Publié le 14 juin 2021 à 22h03 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 19h14
Vendredi 18 juin, en l’abbaye de Silvacane, le Festival d’Aix-en-Provence frappe ses trois coups en ouvrant Aix en juin avec un récital du duo Waed Bouhassoun et Moslem Rahal. Grande voix du chant classique arabe, Waed Bouhassoun au oud et Moslem Rahal au ney réinventent les trésors de la poésie nabatéenne, fruit d’une longue tradition bédouine qui s’est notamment épanouie dans le sud de la Syrie. Ce concert est symbolique de l’ancrage renouvelé du Festival d’Aix-en-Provence en Méditerranée. Pour parler de cette relation particulière, nous avons rencontré Pauline Chaigne et Fabrizio Cassol, respectivement Directrice adjointe de l’OJM et de la programmation Méditerranée et Directeur artistique des sessions Medinea.
Pour Pauline Chaigne qui, depuis plusieurs années, œuvre pour le rayonnement de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, l’année qui vient de s’écouler fut assez particulière. «Pour la première fois, nous n’avons pas effectué de tournée d’audition afin de constituer l’orchestre. Et nous avons décidé de relever le défi de donner leur chance aux jeunes musiciens sélectionnés l’année dernière et qui n’ont pas pu tenir la session du fait de la pandémie. Nous leur avions proposé de suivre une formation en ligne, bien entendu très théorique du fait de ne pouvoir jouer ensemble, et c’est tout naturellement que nous avons décidé de répondre à leurs attentes de pratique collective.»
C’est en 2014 que l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, jusqu’alors géré par la Région Sud et le Ministère de la Culture et de la Communication, intégrait la structure du Festival d’Aix-en-Provence. Bernard Foccroulle, qui en était le directeur, en profitait pour affirmer encore plus sa volonté d’ancrer ce rendez-vous musical international en Méditerranée. C’était pour lui, musicien, compositeur et directeur, l’occasion rêvée de prôner l’ouverture, l’amitié entre les peuples, et bien d’autres valeurs encore, par le biais des échanges, de la musique et de sa pratique collective.
Duncan Ward pour trois ans
Aujourd’hui, c’est Pierre Audi qui a succédé à Bernard Foccroulle et sa volonté de poursuivre sur ces chemins méditerranéens est indéniable. «Pierre Audi a un attachement très fort pour la Méditerranée, confie Pauline Chaigne, en particulier du fait de son histoire personnelle (Il est franco-libanais, né à Beyrouth. NDLR.) En confiant la direction musicale de l’orchestre pour trois ans à Duncan Ward, il a fait un choix très fort. C’est vraiment une nouvelle ère qui s’ouvre et une nouvelle façon de travailler qui se met en place.»
Pour cette session, le directeur musical affiche d’emblée un programme sensible et engagé tout en restant soucieux de stimuler et mettre en valeur les musiciens. Hannah Kendall est la compositrice «qui monte» aujourd’hui : « Tuxedo Vasco de Gama», inspiré par le peintre Jean-Michel Basquiat, est une véritable pépite que nous découvrirons au cours d’un concert qui permettra aussi d’entendre la symphonie n°3 de Louise Farrenc, compositrice française qui commence à jouir d’une reconnaissance méritée ainsi que les «Folk Songs» de Berio et la version pour orchestre du «Tombeau de Couperin » de Maurice Ravel.
«Notre volonté est que l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée rayonne de plus en plus, conclut Pauline Chaigne, et Duncan Ward en est l’excellent ambassadeur. Cette année, à la suite du concert aixois, nous nous produirons au Festival Radio-France à Montpellier où nous serons en direct sur France Musique puis à Mougins. Désormais, nous avons à cœur de retrouver des conditions de travail normales afin de pouvoir accueillir les musiciens de façon optimale et de poursuivre notre activité de création.» Signalons, pour terminer, que la collaboration avec les musiciens formateurs du London Symphony Orchestra est toujours en place et est fort appréciée.
Fabrizio Cassol : l’union fait l’œuvre
Saxophoniste et compositeur, Fabrizio Cassol, guide depuis 2015, de jeunes musiciens improvisateurs, à Aix et dans plusieurs villes de la Méditerranée. Chaque session de formation réunit ainsi une douzaine de ces jeunes artistes sélectionnés dans l’ensemble des pays du pourtour méditerranéen et venant d’horizons divers (Jazz, musique traditionnelles de la Méditerranée …). Ces différentes constellations créent ensemble leurs propres œuvres, qu’ils partagent en concert à l’issue de chaque résidence. La mémorisation et la transmission orale sont au centre de ce processus de création.
«Medinea, c’est un vieux rêve qui a pris forme… » Fabrizio Cassol a les yeux qui s’illuminent lorsqu’il présente les sessions Medinea qu’il dirige. «C’est un challenge toujours renouvelé, pour les participants et moi même, de nous retrouver pour composer ensemble. Les musiciens ont tous un très haut niveau et chacun arrive avec sa culture, son patrimoine musical, son répertoire et son instrument. Il faut mettre tout ça en commun pour créer des œuvres où chacun trouvera sa place. Moi je suis là pour les aider, les soutenir et faire partager mon expérience.»
«Ce qui est intéressant, poursuit-il, c’est que tout se fait par l’oralité. Rien n’est écrit et chaque participant est confronté à cette réalité pour composer la meilleure musique collective en conservant le meilleur des musiques de chacun. C’est une fabuleuse expérience de vie et de partage porteuse d’espoir pour l’avenir. Ce travail révèle aux participants des choses qu’ils n’imaginaient pas puisqu’ils étaient seuls sur leur territoire. Au delà de l’illumination, elle leur révèle aussi leur vrai potentiel. C’est d’autant plus important que ces jeunes vivent souvent des situations très compliquées dans leurs pays. Lorsqu’ils arrivent ici ils peuvent se libérer d’un poids, se sentir en confiance afin de pouvoir se laisser aller dans la musique. »
Les années qui arrivent sont porteuses de nouveaux projets pour Medinea ; création d’un orchestre la saison prochaine, spectacles mis en scène sont évoqués par Fabrizio Cassol qui, pour l’heure, va travailler pendant un mois avec 12 jeunes musiciens avec, en point d’orgue, un concert le 20 juillet.
Michel EGEA
Concerts de la Méditerranée
• 18 juin – La Roque d’Anthéron – Abbaye de Silvacane
Waed Bouhassoun & Moslem Rahal.
• 25 juin – Aix en Provence – Hôtel Maynier d’Oppède
Yazz Ahmed Quartet.
• 3 juillet – Aix en Provence – Hôtel Maynier d’Oppède
Tenores Di Bitti – Polyphonies Sardes.
• 15 juillet – Aix en Provence – Hôtel Maynier d’Oppède
Cairo Jazz Station – Sophie Aloir en Sextet.
• 20 juillet – Aix en Provence – Hôtel Maynier d’Oppède
Session Medinea.
• 21 juillet – Aix en Provence – Grand Théâtre de Provence
Orchestre des Jeunes de la Méditerranée – concert.
Plus d’info et réservations : festival-aix.com