Publié le 25 janvier 2021 à 18h28 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 12h35
Les “vrais” Marseillais, il y en a de deux sortes. Ceux qui sont nés à Marseille et y sont restés et ceux que la vie, l’amour ou la mer ont amené là et qui s’y sont fixés. Le réalisateur Pablo Pinasco appartient à cette deuxième catégorie. Né en Argentine, cet artiste graphique s’est installé à Marseille en 2006 et y a entamé une « deuxième vie », réalisant des courts-métrages, séries courtes et vidéos clips. «Marseille ressemble beaucoup à Buenos Aires », explique-t-il pudiquement avant de s’emballer « … Et puis les décors, les couleurs et surtout cette lumière, cette lumière ! ». Un vrai Marseillais, vous dis-je.
C’est particulièrement dans le domaine de la série courte que Pablo s’est rapidement distingué. En 2017, avec son complice Sébastien Nadaud, il écrit et réalise Beard Club, une série en six épisodes d’une quinzaine de minutes chacun où cette lumière, ces décors et ces couleurs marseillaises servent un polar noir, ironique et poétique. Primée dans de nombreux festivals autour du monde (dont le prestigieux Marseille Web fest), la série retient l’attention du studio Blackpills qui décide de la distribuer à l’international. Et ce mois-ci, après Cancelled du réalisateur australien, Luke Eve Destimed propose, toujours en exclusivité, la dernière création de Pablo Pinasco, «Dhanasri, les Julies et les fantômes».
Des fantômes de toutes les couleurs
Le synopsis de cette série rappelle les histoires que l’on pouvait lire à une autre époque dans les « illustrés » : il y a un héritage improbable, un château, une histoire d’argent et des fantômes qui semblent tout droit sortis d’un dessin animé… Mais c’est aussi une histoire très contemporaine et réaliste dont l’héroïne a deux mamans qui sont « souvent dans la merde », comme Dhanasri le répète régulièrement -mais sans le dire à haute voix car la jeune fille ne parle que dans sa tête- et qui sont parfois «un peu bourrées». Le point de départ du projet, explique le réalisateur, c’est la rencontre avec trois actrices : Dansai Sabié, Julie Nadaud et Julie Lagier. «En général, c’est la rencontre qui m’intéresse. Je conçois mes projets en fonction des moyens à ma disposition et je les élabore avec les rencontres qu’ils me conduisent à faire. Je connais ces trois actrices et les apprécie depuis longtemps, mais je ne les avais jamais vues jouer ensemble. J’ai donc eu l’idée de leur écrire ce conte filmé et m’offrir le plaisir de travailler avec elles.».
La magie et le fantastique font partie de notre quotidien
Et c’est un très joli travail que l’auteur et ses interprètes offrent au final. Les épisodes se déroulent en une suite de saynètes– lumineuses et colorées – où le fantastique s’immisce pour nous guider dans la brume des sentiments et des émotions de ces trois personnages. « Je crois que la magie et le fantastique font partie de notre quotidien… », explique Pablo, « …le fantastique, ce ne sont pas que des monstres ou des super pouvoirs, en tout cas ce ne devrait être que ça. C’est pourquoi j’aime mêler des éléments de fantastique dans des récits réalistes. Ensuite, pour la réalisation, je suis graphiste de formation et je pense que c’est ce qui fait que je m’attache autant à la composition de mes plans. Je raconte mon histoire avec des mots, mais d’abord avec des images ». Il y a toutefois beaucoup de dialogues qui « résonnent » dans Dhanasri et l’on se sent toujours très proches des personnages, de leur réactions, de leurs réflexions ou de leur indolence. C’est un récit très doux et très agréable à écouter et regarder (il y a une belle bande son joliment mixée). En conclusion notre entretien, Pablo, le réalisateur si Marseillais, a voulu donner à nos lecteurs et lectrices qui vont voir sa série un conseil : «Laissez-vous aller !… Regardez, écoutez et profitez… ». Et puisque cet article est sur Internet, je ne peux que rajouter : je plussoie !
Joël BASSAGET