Publié le 2 juillet 2013 à 1h00 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 15h50
Pour la première fois, la Régie des Transports Marseillais (RTM) va être appelée à intervenir au-delà de la périphérie immédiate de Marseille. La commune de La Ciotat, gérée par Patrick Boré (UMP), a en effet, suite à un appel d’offres, choisi l’entreprise publique pour exploiter, à partir de juillet 2014, le réseau Ciotabus. Si la délibération a été adoptée, le groupe communiste s’est abstenu en raison du choix de créer une filiale de la RTM pour répondre à ce marché.
Les élus du conseil communautaire de Marseille Provence Métropole (MPM) étaient appelés à approuver, lors de la séance plénière de ce vendredi 28 juin, le principe d’exploitation du réseau de transport de la commune de La Ciotat par la Régie des Transports Marseillais (RTM), dans le cadre du contrat passé entre la régie et la communauté urbaine. La Délégation de service public (DSP) pour l’exploitation du réseau Ciotabus arrivant à son terme en 2014, cela ouvre la possibilité de modifier les modalités de mise en œuvre de ce service public. Or, compte tenu de l’évolution des besoins de déplacement sur cette commune, ce réseau de transport public devra être restructuré en profondeur. Sa gare routière sera notamment réimplantée sur la commune. C’est dans ce contexte que l’exploitation du service Ciotabus sera confiée à partir de juillet 2014 à la RTM. Une opération fera l’objet d’un avenant de contrat d’Obligation de Service Public (OSP) à la fin de l’année 2013 afin d’intégrer ce nouveau service de transport urbain dans le champ d’activité de la régie et définir les caractéristiques de l’offre et les conditions de rémunération de l’exploitant.
Le premier à intervenir sur ce rapport 29 est Marc Poggiale pour le groupe Communiste, Républicain, Citoyen (CRC). « Notre groupe s’est plusieurs fois exprimé pour demander l’élargissement de l’activité de la RTM au périmètre de la communauté urbaine. C’est sa vocation et par délibération de notre assemblée en 2010, nous l’avons inscrite au règlement intérieur de l’entreprise. La proposition faite aujourd’hui de lui confier en juillet 2014 le réseau Ciotabus ne peut que rencontrer notre approbation », explique-t-il en préambule. Avant d’émettre toutefois « une réserve de taille » car « l’exploitation de ce réseau dans le cadre du contrat RTM/MPM se ferait par une filiale qu’on lui demande de créer ». « La raison invoquée d’une gestion de proximité est un peu courte, juge l’élu du 8e secteur de Marseille. Quand on a demandé à la RTM de reprendre le service « Mobi-Métropole » on ne lui a pas demandé une filiale. Et aux dires de tous, c’est une belle réussite. »
« La création d’une filiale ne peut qu’être source de conflits »
Marc Poggiale estime également que « si on vient chercher la RTM au lieu de renouveler une DSP, c’est bien parce qu’elle est performante avec ses personnels et leur convention ». « C’est tellement vrai, qu’on a eu la mauvaise idée de ponctionner sa progression et ses gains de productivité de 25 M€ sur 5 ans pour équilibrer notre budget. Que je sache, aucun des contrats des délégataires privés exploitant les autres réseaux de MPM n’a été revu en ce sens. Pas même celui de Véolia pour Ciotabus qui nous demande une subvention forfaitaire annuelle de 2,5 M€ pour couvrir de 3 M€ de dépenses, avec une marge bénéficiaire de 330 215 € inscrits au réel 2011 du compte d’exploitation, auxquels s’ajoutent 71 914 € d’assistance technique et frais de siège. Autant de marges et surtout de frais qui n’auront plus court, permettant de reprendre le réseau aux mêmes conditions financières et les personnels – soit 29 roulants sur 35 équivalent temps plein – dans le statut de la RTM », ne manque-t-il pas de souligner.
Revenant à la création d’une filiale, il considère que « si le souci est de réduire au maximum les incertitudes comptables d’une reprise du service et des personnels, tout en avançant vers une reconfiguration, on peut très bien concevoir une structure temporaire sous la forme d’un établissement distinct, pour lisser l’unification des conventions et des salaires vers l’unification pure et simple ». « A l’inverse, non seulement la création d’une filiale sur le même territoire de l’autorité de tutelle ne contribue pas aux économies d’échelle et aux gains de productivité recherchés, mais elle ne peut qu’être source de conflits. C’est aussi absurde que la décision prise en 2006 d’avoir voulu sortir l’exploitation du tramway de la RTM », dénonce Marc Poggiale.
Et de conclure en s’adressant à Eugène Caselli : « Au commencement de votre mandat, vous avez eu la bonne idée d’entendre les traminots et le groupe communiste en proposant à notre assemblée de rétablir l’unicité de la RTM par la réintégration du tramway. Ne le terminez pas en faisant le chemin inverse », assène-t-il. Ainsi, même si « rien n’est encore irréversible », car il ne s’agit que d’approuver le principe d’exploitation de Ciotabus par la régie puisque l’avenant au contrat ne sera signé qu’en fin d’année, il indique que le groupe communiste s’abstiendra, bien que « résolument pour ce développement de la RTM mais réservé sur la création d’une filiale ».
