Publié le 3 juillet 2021 à 21h47 - Dernière mise à jour le 31 octobre 2022 à 19h19
Tristan et Isolde, l’opéra de Wagner, n’avait jamais été donné au Festival d’Aix-en-Provence. C’est désormais chose faite avec une première, vendredi soir au Grand Théâtre de Provence, qui a soulevé les passions…
Un triomphe pour la musique et les voix, des huées virulents pour la mise en scène : c’est une production digne d’un grand festival d’opéra qui est proposée à Aix. On l’annonçait comme étant l’événement de cette édition, force est de reconnaître que c’est vrai. Tristan et Isolde, conte médiéval devenu mythique, est l’histoire de deux amants dont la seule faute fut de boire un breuvage magique exacerbant leurs passions. Le thème intemporel de l’amour, de son accomplissement dans la mort, de la faute et de la mise au ban de ceux qui ont fauté traverse l’œuvre avec une grande puissance. Quant à la musique de Wagner, elle touche ici à son paroxysme, alternant virulence et passion, douceur et mélancolie.
Une musique servie, au Grand Théâtre de Provence, par un somptueux London Symphony Orchestra placé sous la baguette du maître incontesté Sir Simon Rattle. Ovation debout pour ce dernier à la fin de chaque acte, saluant sa direction lumineuse allant chercher l’émotion, les sentiments, derrière chaque phrase musicale. Une direction inspirée à laquelle les instrumentistes ont adhéré à tous les pupitres pour hisser leur interprétation au rang de celles qui ne s’oublient pas. Un très grand moment de musique.
Un duo exceptionnel
D’autant plus grand que sur scène, les voix réunies pour servir l’œuvre n’ont pas failli. A commencer par le duo Tristan et Isolde. La soprano suédoise Nina Stemme a donné toute sa dimension à son personnage, avec de la noblesse et une interprétation habitée. Précision et puissance vocale lui ont permis de projeter des aigus splendides et maîtrisés mais aussi de faire valoir un médium de grande qualité.
Même perfection chez Stuart Skelton, idéal Tristan passionné et lui aussi très habité. Une ligne de chant tranchante comme une lame de rasoir, une grande maîtrise et de formidables couleurs lui ont valu un immense succès. A leurs côtés, la Brangäne de Jamie Barton et le Kurwenal de Josef Wagner se sont avérés être de fidèles et aimants serviteurs respectivement pour leurs maitresse et maitre avec, chez eux aussi, des qualité vocales indéniables. Quant au roi Marc de Franz-Josef Selig, impressionnante voix de basse, il a fait l’unanimité. Dominic Sedgwick (Melot) Linard Vrielink (le berger) et Ivan Thirion (un matelot) ont parfaitement complété la distribution.
Mise en scène contestée
Quant à la mise en scène de Simon Stone, elle fut accueillie par une bronca. Il faut dire que, certainement par souci de moderniser un propos intemporel, le metteur en scène nous a trimbalé, avec les acteurs, au fil des actes, dans un appartement cossu se transformant en yacht, dans un open space (pour la nuit d’amour de Tristan et Isolde !) et dans un wagon du métro parisien, ligne 11 exactement pour l’agonie de Tristan et la « mort d’amour » d’Isolde. De quoi en perturber plus d’un et contrarier l’audition. Il n’en demeure pas moins vrai que cette production s’inscrit dans une lignée festivalière intéressante et que, au moins pour sa partie musicale et vocale, elle demeurera parmi les grandes.
Michel EGEA
Prochaines représentations les 5, 8, 11 & 15 juillet 2021 (18 heures).
En direct sur France Musique et Arte concert le 8 juillet à 18 heures – Plus d’info: festival-aix.com