Publié le 18 novembre 2014 à 11h36 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h25
Ce qui est agréable avec Adrien La Marca, c’est qu’il est toujours souriant. Et la notoriété acquise en début d’année, au Grand Théâtre de Provence, en obtenant la Victoire de la musique de la révélation «soliste instrumental» ne semble pas lui être montée à la tête, loin s’en faut. Tout juste cette distinction a-t-elle été un fabuleux tremplin pour son début de carrière puisque tout en poursuivant son perfectionnement auprès de Tabea Zimmermann à Berlin, le jeune altiste aixois est de plus en plus sollicité pour se produire en récital.
Lundi soir, au Jeu de Paume d’Aix-en-Provence, il se produisait à domicile en compagnie de son complice, le pianiste Ismaël Margain. Un beau duo que celui formé par ces deux jeunes instrumentistes qui proposent un répertoire pour le moins éclectique. Un petit mot, pour débuter, sur Ismaël Margain que nous entendions en « live » pour la première fois. A 22 ans, il est considéré comme l’un des meilleurs pianistes de sa génération et il nous a réellement impressionnés lundi soir. Grande dextérité, un toucher affirmé qui donne du caractère aux partitions qu’il interprète, de la puissance mais aussi beaucoup de sensibilité, de la virtuosité, aussi, assurément ce garçon devrait faire parler de lui dans les années à venir.
Mais revenons au duo. La «sonate pour alto et piano» de Mendelssohn ouvrait le programme. Interprétation très classique de cette œuvre de jeunesse qui n’a pas titillé notre sensibilité. La suite allait être différente avec Schubert et la transcription de cinq lieder pour les deux instruments. Ces partitions ont un fort potentiel émotionnel parfaitement mis en valeur par les deux musiciens. Le quatrième lied « Auf dem See » est d’une profondeur étonnante. «Mes yeux, mes yeux, pourquoi vous fermez-vous? Rêves dorés, revenez-vous? Va-t-en, rêve, si doré que tu sois; ici aussi est l’amour, ici aussi la vie», dit le poème de Goethe. Le dialogue sensible entre le piano et l’alto est idéal pour servir le propos et l’interprétation très sensuelle qui nous est proposée nous transporte littéralement.
C’est la transcription de la «Danse des chevaliers» tirée de «Roméo et Juliette» de Prokofiev qui nous ramènera sur terre sans trop de ménagement. Cette musique, rendue célèbre par la publicité télévisée d’un parfum pour homme il y a quelques années, offre la possibilité à Adrien La Marca de mettre en avant sa grande technique parfaitement maîtrisée et de nous faire découvrir la palette des sons qui peuvent naître au cœur de l’âme de son instrument.
Cette palette sera mise à contribution en deuxième partie du programme avec les «Märchenbilder» quatre contes de fées de Schumann qui offrent aux altistes un terrain d’expression où se succèdent les sentiments et les ambiances. Un beau terrain de jeu pour Adrien La Marca, lui permettant de faire apprécier son toucher précis et sensible et toute sa virtuosité. Un beau moment avec l’idéale complémentarité d’Ismaël Margain.
Le duo terminera avec le Grand Tango de Piazzolla et beaucoup de plaisir pour les musiciens et les spectateurs. Du beau travail et la couleur qui sied à l’Argentin avant un bis de Fauré «Après un rêve» qui nous replongeait de façon trop éphémère dans un autre univers…
Michel EGEA