« Soit cette délibération est votée, soit il s’agit de privilégier l’intérêt d’un syndicat »
Une intervention qui suscite la colère de Jean-Louis Tixier (Parti Radical), vice-président de la communauté urbaine, administrateur de la RTM et adjoint au maire de La Ciotat. « Sur la quinzaine de membres présents au comité d’administration de la RTM, 14 ont voté pour ce rapport, André Molino (NDLR : le maire communiste de Septèmes est administrateur de la RTM) a voté pour, et seul le représentant de la CGT a voté contre, tout en étant à 300% pour, là où 100% aurait suffi », dénonce l’ancien président de la RTM. Tout en rappelant que sa commune est d’accord « pour faire l’expérience » et « pour que la RTM aille au-delà de La Ciotat », il ne manque pas d’avertir les élus communistes. « Nous avons mis quatre mois pour monter cet appel d’offres. Soit cette délibération est votée, soit il s’agit de privilégier l’intérêt d’un syndicat, ce qui mettra fin à cette intention. Et comme vos collègues d’Aubagne (NDLR : une municipalité communiste), nous ferons appel à une entreprise privée. Mais c’est vous qui l’aurez choisi », prévient l’adjoint au maire de La Ciotat.
Karim Zéribi (EELV) intervient alors en qualité de président de la RTM, en s’adressant particulièrement à Marie-Louise Lota (UMP), André Molino (PCF) et Jean-Louis Tixier, tous administrateurs de la RTM et élus communautaires. « Depuis 5 ans, nous avons pris à 90% des décisions dans le même sens », tient-il d’emblée à rappeler. Il évoque alors « un principe de réalité » : « La RTM est une entreprise, un établissement public qui jouissait d’une image pas florissante, avec des poncifs entretenus par certains. Cette délibération est une manifestation de l’apaisement du climat social », se félicite-t-il. Et de souligner également que la régie a été « au rendez-vous des grands événements de la Capitale européenne de la Culture » avec notamment « 250 000 personnes transportées le 12 janvier » jour du lancement de l’année Capitale, « 150 000 » lors de l’événement « Flammes et flots » sur le Vieux Port et encore des milliers le soir de la Fête de la Musique. « C’est un transporteur qui a fait preuve de sa fiabilité », insiste Karim Zéribi avant de remercier la commune de La Ciotat pour la confiance accordée « à cette grande entreprise de 3 400 salariés ». « Cela contribue à faire de la RTM le transporteur de la métropole, au-delà d’Allauch, Plan de Cuques et Septèmes, se réjouit-il. J’espère que d’autres maires auront envie de faire pareil. »
La création d’une filiale a pour vocation « de gagner en proximité »
Le président de la RTM précise également que la création d’une filiale « n’a pas pour vocation d’aller vers le bas » mais « de gagner en proximité ». « La RATP, la SNCF sont des entreprises publiques qui ont des filiales et qui rayonnent au-delà du territoire », prend-il en exemple, tout en manifestant sa confiance aux organisations syndicales. Karim Zéribi estime d’ailleurs que la RTM devra de la même manière « aller au-delà » de sa zone d’influence naturelle qui sera le territoire de la future métropole Aix Marseille Provence. « On ne peut pas regarder aussi ce qui se passe au sud de la Méditerranée, plaide l’élu écologiste. La RTM n’y interviendra pas en qualité d’exploitant mais de conseil, d’expertise : c’est une entreprise qui a les moyens d’exporter son savoir-faire de l’autre côté de la Méditerranée. » Et Karim Zéribi de conclure : « Nous n’avons pas envie d’avoir une RTM étriquée sachant que le développement des transports est un défi majeur ».
François-Noël Bernardi (PS), président du groupe « Faire gagner MPM » (PS, EELV, MoDem), abonde dans le même sens. « La délibération qui nous est soumise est une délibération de principe très intéressante », souligne-t-il en remerciant Patrick Boré (UMP), maire de La Ciotat, pour cette « expérimentation qui est tentée ». Le président du groupe « Faire gagner MPM » relève également que « la filiale a vocation à réaliser le transport de La Ciotat ». « Je crois qu’il est important que cette question de proximité soit assurée », plaide-t-il, en soulignant qu’il s’agit là d’une « décision d’importance capitale qui transforme la RTM d’établissement local en établissement métropolitain potentiel ».
A ceux qui s’inquiètent au niveau de la création de cette filiale, le président Eugène Caselli (PS) rappelle que « la RATP s’est aussi portée candidat pour La Ciotat sous forme de filiale ». « Les grandes régies de transport fonctionnent aussi de cette manière », relativise-t-il, avant de saluer le « pas en avant » que constitue cette délibération : « C’est la première fois que le RTM sort de la zone périurbaine » de Marseille.
Mise aux voix, la délibération sera adoptée avec la seule abstention du groupe communiste.
Serge PAYRAU