y accèdent, ce travail est bien souvent synonyme de temps partiels, de CDD, d’horaires fractionnés… L’emploi salarié devrait pourtant, en premier lieu, procurer un abri contre la précarité.
Comme toutes les richesses, le travail est de moins en moins partagé. Pour décrocher un emploi, il faut des compétences, de l’expérience, un réseau qui vous soutient, pouvoir se déplacer, n’être ni trop jeune ni trop âgé, ne pas vivre dans des quartiers stigmatisés, ne pas être étranger… Tout ce qui fait défaut à plusieurs millions de nos concitoyens ».
« Ce ne sont pas les personnes qui sont en cause, à de rares exceptions près, mais bien souvent les choix et politiques »
Les responsables associatifs avancent : « Ce ne sont pas les personnes qui sont en cause, à de rares exceptions près, mais bien souvent les choix et politiques de nos gouvernements et des agents économiques au premier rang desquels les banques, qui ont depuis trop longtemps placé le profit avant l’emploi. Ces dix dernières années, les mesures de soutien à l’emploi n’ont pas manqué : plans de relance, exonérations de charges, incitation à la reprise d’activité avec le revenu de solidarité active… Il fallait promouvoir le retour au travail… Comme s’il y en avait. Le nombre d’emplois non pourvus reste toujours largement inférieur au nombre de chômeurs. La faute à la crise ? En partie. Mais nous sommes aussi devant un nouveau défi. Dans quasiment tous les secteurs, nous produisons aujourd’hui autant de richesses avec moins de main-d’œuvre. Dans ces conditions, attendre une reprise de la croissance et penser qu’elle sera à elle seule génératrice d’emplois frôle l’utopie. En particulier pour les personnes les plus précaires. Pouvons-nous encore imaginer une société du plein emploi à l’image des Trente Glorieuses ? Il semble que non. Pourtant, l’emploi salarié est le principal générateur de ressources, immédiates et différées, de sécurité, de reconnaissance sociale et de relations aux autres. C’est donc bien la place du travail dans nos vies et dans la société qu’il nous faut repenser, tout comme nous devons aussi repenser la relation entre les différentes formes de travail et les ressources qu’elles procurent ».
Bernard Thibaud et François Soulage concluent : « Un partage du travail et des richesses est possible, en rééquilibrant les priorités de l’organisation et en interrogeant les finalités de l’activité économique. On ne sort des crises que par la créativité. Il nous faut inventer une société dans laquelle toutes les formes de contribution au vivre ensemble -que ce soit par la production de richesse matérielle et financière ou par la création de richesse humaine- soient reconnues et valorisées ».
Le travail du Secours Catholique au quotidien
Pour accompagner ceux qui ont le plus de mal à accéder à l’emploi, les 60 000 bénévoles du Secours Catholique œuvrent pour permettre aux personnes en précarité de rompre leur solitude et de reprendre confiance en elles par un soutien moral et matériel et une remise en lien avec les acteurs sociaux et économiques du territoire. L’accompagnement individuel, mais aussi la possibilité de participer à des groupes de convivialité et d’entraide, permettent à ces personnes de se sentir reconnues et de reprendre force et confiance dans l’avenir.
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