Publié le 28 octobre 2021 à 12h17 - Dernière mise à jour le 2 novembre 2022 à 9h12
Des bovins conscients, suspendus par les pieds, des vaches en gestation sur le point d’être tuées lors d’un abattage rituel. Ces images choquantes sont filmées dans un abattoir de la marque Bigard à Cuiseaux, en Saône-et-Loire, par un bénévole de l’association de défense des animaux L214. Une immersion de plus de quatre mois en caméra discrète sur la chaîne d’abattage et des images inédites, comme celles d’un homme, en train de prélever du sang par ponction cardiaque sur un fœtus de veau pour être revendu ensuite à des laboratoires. Le ministère de l’agriculture ordonne une enquête approfondie.
500 animaux tués par jour
Chaque jour, 500 vaches et veaux sont abattus à Cuiseaux, avec ou sans étourdissement (rituel halal). Nos images témoignent de souffrances aiguës pour tous :
• Des bovins encore conscients après avoir été égorgés sont suspendus par une patte à la chaîne d’abattage, sans qu’aucun contrôle ou étourdissement d’urgence ne viennent épargner aux animaux une extrême souffrance.
• Les animaux encore vivants voient leurs congénères suspendus à la chaîne en train de se vider de leur sang ; la terreur se lit dans leurs yeux.
• Des aiguillons produisant des chocs électriques sont utilisés pour que les vaches se déplacent plus vite.
• Des animaux reçoivent des coups de bâton dans les yeux pour les faire reculer.
• Des vaches gravement blessées, abandonnées à leur sort, souffrent parfois pendant 10 h avant d’être abattues, alors que la réglementation exige un abattage d’urgence dans ces situations.
• Dans la zone d’attente après déchargement, des vaches peuvent rester enfermées dans des enclos à peine plus grands que leur corps pendant 48 h, sans manger.
Cette liste est loin d’être exhaustive, et les vaches gestantes ne sont pas épargnées.
Des fœtus de veaux vidés de leur sang.
Une cinquantaine de vaches gestantes sont transportées chaque jour à l’abattoir, certaines sur le point d’accoucher. Ces vaches n’auraient jamais dû arriver là, puisque la réglementation interdit de les transporter au-delà de leur huitième mois de gestation. Les fœtus meurent suite à l’abattage de leur mère, par suffocation dans l’utérus. Ils sont ensuite récupérés dans les entrailles de leur mère, pour être vidés de leur sang.
Le prélèvement du sang s’effectue par ponction cardiaque sur les fœtus de veaux, qui étaient parfois sur le point de naître. Une aiguille est enfoncée dans leur cœur et les différentes parties du corps sont compressées à la main pour récupérer tout le sang. De ce sang est extrait le sérum, ensuite vendu aux industries pharmaceutiques.
Les fœtus, eux, sont jetés dans les poubelles de l’abattoir.
1 à 2 % des abattages contrôlés
«Notre enquêteur a pu constater les carences des services vétérinaires, le manque de personnel et les contrôles sporadiques. L’abattage rituel, qui concerne environ 150 vaches par jour, n’est contrôlé que pour 5 à 10 d’entre elles. L’abattage standard, avec étourdissement, n’est tout simplement pas contrôlé par les services d’inspection», indique l’association. Autrement dit, seuls 1 à 2 % des abattages sont contrôlés, alors qu’ils devraient être placés sous la surveillance continue des services vétérinaires. Et les infractions ne sont pas relevées et peuvent donc perdurer, entraînant des souffrances supplémentaires pour un grand nombre d’animaux.
Il est à noter que le groupe Bigard est numéro un de la viande bovine en France. Et avec des marques comme Charal, Bigard, Socopa, il détient 70% de la vente de steaks hachés.
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Le ministère de l’agriculture ordonne une enquête approfondie des pratiques de cet abattoir
Dans un communiqué le ministère de l’Agriculture a tenu a réagir : L’association L214 a publié une vidéo montrant des images, probablement tournées entre février et mai 2021, dans l’abattoir Bigard de Cuiseaux (71). Les images montrent un certain nombre de non-conformités manifestes, notamment l’utilisation d’un pic électrique au niveau de la tête d’un bovin (non-conformité au RE 1099/2009), et d’autres possibles, notamment sur l’abattage de femelles en gestation au-delà du terme autorisé ou encore la mise à mort lors de l’abattage rituel opéré. Par ailleurs, tout agent recruté par une Direction Départementale pour travailler en abattoir doit suivre un parcours qualifiant, qui peut prendre la forme d’un tutorat sous la supervision d’un vétérinaire ou d’un agent expérimenté, et seul le personnel confirmé a mandat pour réaliser des inspections aux postes-clé qui nécessitent une certaines technicité (inspection ante-mortem en bouverie, mise à mort et mesure de l’inconscience d’un animal, inspection des carcasses). La vidéo laisse présumer que ces procédures n’auraient pas été respectées.
Le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie, a donc ordonné une enquête approfondie des pratiques de cet abattoir. Cette inspection complète de l’établissement sera réalisée sans délai avec le soutien de la Force d’intervention nationale en abattoir, récemment créée pour venir en appui aux Préfets dans de telles situations.
Le ministre prendra toutes les mesures, et notamment les sanctions, qui s’imposent selon les conclusions de cette inspection, en lien avec la Direction Générale de l’Alimentation.
La position du ministre a toujours été très claire : « Si des non-conformités sont démontrées, elles doivent être sanctionnées avec fermeté, pour ne pas jeter l’opprobre sur toute une profession ». Le ministre a non seulement annoncé en juillet dernier un plan de renforcement des contrôles en abattoir, en plus des contrôles déjà existants, mais également un plan massif d’investissements. Dotée de 115 millions d’euros, cette mesure du plan France Relance a d’ores et déjà permis de sélectionner plus de 150 projets de modernisation d’abattoirs sur l’ensemble du territoire.»)]
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