Publié le 10 mars 2021 à 12h48 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 15h30
Dans les prés, les observateurs peuvent parfois voir des moutons et des chèvres avec quatre cornes au lieu de deux. Certaines races, comme le mouton Loagthan de l’île de Man, sont connues pour cette particularité. Une équipe de recherche s’est penchée sur les causes génétiques de cette curiosité morphologique.
Elle regroupait l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), l’université de Genève, l’école poly-technique de Lausanne, l’union des coopératives d’élevage Allice ainsi que plusieurs musées et associations de races. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Molecular Biology and Evolution le 16 février 2021. Ils montrent que les animaux polycères étudiés portent tous une mutation affectant le même gène : HOXD1. Certains spécimens de la famille des bovidés présentent des cornes sur-numéraires. Ainsi, il existe des races locales de moutons, sélectionnées par des générations d’éleveurs, connues pour leurs cornes multiples.
Un mystère qui dure depuis des centaines d’années enfin percé
Il arrive également, en particulier dans les Alpes, que certaines chèvres développent spontanément une paire de cornes supplémentaires. Les témoignages de l’existence de ces animaux dits polycères remontent à plusieurs siècles, comme le bouc à quatre cornes dont le transfert en 1786 de la ville de Bulle en Suisse au Hameau de la Reine à Versailles, sur la volonté de la Reine Marie-Antoinette, est dûment consigné. Les causes génétiques de cette curiosité morphologique étaient jusqu’alors inconnues. Ce mystère est aujourd’hui résolu, grâce à l’étude des génomes de plus de 2 000 chèvres et moutons.
La faute au gène : HOXD1
Les individus polycères portent donc tous une mutation affectant le gène : HOXD1. Il s’agit d’un gène «architecte», c’est-à-dire un des gènes qui construisent le plan du corps pendant le développement des embryons chez les mammifères. Les mutations sont différentes chez les moutons et les chèvres, mais dans les deux cas, elles conduisent à une réduction de la quantité de protéine HOXD1 produite par le gène du même nom. Les scientifiques ont montré que la fonction du gène HOXD1 est de délimiter la surface de l’endroit où les cornes peuvent pousser de part et d’autre de la tête.
Un gène architecte que l’on attendait pas
Lorsque ce gène est muté, la surface s’agrandit, ce qui aboutit à la scission des bourgeons des cornes au cours du développement embryonnaire et, par conséquent, à la pousse de cornes surnuméraires. C’est là une fonction nouvelle et inattendue pour un gène architecte, fonction qui a probablement évolué de façon spécifique avec l’apparition des Bovidés, permettant ainsi de définir l’endroit précis où ces organes si caractéristiques émergent, ainsi que leur nombre.
L’Espace Alpin
[(L’Espace Alpin est le journal agricole et rural des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes. Ce journal bimensuel est disponible sur abonnement sur lespace-alpin
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