Publié le 21 décembre 2020 à 8h55 - Dernière mise à jour le 4 novembre 2022 à 12h47
Avec la nouvelle année, certaines choses sont sur le point de changer en matière de divorce. Une évolution qui intéresse les Français puisqu’en 2020, les tribunaux ont enregistré plus de 130 000 procédures. Petit tour d’horizon, pour mieux appréhender les évolutions à venir, à partir du 1er janvier 2021. Pour bien comprendre ces subtilités, rien de mieux que les explications d’une experte du droit : Me Nathalie Fourno-Clementi, avocate au Barreau de Melun.
Avec cette réforme, c’en est tout d’abord terminé de la traditionnelle audience de tentative de conciliation à laquelle était convoqué l’époux, sur requête de son conjoint, et à laquelle il pouvait se présenter seul. A compter du 1er janvier 2021, il devra saisir le juge aux affaires familiales par une assignation en justice rédigée par son avocat et délivrée par huissier (ou si un accord est possible entre les époux sur le principe-même du divorce, sur requête conjointe) avec une date qui lui est fournie pour une audience «d’orientation et de mesures provisoires, à laquelle son conjoint devra obligatoirement se faire représenter par un avocat s’il souhaite que sa parole soit entendue.
Cette audience doit en principe fixer le « tempo » de la procédure en permettant aux parties de demander la mise en place d’un calendrier. Ce dernier, sera plus ou moins long ! En effet, tout dépendra alors de la complexité du dossier, mais également, de l’encombrement de la juridiction saisie. Sur ce point, il est clair que les régions françaises ne sont pas placées sur un terrain d’égalité. Toutefois, des mesures provisoires pourront être prises en attendant que la procédure soit menée à son terme (attribution de la jouissance du domicile conjugal, garde des enfants…).
Du changement pour le divorce pour altération définitive du lien conjugal
De leur côté, les motifs d’un divorce ne changent pas fondamentalement avec cette réforme. A commencer par l’accord des époux. Ils peuvent en effet s’entendre sur le principe, mais pas forcément sur ses conséquences, ce qui nécessite alors une décision du juge. Cet accord peut être recueilli par acte d’avocats. Concernant le divorce pour faute, 2021 n’apportera rien de fondamentalement nouveau. Bien qu’il faille considérer que le divorce pour faute n’a pas nécessairement les faveurs des juges aux affaires familiales, il est bel et bien encore d’actualité. Il faut cependant avoir conscience, que la tendance générale est à la recherche de solutions pacifiées, avec la valorisation des modes alternatifs de règlement des conflits, comme le recours accru à la médiation familiale.
Enfin, lorsque aucun accord ne pourra être trouvé ou aucune faute démontrée, il restera encore l’hypothèse de « l’écoulement du temps ». Il s’agit là du divorce pour altération définitive du lien conjugal. Celui-ci peut être invoqué lorsque les époux vivent séparément depuis un certain temps. C’est sur ce point précis que la réforme apporte une modification majeure, puisqu’une réduction du délai de 2 à 1 an a été entérinée.
Divorcer en 2021 ne passe pas nécessairement par l’obligation de s’adresser au juge aux affaires familiales. En effet, quand les époux sont en capacité de s’entendre suffisamment pour envisager une négociation à l’amiable, ils peuvent alors espérer y procéder par la signature d’une convention de divorce par consentement mutuel par acte d’avocats «déposée au rang des minutes d’un notaire». Pour cela, chaque partie doit être assistée de son propre avocat. Cette précaution a un but simple : que chacun soit éclairé sur ses droits de manière indépendante et sans risque de conflit d’intérêts.
Avocat obligatoire pour le divorce par consentement mutuel
Pour que le divorce par consentement mutuel puisse aboutir, les époux doivent s’entendre non seulement sur le principe, mais également sur l’ensemble de ses conséquences : conservation ou non de l’usage du nom du conjoint, éventuelle prestation compensatoire, modalités d’exercice de l’autorité parentale à l’égard des enfants et contribution à leur entretien, mais également liquidation de leurs intérêts patrimoniaux. En cas d’accord sur l’ensemble de ces points, la procédure se retrouvera alors fortement réduite.
On parle là d’un projet de convention rédigé, ensemble, par les avocats et s’adressant aux clients respectifs par lettre recommandée avec avis de réception. Au terme d’un délai légal de réflexion de 15 jours, un rendez-vous de signature sera fixé réunissant les deux parties et leurs avocats, puis la convention sera adressée au notaire désigné pour dépôt. S’en suivra 15 jours supplémentaires pour la remise d’une attestation de dépôt qui permet aux avocats de transcrire le divorce en marge des actes d’État civil.
Pour être complet, il faut souligner que le divorce par consentement mutuel par acte d’avocats n’est pas possible lorsque l’un des époux fait l’objet d’une mesure de protection (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle) ou lorsque l’un des enfants mineurs «en âge de discernement» (la loi ne précisant pas l’âge auquel l’enfant est considéré comme discernant) demandera à être entendu par le juge aux affaires familiales. Dans cette hypothèse, le divorce par consentement mutuel n’est pas exclu, mais la convention devra alors faire l’objet d’une homologation par le juge.
Moins de taxes sur la valeur des biens à partager
Petite consolation, lorsque les époux procèderont au partage de leurs biens, ils seront redevables envers le Trésor public d’un droit de partage calculé sur la valeur des biens à partager, déduction faite des dettes. Il est bon de noter que le droit de partage, qui était de 2,5 % depuis 2011, passera, au 1er janvier 2021, au taux de 1,80 %. Une baisse substantielle qui n’est jamais négligeable. Comme quoi la nouvelle année pourra aussi apporter son lot de «moins mauvaises» nouvelles, même quand on parle de divorce. Espérons simplement qu’un peu moins de Français auront recours à cette procédure. Un vœu pieux quand on sait que la pandémie du Covid-19 a fortement accéléré les choses. En 2020, les notaires ont enregistré une hausse de 25 % des consentements mutuels, par rapport à 2019.