Publié le 8 juillet 2013 à 12h00 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 15h56
La Région PACA, désormais l’Autorité de gestion des programmes régionaux en lieu et place de l’Etat, a organisé ce lundi 8 juillet, à la Villa Méditerranée à Marseille, un Séminaire sur les Fonds européens régionaux 2014-2020. Il s’agissait de définir les priorités du territoire sur la période et d’en débattre avec l’ensemble des partenaires.
« Aujourd’hui, c’est le début de nos devoirs de vacances collectifs. Nous remettrons les devoirs à la mi-septembre avec une correction de la Commission européenne à l’automne » : ces mots de Gilles Barsacq, secrétaire général pour les Affaires Régionales à la préfecture de Région, représentant le tout nouveau préfet de la Région PACA, Michel Cadot – dont la prise de fonctions avait lieu au même moment – résume l’enjeu qu’a revêtu le Séminaire sur les Fonds Européens régionaux 2014-2020. Ce lundi 8 juillet à la Villa Méditerranée à Marseille, il s’agissait en effet de définir les priorités du territoire régional pour les sept prochaines années et d’en débattre avec l’ensemble du partenariat régional (acteurs publics, organismes consulaires, acteurs sociaux, etc…). Des contributions qui doivent en outre permettre de construire le futur accord de partenariat entre la France et les instances européennes.
L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit, comme l’a rappelé Michel Vauzelle (PS), président de la Région PACA, de « tirer le meilleur parti des orientations européennes ». Une mission d’autant plus ardue qu’elle doit être accomplie dans le cadre d’un « calendrier resserré » par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. « Nous avançons à marche forcée dans le but de commencer les programmations des investissements européens dès le deuxième trimestre 2014. Cela répond aux attentes des entreprises, des agriculteurs et des citoyens. Nos efforts doivent converger car tout retard serait préjudiciable », insiste le président de la Région. Et Gilles Barsacq d’enfoncer le clou : « Pour les Fonds européens 2007-2013, il y avait eu presque deux années de perdues à ajuster le programme aux priorités européennes ». Un contretemps qui n’a cependant pas empêché PACA de figurer au 4e rang des Régions françaises au niveau de la programmation du Fonds européen de développement régional (FEDER), avec « 270 M€ déjà engagés sur 300 M alloués », alors que le solde sera consommé d’ici fin 2013. « Notre savoir-faire en matière de mobilisations des fonds européens est bien réel », insiste le secrétaire général pour les Affaires Régionales qui veut ainsi « tordre le cou à l’idée que l’utilisation des fonds est mauvaise en PACA ».
La Région PACA va gérer directement « une enveloppe d’environ 700 M€ »
D’autant que cette fois-ci, tout a été mis en œuvre pour éviter un retard à l’allumage. La Région PACA a en effet élaboré, dès octobre 2012, en partenariat avec l’Etat, un « diagnostic territorial stratégique ». « Nous avons élaboré une méthode, des diagnostics, avec la mobilisation d’une centaine d’acteurs régionaux. Tous les grands enjeux de nos territoires ont été identifiés. Et nous avons rendu dès le 14 juin une version 0 du programme régional des fonds européens. Nous devons désormais rendre une version numéro 1 à la mi-septembre », explique Gilles Barsacq. Cette version 0 qui a suscité « des retours positifs » au sein des acteurs régionaux est d’ailleurs à ce jour le « seul préprogramme présenté à la Commission européenne ». « Nous avons abordé les bons sujets sous le bon angle. Maintenant, il faut qu’on arrive à y mettre des ambitions », résume-t-il.
Or, la donne va changer à plusieurs niveaux pour cette nouvelle génération des fonds européens. Tout d’abord, c’est la Région qui sera désormais l’Autorité de gestion des programmes régionaux en lieu et place de l’Etat. Dans ce cadre, c’est elle qui sera chargée de mobiliser le FEDER, le Fonds social européen (FSE), le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP). « 35% du FSE sera géré par les Régions. Et sur les 65% restants à l’Etat, une partie sera déléguée aux conseils généraux. Le FEAMP sera également en partie déléguée aux Régions », précise Gilles Barsacq. Sur le FEDER, la marge de manœuvre de la Région sera en revanche « plus limitée », comme le souligne Michel Vauzelle, car son « utilisation est cadrée par l’Etat ». Ce qui n’empêchera la Région de faire entendre sa voix, notamment sur l’agriculture, « pilier de notre économie ». « Nous serons mobilisés pour répondre aux besoins de nos agriculteurs », assure le président du conseil régional.
Si l’on ne connaît pas encore le montant exact du budget européen pour la période 2014-2020, on estime que la Région PACA « va ainsi gérer directement une enveloppe d’environ 700 M€ ». « C’est une responsabilité importante que l’on compte assumer pleinement sur le plan politique et de la gestion. On l’a endossée entre 2007 et 2013 sur le Fonds national Transmed et cela a été une réussite puisque nous venons d’être reconduits dans ces fonctions », souligne Michel Vauzelle. Et de préciser que s’il n’y a « pas de stratégie sans une gestion saine, la vision des politiques publiques ne doit pas pour autant être abandonnée au primat de la gestion budgétaire ».
