Publié le 23 mars 2015 à 13h59 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 18h47
«Au mois de juillet, l’an dernier, Bernard Pisani me téléphone et me propose de faire « Phi Phi » avec lui à l’Odéon. Ma réponse fut un oui franc et massif d’autant plus que j’avais la possibilité de créer des décors aux ateliers de l’Opéra de Marseille…».
Et c’est ainsi qu’Eric Chevalier se retrouve quotidiennement depuis plusieurs jours en haut de la Canebière pour travailler la scénographie de «Phi Phi», l’opérette de Henri Christiné. Une présence d’autant plus intéressante que ça faisait bien longtemps que les ateliers de décors de l’Opéra n’avaient pas été sollicités pour réaliser le dispositif scénique d’une opérette. Et lorsque l’on sait la qualité du travail qui y est effectué, on ne peut que se réjouir de cet état de fait.
«Mon idée de départ, confie Eric Chevalier,tenait compte des impératifs liés au plateau du lieu. Vu la configuration, il est fort difficile de faire des changements de décors et, de plus, le fond de scène est oblique. J’ai donc tenu compte de ces contraintes et de cette architecture pour créer un décor unique qui épouse totalement le plateau. Un décor d’une largeur de quatre mètres côté cour et de neuf mètres côté jardin…». Et le scénographe de poursuivre: «Phi Phi, c’est en quelque sorte une opérette de boulevard. J’ai donc pensé un décor de boulevard « grec » qui joue sur l’anachronisme. Je pense que ce décor peut aussi bien servir à Phi Phi qu’à Phèdre. Puis, j’ai aussi tenu à ce qu’il soit simple à exporter en ayant présente à l’esprit l’idée que cette production puisse tourner.»
«Marseille : un exemple unique en France»
Ancien directeur de l’Opéra de Metz, aujourd’hui décorateur, scénographe et metteur en scène, Eric Chevalier porte un regard lucide sur les conditions d’existence de l’art lyrique et de la musique aujourd’hui.
« Dans la situation actuelle, cela devient un luxe de monter une nouvelle production d’opérette comme « Phi Phi ». Et Marseille a la chance d’être l’une des rares villes, voire la seule en France, où il y a une vraie saison dédiée à ce type de répertoire. C’est un exemple unique en France. Et c’est très bien qu’ici l’on tienne compte qu’il y a un public pour ces œuvres éminemment populaires. »
«Plus généralement, poursuit-il, la situation de la musique et de l’art lyrique est difficile actuellement. C’est un peu le serpent qui se mord la queue : moins de financements, moins de représentations, moins de public, moins de travail pour les artistes et les ateliers des grandes maisons… Les collectivités demandent aux directions des opéras de faire des efforts, je pense que tout le monde peut faire des efforts. Les artistes aussi car ils ont un besoin viscéral de travailler. Je connais beaucoup d’artistes de renom qui préfèrent revoir leurs cachets à la baisse plutôt que de ne pas chanter. Et pour nous, les metteurs en scène, décorateurs, créateurs de costumes, éclairagistes, c’est pareil. Imaginez-vous qu’après « Phi Phi », pour l’heure, je n’ai plus de travail en France pendant deux ans…» Un constat dressé sans animosité particulière, avec lucidité.Alors Eric Chevalier profite sans retenue de «Phi Phi». Il peaufine l’installation de ses «trompe l’œil».
«Je suis vraiment heureux d’être de cette aventure. D’autant plus que la distribution est superbe et que le travail de Bernard Pisani est des plus intéressants. Puis, vous savez, le plus important c’est que les artistes se sentent bien et évoluent facilement sur le plateau. Et je pense que c’est ce qui se passe ici. Alors, vivement samedi et dimanche prochain pour les représentations en public…»
Michel EGEA
Pratique: Représentations de « Phi Phi » les 28 et 29 mars à 14h30 au théâtre de l’Odéon, 162 La Canebière. Réservations sur place ou par téléphone au 04 96 12 52 70 du mardi au samedi de 10h00 à 12h30 et de 13h30 à 17h30.