On a apprécié au Grand Théâtre de Provence : l’excellence de Tedi Papavrami, l’élégance de François-Xavier Roth

Publié le 18 février 2015 à  19h44 - Dernière mise à  jour le 27 octobre 2022 à  18h41

François-Xavier Roth et Tedi Papavrami, aux saluts, devant une partie des musiciens des Siècles. (Photo M.E.)
François-Xavier Roth et Tedi Papavrami, aux saluts, devant une partie des musiciens des Siècles. (Photo M.E.)

Tous les chemins mènent à Bach; Jean-Sébastien, bien sûr ! Mardi soir au Grand Théâtre de Provence, après avoir donné, de façon magistrale, le Concerto pour violon en ré mineur de Jean Sibelius, en choisissant d’offrir en bis au public le largo de la sonate pour violon seul du cantor de Liepzig, Tedi Papavrami a effectué un lumineux grand écart musical de plus de 185 ans pour démontrer de façon définitive la modernité, l’universalité, le génie de Bach. Souvent considéré, selon moi à juste titre, comme «la» pierre angulaire de la musique, comme l’alpha et l’oméga de la composition, Bach est immense et les autres musiciens sont ses enfants. Elle était judicieuse, cette association Sibelius-Bach, d’une parfaite cohérence. Et l’on se souvient qu’à l’heure où Sibelius composait son concerto pour violon, Gustav Mahler s’enfermait dans sa cabane pour travailler sur les œuvres de Bach.
Mais revenons-en à Tedi Papavrami. Le violoniste était invité par François-Xavier Roth à partager la scène avec les musiciens de l’ensemble «Les Siècles» pour donner le Concerto pour violon en ré mineur de Jean Sibelius. Une œuvre au long cours, pièce maîtresse d’une première partie ouverte avec «Prélude à l’après-midi d’un faune» de Claude Debussy. Tedi Papavrami s’est attaqué avec fougue à ce marathon musical tout de virtuosité. Une présence extraordinaire et un son unique pour exacerber le romantisme d’une partition bouillonnante. Aux traits puissants, aux touchers subtils de l’auriculaire, à l’excellence de cette interprétation du soliste, sous la direction toujours aussi subtile et fouillée du maestro Roth, l’orchestre apportait ses torrents de lave incandescente. Des cordes suaves, des vents précis et mélodieux.
Après un Prélude à l’après-midi d’un faune tout de délicatesse et de sensualité, les musiciens des Siècles érigeaient de façon parfaite la charpente sur laquelle Tedi Papavrami allait poser son art avec excellence. C’était avant ce bis lumineux évoqué plus haut… Soulignons, au passage la cohérence et l’harmonie de ce programme consacré à Debussy et Sibelius. Cohérence renforcée par l’unité de temps puisque trois des œuvres interprétées sont nées en 1905. C’est le cas de «Pelleas et Melisande» de Sibelius et de «La Mer» de Debussy donnée après la pause. Une suite orchestrale et une symphonie qui ont en commun une qualité de composition rarement égalée. Ici on est dans la finesse, l’élégance, la sensualité des sons. François-Xavier Roth a le bonheur d’être à la tête d’un orchestre qui s’est hissé, en quelques années, au rang des meilleurs. Les cordes sont comme du velours, bois et cuivres ont des sonorités idéales et l’attention des musiciens est de tous les instants. C’est un ensemble solide, d’instrumentistes qui s’écoutent les uns les autres et qui jouent vraiment les uns avec les autres. Au final le résultat c’est « le » son qui donne leur puissance aux œuvres, toute leur luminosité, ce son qui ouvre aussi les esprits pour permettre à l’auditeur d’admirer Mélisande au rouet non loin d’une fontaine et d’entendre le dialogue du vent et de la mer… Après avoir dit combien il était heureux d’avoir pu faire grandir « Les Siècles » au Grand Théâtre de Provence, François-Xavier Roth nous offrait, avec l’élégance dont il ne se départit jamais, l’un des plus beaux « bis » qui puisse être : six minutes et des poussières de cette «Valse Triste» de Sibelius, si triste, si belle, si triste, si belle… Bonheur. Merci, tout simplement !
Michel EGEA

Articles similaires

Aller au contenu principal