« Une ambition commune à toute l’Europe avec des objectifs adoptés par le conseil européen »
Les orientations politiques devront cependant désormais s’inscrire dans un cadre, celui de la stratégie de l’Union européenne « Europe 2020 » qui succède à la stratégie de Lisbonne-Göteborg adoptée en 2000. « C’est une ambition commune à toute l’Europe avec des objectifs adoptés par le Conseil européen (NDLR : qui réunit les chefs d’Etat ou chefs de gouvernement européens) », indique Cyril Robin-Champigneul, chef de la Représentation régionale de la Commission européenne. Tout en haut de la liste figure l’emploi avec l’objectif de parvenir à un taux d’emploi de 75% de la population active en Europe d’ici 2020. Viennent ensuite la Recherche & Développement qui doit représenter à échéance des dépenses équivalentes à 3% du PIB, la baisse de l’émission des gaz à effet de serre (-14% pour la France) et l’augmentation de l’utilisation des énergies renouvelables (+23% dans l’Hexagone), la baisse de l’abandon scolaire (-10% en Europe, -9,8% en France) et l’augmentation de la part des jeunes diplômés, et enfin diminuer de 20 millions les personnes touchées par l’exclusion sociale au sein de l’Union européenne (réduire d’un tiers le nombre de personnes pauvres en France). « Ces objectifs sont imparfaits mais donnent une directive et vont orienter les programmes européens », souligne Cyril Robin-Champigneul tout en précisant que « les programmes structurels étant gérés au plan régional, les objectifs sont communs, les directions communes, mais les chemins tous particuliers ».
Or, la France n’étant « plus vraiment un territoire prioritaire au niveau des fonds européens », comme le souligne Gilles Barsacq, elle fait l’objet d’une « concentration thématique », l’expression en vogue à Bruxelles. « 80% des fonds devront être utilisés sur un petit nombre de priorités : plus d’innovation, plus d’emplois, plus d’excellence, mieux utiliser l’énergie, mieux respecter l’environnement, mieux accompagner, mieux former, énumère-t-il. 7% de l’enveloppe est conditionné à l’atteinte d’un certain nombre de résultats. » Ce qui n’empêchera la région PACA de bénéficier de programmes spécifiques comme le programme pour l’emploi des jeunes, doté de 6 Mds€. Il bénéficiera en effet prioritairement aux régions où le taux de chômage des moins de 25 ans est supérieur à 25% ce qui est le cas en PACA comme dans de nombreuses régions françaises. Un programme spécifique de 5 M€ est aussi destinée aux Alpilles, alors que l’enveloppe de 23 Mds€ (sur l’ensemble de l’Union européenne) allouée aux infrastructures de transports est susceptible de bénéficier au port de Marseille, aux aéroports régionaux et à la LGV PACA.
« L’Europe ne peut pas se construire en tournant le dos à la Méditerranée »
Sur le plan de l’Union européenne, l’innovation bénéficiera de 70 Mds€ sur 7 ans, ce qui constitue « le plus grand programme de recherche au monde », alors que le budget aux plus démunis sera « au même niveau » que lors de la période précédente. Autre levier : la Banque européenne d’investissement (BEI), recapitalisée à hauteur de 10 Mds€, pourra augmenter ses interventions de 60 Mds€ pour les porter à 160 Mds€. « Il faut regarder d’autres régions et bâtir des stratégies concertées au niveau européen. Il faut aussi utiliser les grands universitaires experts sur la programmation européenne afin de mettre en place des projets véritablement importants et une politique ambitieuse qui prenne toute sa place dans l’Europe de demain », plaide Cyril Robin-Champigneul.
Un cadre dans lequel Michel Vauzelle n’a pas tardé à afficher ses priorités politiques. « L’Europe ne peut pas se construire en tournant le dos à la Méditerranée, proclame le président de Région de retour d’une mission en Tunisie aux côtés du président de la République. Ce n’est pas une affaire de voisinage, mais de cohabitation : nous avons 4 à 5 millions de personnes d’origine maghrébine dans notre pays, et la Région PACA est particulièrement marquée par cette histoire avec beaucoup de Français d’origine maghrébine. » Et de préciser qu’alors que François Hollande plaide pour « une Méditerranée de projets », il prône quant à lui, dans le rapport qu’il remettra au président ce mois-ci, « une Méditerranée de projets humains portant sur la jeunesse ». « Les mouvements dans les pays arabes et les inquiétudes chez nous posent le problème de la place de la jeunesse. Le chômage a été une des causes de ces révolutions. Les attentes sont les mêmes des deux côtés de la Méditerranée : les jeunes ne demandent pas seulement un emploi mais une place dans la réflexion sur l’évolution de la société que nous ne percevons pas encore. Il faut travailler au développement pacifique de la Méditerranée, dans une communauté de destins des pays méditerranéens », analyse celui qui proposera notamment une augmentation des crédits alloués à la formation professionnelle.
Outre l’emploi des jeunes, priorité des priorités, il faudra également « relever le défi de la transition énergétique, préserver l’environnement et améliorer la vie dans les quartiers défavorisés ». « Il faut unifier l’Europe dans le respect des identités. Une Europe, forte de son développement économique, dont le modèle politique doit reposer sur la solidarité et la redistribution avec une vision d’un tout plus forte que la somme des parties », plaide Michel Vauzelle qui appelle de ses vœux un « printemps européen » car « l’Europe doit évoluer en cette période difficile ».
Il était temps ensuite pour Gilles Barsacq de passer le flambeau de la gestion des fonds européens à la Région. « L’Europe est un Everest, une cordée, c’est un collectif. Nous sommes arrivés à un camp de base et il est temps de vous confier le piolet de premier de cordée mais nous resterons dans l’équipe », résume-t-il au nom de l’Etat.
Serge PAYRAU