Publié le 15 août 2015 à 23h37 - Dernière mise à jour le 27 octobre 2022 à 19h31
Le quartier populaire du Panier a été parcouru ce 15 août par la traditionnelle procession de la Vierge qui, partant de la cathédrale de la Major, rejoint le parvis de l’église Saint-Laurent qui offre une vue privilégiée sur Notre-Dame-de-la-Garde pour un moment d’intense piété lors duquel les enfants sont présentés à la Vierge. Une déambulation dans les venelles du plus vieux quartier de la Ville où la Vierge est transportée par une dizaine de porteurs sous les chants religieux, les prières, les « Viva Maria » et les applaudissements issus de la procession mais aussi des habitants qui, en nombre, ouvrent leurs fenêtres au passage de «La Madone». Cette manifestation religieuse, expression d’une Foi populaire, loin de diviser rassemble toutes les composantes du quartier et bien au-delà, on vient parfois de loin pour cette procession. Mais, cette année, la fête est teintée de gravité avec les propos du Père Ottonello, le curé de La Major et des églises des Accoules et de Saint-Laurent. Cet homme de dialogue, sensible, ouvert à tous, a lancé un cri : «Les chrétiens d’Orient sont victimes d’un génocide dans l’apathie de l’Occident. Et dans 70 ans on viendra déposer des gerbes à un monument aux victimes de ce drame ». Alors il dénonce : « Notre société vit dans l’hypocrisie. Le Pape est intervenu plusieurs fois sur cette question, sans résultat. Pourtant, au XXe siècle, la communauté internationale a su vaincre les totalitarismes fasciste, nazi, communiste et, aujourd’hui, rien. On tue en Orient, on tue aussi en France et la réaction de la communauté internationale n’est pas à la hauteur de la situation. Je demande donc aux chrétiens de ne pas avoir honte, de ne pas avoir peur».
Et force est de constater que nul n’avait ce sentiment parmi les processionnaires. Tous étaient là avec leurs croyances, leurs émotions, leurs souvenirs.
Huguette habite dans le 15e arrondissement, elle vient chaque année : «Si je ne venais pas j’aurais l’impression de rater quelque chose, d’être mal toute l’année». Benjamin, son fils, l’accompagne: «Cette cérémonie c’est un pilier de notre religion, un moment que l’on ne peut pas manquer».
Paul est là avec son ami Vincent. Tous deux ont vu le jour en Tunisie, à La Goulette «la petite Sicile », explique-t-il. «C’est une tradition, on vient chaque année, pour la religion, parce que cela nous rappelle notre enfance, pour retrouver des gens que l’on ne voit jamais autrement». Vincent insiste également sur la dimension religieuse «et nos parents aussi étaient très croyants», précise-t-il. Alain avoue être catholique mais pas pratiquant. «Mais je me déplace pour les grands événements. Ainsi le 5 août, j’étais en Corse pour la procession à Notre-Dame-des Neiges. Et là-bas comme ici, je retrouve une ferveur populaire, une communion qui me touche. Des gens se retrouvent et, dans une société de plus en plus individualisée dans laquelle nous vivons c’est de plus en plus rare et précieux».
Pour Jean-Dominique Schembri, président du CIQ des Grands Carmes: «C’est une tradition que de rendre hommage à la Madone. Donc on vient toutes les années pour renouveler l’hommage que l’on doit à la Mère». Et de s’insurger à propos du nom du quartier:«Le quartier du Panier n’existe pas. Le seul qui existe c’est le Panier à salade… Dans le 2e arrondissement à Marseille on a 4 quartiers Arenc, la Joliette, l’Hôtel de ville et les Grands Carmes. Le Panier est un mythe c’est pour cela que je qualifie toujours cette ville de « fadade »». Il faut donc préciser une procession qui s’est déroulée « improprement » dans le quartier du Panier.
Dans la procession on retrouve aussi Lisette Narducci, la maire (Parti radical de gauche) des 2e et 3e arrondissements : «Ce n’est pas une surprise, je suis là toutes les années, depuis 1994, année où a été lancée cette procession. Il s’agit d’abord d’une manifestation religieuse mais, autour d’elle, s’agrège toute la population et cela crée un lien extraordinaire dans ce quartier. On ne manque pas de parler du vivre ensemble à Marseille, on en a là, un bel exemple. Et c’est toujours avec la même émotion que je viens car cette procession est un moment de communion au sens large du terme». Comme en écho lors d’une pose, la prière est en italien, des applaudissements s’élèvent entremêlés de youyou… Et pour parfaire le tout, la Patrouille de France en meeting dans la rade de Marseille, semblait saluer « La Madone » par des passages répétés au-dessus de la procession.
Michel CAIRE