Publié le 11 novembre 2022 à 13h34 - Dernière mise à jour le 11 juin 2023 à 16h45
Novembre sera le mois du bel canto à l’Opéra de Marseille, Maurice Xiberras, le directeur général, ayant décidé de programmer «Elisabetta Regina d’Inghilterra» de Rossini pour ouvrir le ban et «Giovanna d’Arco» de Verdi pour le fermer. Du beau chant servi en version concertante par l’orchestre et le chœur de la maison et deux distributions bien pensées, le tout sous la direction du maestro Rizzi Brignoli.
Lorsqu’il arrive à Naples, le jeune Gioachino Rossini veut épater la galerie et prouver qu’à 23 ans il est déjà un compositeur accompli. Pour ce faire il va écrire la musique d’ «Elisabetta Regina d’Inghilterra» sur un livret de Giovanni Schmidt. L’histoire d’amour, de jalousie et de clémence d’Élisabeth 1ère ; la reine est amoureuse de Leicester, le commandant des armées, qui, lui, est marié secrètement avec Matilde la fille de Marie Stuart, ennemie jurée d’Élisabeth. Quant au traitre Norfolk, il n’a de cesse de provoquer la déchéance et la mort de son «ami» Leicester. Finalement c’est la clémence royale qui s’imposera, Norfolk sera condamné à mort, Leicester et Matilde seront confortés dans leur union et Élisabeth demeurera vierge ! Autour de cette intrigue, et en pensant à sa maîtresse, la prima Donna Isabella Colbran, Rossini propose un ouvrage en forme de marathon vocal rassemblant sur deux heures et des poussières la totalité des difficultés qui peuvent être proposées aux artistes lyriques, femmes et hommes réunis.
Au moment de programmer cette production, Maurice Xiberras a proposé à la mezzo soprano Karine Deshayes de chanter le rôle titre. C’était bien avant que cette dernière ne connaisse un beau succès dans le même rôle, mise en scène à Pesaro à l’été 2021. Point de mise en scène un peu plus d’un an plus tard à Marseille mais une réelle capacité à incarner la reine même debout derrière un pupitre. Pour ce faire, Karine Deshayes n’a besoin que de son visage, tellement expressif. Et comme vocalement elle sait éviter les chausse-trappes de la partition, que ce soit en puissance et rondeur ou mezzo voce en délicatesse, elle est Elisabetta, un point c’est tout… Brava.
Difficile, dès lors, de chanter à égalité à ses côtés. Mais la distribution réunie à Marseille a plutôt bien relevé le challenge. La Matilda de Giuliana Gianfaldoni s’impose avec retenue et délicatesse donnant à son personnage un caractère réservé et craintif qui lui sied parfaitement. Le Leicester de Julien Dran, beau médium, est convainquant dans ses aigus et un peu moins dans ses graves alors que Ruzil Gatin donne vie à un Norfolk détestable avec l’aide de son timbre parfois métallique et toujours inquiétant. Samy Camps est un impeccable Guglielmo et Floriane Hasler s’acquitte avec aisance de la très maigre partie qui lui est réservée.
Derrière les solistes, le chœur préparé par Emmanuel Trenque distille une fois de plus sa qualité et l’orchestre, dynamisé par la direction éblouissante de Roberto Rizzi Brignoli, confirme à tous les pupitres que ce répertoire est idéal pour lui. Bref, pour la première marseillaise de cet opéra de Rossini (eh oui, il n’avait jamais été donné ici !) l’accueil du public, séduit, fut plus que chaleureux. Mérité !
Michel EGEA
« Elisabetta Regina d’Inghilterra » à l’Opéra de Marseille. Dernière représentation dimanche 13 novembre à 14h30. Réservations 04 91 55 11 10 – 04 91 55 20 43.
Plus d’info : opera.marseille.fr