Publié le 23 janvier 2015 à 22h30 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h36
C’est au sein du flambant Stade Vélodrome à Marseille que la Fédération du BTP 13 a choisi d’organiser sa cérémonie des vœux en présence d’un aréopage de personnalités des mondes économique et politique, de professionnels de la construction…. Si l’ambiance a été comme à l’accoutumée conviviale, le président de la Fédération Johan Bencivaga s’est montré très offensif en dressant le bilan d’une année 2014 «qui a encore été d’une brutalité sans nom, d’une cruauté probablement jamais atteinte». Déplorant que plus de 15 000 entreprises du BTP ont mis la clef sous la porte et plus de 45 000 emplois «ont été sacrifiés».
Johan Bencivenga d’insister:«Notre activité a reculé de plus de 5%». «C’est comme si, dans le BTP, indique-t-il, l’activité et les emplois des départements des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse cumulés, avaient été totalement supprimés». Conséquences dues en raison «d’un blocage de trop nombreux permis de construire, et plus largement d’un marché du logement qui plafonne à 290 000 mises en chantier, bien loin des 500 000 annoncés. C’est le plus bas niveau depuis 50 ans. Ensuite, du fait d’une croissance économique générale atone, frisant même la récession. Et enfin, parce que la confiance générale dans l’avenir est toujours au plus bas . Assénant in fine: «2014 a donc été une tragédie. Une tragédie pour tous nos salariés qui sont allés grossir les fichiers surchargés de Pôle emploi. Une tragédie pour tous nos collègues chefs d’entreprise et artisans qui ont dû arrêter de façon irrémédiable leur outil de production qui représentait souvent toute une vie.»
«Cette année horribilis qui s’achève»
Et d’énumérer quelques réalités issues «de cette année horribilis qui s’achève». Pour ceux qui ont la chance d’être encore là, il dévoile: «2014 laisse place à la brutalité permanente d’un quotidien fait : de carnets de commandes qui n’arrivent pas; de prix qui ne cessent de s’effondrer; de lois et de règlements tout autant pléthoriques que complexes; d’une impunité flagrante pour ceux qui fraudent la législation du travail et ceux qui fraudent celle sur le grand détachement européen…» De signifier que si plusieurs professions sont descendus dans la rue pour exprimer leur colère l’action de la Fédération a été différente. «Elle a consisté à exercer une pression, vraiment forte et constante sur tous les décideurs : gouvernement, députés, sénateurs, élus et administration. Mais aussi sur tous les maîtres d’ouvrage, publics et privés», explique-t-il. Soulignant l’appui du Préfet de Région Michel Cadot «pour les remontées qu’il fait au plus haut niveau y compris à la présidence de la République. En particulier dans le domaine de la dévolution des travaux et de la lutte contre le travail illégal. Grâce à lui, nous avons d’ailleurs conventionné cette année avec le Comité Départemental Antifraude, l’Urssaf et la Direccte, mais aussi en matière de suivi de la Commande Publique, dont on sait qu’elle est une partie conséquente de notre activité». De se faire entendre également grâce au maillage de la Fédération sur l’ensemble du territoire auprès des maires et des conseillers généraux «qui sont des décideurs importants et des vecteurs d’opinion essentiels»
« Ça va casser », traduit notre exaspération»
Et afin d’appuyer les démarches et prendre à témoin l’opinion publique, deux campagnes ont été réalisées: «L’une, « Objectif Croissance » en début 2014 a finalement exprimé un vœu pieu. L’autre, qui se déroule en ce moment même, « Ça va casser », traduit notre exaspération». «Tout ceci, assure-t-il, a permis de déboucher sur un plan de relance du bâtiment adopté par le gouvernement à la fin du mois d’août. Avec ce plan, la moitié des demandes et propositions que nous avions présentées à l’occasion des législatives de 2012 ont été satisfaites. Certes, c’est bien, mais nous ne pouvons pas nous en contenter…» Mettant en exergue que «l’impact est loin d’être immédiat et le quotidien reste dramatique». Expliquant alors que «lorsque la machine est arrêtée, elle met beaucoup de temps à repartir. Au cours des derniers mois, nos gouvernants ont littéralement cassé le rythme, en oubliant que le temps de l’entreprise ne dépasse jamais celui de son carnet de commande. Pour nous, aujourd’hui à peine 8 semaines, et encore». De fait la Fédération exige des pouvoirs publics, «qu’ils fassent preuve de volonté et de courage». Johan Bencivenga de prévenir «Nous, nous n’en manquerons pas pour continuer notre combat». Un combat qui se traduira selon le président par un encouragement de la commande publique, une augmentation du nombre de logements mis en chantier; une réduction des normes et des réglementations, une simplification de la charge administrative; une libération de la conception de l’habitat, un assainissement de la concurrence, une utilisation des critères pertinents de sélection des offres dans les marchés, une valorisation de la dimension sociale exceptionnelle du BTP, favoriser l’insertion et l’emploi, inventorier les voies d’innovation financière…
«Nous continuerons à nous faire entendre»
D’autres points sont également soulevés dans ce combat comme le projet « scélérat » sur la pénibilité; la représentation syndicale dans les TPE «c’est bien mal connaître la réalité du quotidien des TPE»; la concurrence déloyale et travail illégal. «Le recours à cette main d’œuvre à bas coût venant principalement des pays de l’Est, s’impose de plus en plus massivement. Compte tenu des différentiels de charges sur salaires notamment, les entreprises qui cèdent aux sirènes européennes du travail low cost espèrent ainsi survivre plus longtemps. Mais je le dis, l’enjeu se situe bien au-delà. L’enjeu est national, car il déstabilise l’emploi local, il touche nos institutions, à commencer par l’assurance chômage, la sécurité sociale, la formation, les caisses de retraites.» Et Johan Bencivenga de conclure son intervention avant d’exprimer ses vœux:«Nous continuerons donc à nous faire entendre, à représenter et à défendre, à nous dépasser pour faire partager nos idées».
Patricia MAILLE-CAIRE