Publié le 28 janvier 2015 à 15h17 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h37
Le claveciniste Pierre Hantaï propose chez Mirare une splendide anthologie des sonates de «Scarlatti». Cinquante sonates, parmi les 555 que compte le répertoire du compositeur, sont réparties sur 3 CD où prédomine une qualité de son, propre à la maison dirigée par René Martin. «Si l’on veut redécouvrir Scarlatti comme l’inventeur d’un langage totalement singulier, c’est bien ici que le dépaysement est au rendez-vous», confie le claveciniste dans une réflexion résumant parfaitement la philosophie de son travail. En ce premier trimestre 2015 c’est vers Bach que revient Pierre Hantaï avec un CD, toujours chez Mirare, où l’on trouve couplés les «Suites anglaises n°2 & n°6» ainsi que le «Concerto italien en fa majeur». Rencontre autour de ces deux génies de la musique.
Destimed : Quelle est la place de Bach dans votre travail ?
Pierre Hantaï : Tout vient de l’enfance, de ma famille, du temps où l’on écoutait ses œuvres données par les pianos de Richter et Edwin Fisher. J’ai été touché progressivement jusqu’à que cela devienne une sorte de compagnonnage.
Comment s’est organisé le programme de ce disque?
Toujours en lien à l’enfance car, je joue ces œuvres depuis très longtemps. J’ai une grande affinité avec les «Suites anglaises» et les coupler avec le « Concerto italien» me semblait découler d’une certaine logique.
Qu’est-ce qui vous touche dans Bach ?
L’organisation incroyable de sa musique, son expression à la fois quasi naturelle et scientifique. L’émotion naissant des figures expressives. Dans mon travail je cherche, en jouant Bach, la clarté dans la résonance. Que le texte musical soit le plus lisible possible.
C’est sans doute pour cela aussi que vous avez tenu à soigner l’enregistrement du disque dans une prise de son impeccable
Exactement. On a enregistré à Haarlem, au Pays-Bas dans une prise de son signée Nicolas Bartholomée et Céline Grangey. J’ai, en composant le programme d’un disque, une idée assez claire de ce que je veux entendre, en me servant de l’acoustique de la salle qui est elle-même un instrument.
Quelle est la place de Scarlatti dans votre univers musical ?
D’abord, je le joue beaucoup. Lui aussi est un familier. Bien sûr comme il y a 555 sonates on ne peut en faire le tour. J’ai effectué un tri en opérant des sélections en forme d’affinités électives. Ce que j’aime chez Scarlatti, c’est qu’il a révolutionné le langage musical de son époque en trouvant son propre style, un peu sur le tard d’ailleurs. Sa première période de composition étant consacrée à la création d’opéras, il se fit remarquer par son talent de claveciniste et ce sont les sonates d’un homme de 50 ans qui nous parviennent. Une voie artistique assez inhabituel en fait d’un compositeur prolifique après la cinquantaine. Alors, pour servir cette œuvre riche en palettes sonores, j’ai choisi ici qu’elles se répondent. Je travaille par touches successives jusqu’à obtenir le programme le plus cohérent possible.
Quels sont vos projets?
Je vais enregistrer un nouveau volume de Scarlatti et surtout m’atteler à des suites de Haendel, qui sont finalement assez peu jouées à notre époque.
Propos recueillis par Jean-Rémi BARLAND
Pierre Hantaï: Scarlatti : «50 sonates pour clavecin». (3 CD chez Mirare); Bach : «Suites anglaises» n°2 & n°6 ; «Concerto italien » (1 CD chez Mirare)