Publié le 1 novembre 2015 à 22h54 - Dernière mise à jour le 29 octobre 2022 à 13h44
C’est au sein du Palais de la Bourse de Marseille que Christophe Castaner (PS), Christian Estrosi LR) et Marion Maréchal-Le Pen (FN) -la liste EELV- Front de Gauche n’ayant pas été conviée- ont répondu à l’interpellation des CCI de Paca sur les enjeux économiques des Régionales. Maurice Brun, le président de la CCIR considérait, quelques jours avant le débat qu’à partir de 300 personnes, il s’agirait d’un succès. Et bien l’essai, il s’agissait d’une première, a largement été confirmé avec 450 personnes présentes. Chaque candidat a eu 25 minutes pour s’exprimer, répondre aux questions telles : Comment pensent-ils accompagner le plus grand nombre de TPE et PME vers leur «transition économique»? Faciliter l’accès à l’innovation et l’international ? Quelle stratégie pour construire le territoire régional en intégrant davantage le développement économique dans les décisions d’aménagement ? Quelles idées pour accompagner le big bang des métiers en termes de formation ?… . Pour commenter les propos de chaque candidat, la CCIR avait invité Roland Cayrol, directeur de recherche associé au Cevifop (Sciences Po).
A ce jeu, Christophe Castaner a su tirer son épingle du jeu, en répondant de façon dynamique aux questions tout comme sa connaissance des dossiers. Mais son positionnement -il s’affirme philosophiquement compatible avec le Medef- sera-t-il bénéfique sur le plan électoral ? Roland Cayrol après son intervention et celle de Christian Estrosi notera : «Je ne suis pas sûr, si on les enferme tous les deux une nuit entière pour réaliser un programme économique, qu’ils aient besoin d’autant de temps. Car, les convergences sont surprenantes». Marion Maréchal-Le Pen se révélera pour sa part comme une étudiante studieuse mais, une étudiante tout de même. Il est vrai que l’exercice était pour elle complexe, tant il est peu évident de faire rimer FN et programme économique; nul doute pourtant qu’elle a marqué des points auprès de PME/TPE en indiquant qu’elle est favorable «à un patriotisme économique français en contournant les règles européennes en instaurant des clauses sociales et environnementales». Enfin, Christian Estrosi sera en difficulté sur la forme, il se révélera, en revanche, le seul à porter l’ambition d’un hinterland de dimension européenne pour le grand port de Marseille.
«La première Smart région»
Le tirage au sort veut que Christian Estrosi soit le premier à prendre la parole, il affiche sa volonté de faire de Paca «la première Smart région», avant de souligner : «Du fait de la réforme des régions, celui qui sera président de Paca aura la responsabilité de gagner la bataille de l’emploi». Dans un contexte de mondialisation, poursuit-il: «Il importe d’avoir un capitaine, ce que ne sont ni l’actuel Président de la République, ni celui de la Région». Et de dénoncer un taux de chômage à 12% en Région supérieur à la moyenne nationale. Une situation qu’il considère due «à une politique de saupoudrage». «Nous sortons de 18 ans d’économie subventionnée, je préfère l’économie réelle », lance-t-il. Il Critiquera également, le nombre «trop important», selon lui, de fonctionnaires de la Région; un endettement qu’il juge trop élevé; insistera sur «les effets néfastes» de la baisse des dotations globales de fonctionnement.
Puis de rappeler que, ministre, il a implanté 9 pôles de compétitivité en Paca «un territoire qui a un potentiel extraordinaire qui part de 4 100 mètres d’altitude pour arriver au niveau de la mer». Évoque le Grand Port : «Il peut avoir un hinterland prodigieux». Insiste sur la nécessité de grands projets structurants: «Un rapprochement de l’autoroute des terminaux de Fos; l’élargissement de la passe Nord; la liaison avec les ports du Nord…». Il se prononce de même pour le prolongement de l’A51 et entend contribuer au financement de la nouvelle ligne entre Marseille et Nice; la relance de la percée sous le Montgenèvre… ». Il conclut en déclarant «Je renégocierai le contrat de Plan État-Région, bien trop défavorable à notre région».
«Je veux faire passer notre région du statut de Floride française à celui de Californie française»
C’est par une formule que Christophe Castaner introduit son propos : «Je veux faire passer notre région du statut de Floride française à celui de Californie française». Il précise: «Nous avons énormément de filières, c’est notre identité, notre défaut pour Bruxelles alors que ces pôles, que nous accompagnons à travers les pôles de compétitivité et les Prides, sont des amortisseurs de crise. Mais il est vrai aussi que lorsque la reprise est là, cela rend le rebond moins rapide. Pour y remédier il faut favoriser leur développement notamment celui des secteurs à fort potentiel à l’instar du numérique». Il en vient aux TPE/PME. «Il faut leur donner accès au crédit, ce que fait l’actuelle majorité de la région en soutenant 8 500 entreprises cette année. Il faut accompagner au démarrage, permettre de passer le cap des trois ans. Je souhaite la mise en place de guichet unique territorialisé. Et, j’ai besoin de co-construire avec le monde économique à l’échelle de chaque bassin d’emploi. Je me retrouve dans la photographie réalisée par le Medef dans la région: il faut en finir avec les politiques publiques qui ne sont pas évaluées». Concernant les transports, il se prononce pour un financement des travaux sur le nœud ferroviaire de Nice ou encore le désenclavement de Marseille. «Mais, il faut être réaliste, ajoute-t-il, on ne pourra pas mettre des milliards pour le prolongement de l’A51 alors qu’avec 350 millions on peut mettre en place une liaison rapide entre Sisteron et Lus-la-Croix Haute». A propos des métropoles, il considère que la région en compte trois : Nice, Toulon et Aix-Marseille Provence. «Je ne suis l’otage d’aucun territoire et je considère que la fonction de la région est de garantir l’équilibre entre les territoires avec toute la complexité que cela représente lorsque l’on sait que 80% de la population vit sur la bande côtière et que 80% de notre territoire, l’arrière-pays, ne compte que 20% de la population».
«Il ne faut pas sortir n’importe comment de l’Euro, il faudra sortir à plusieurs États»
Marion Maréchal-Le Pen veut mutualiser les structures «obscures» selon elle; et mettre en place un guichet unique pour les PME/TPE «pour faire des prêts ou de la prise de participation». Il reviendrait à un comité présidé par un élu chef d’entreprise et composé de représentants du monde économique de prendre les décisions en ce domaine. En termes de transport, la candidate FN se déclare favorable à l’abandon de la ligne à grande vitesse Marseille-Nice. Avec la SNCF «il faudra se montrer plus contraignant». Un point de vue qu’elle partage avec les autres candidats. Elle soutient, par ailleurs, l’idée de la création d’un troisième comité régional du tourisme, pour le massif alpin. Puis de dénoncer: «La région a fait beaucoup de philanthropie en matière de relations internationales. Il faut en finir avec cela, la région doit répondre aux attentes du privé». Et, considère que face aux métropoles : «La région doit être l’interlocuteur des communes, notamment rurales». Enfin, pour la candidate frontiste: «Il ne faut pas sortir n’importe comment de l’Euro, il faudra sortir à plusieurs Etats ».
En ouverture de l’événement, Maurice Brun, président de la CCI de région, avait rappelé que les élus des CCI, de par leur ADN d’entrepreneurs et leur rôle de porte-parole auprès des instances politiques, sont légitimes pour produire un Livre Blanc à l’intention de ceux qui briguent la présidence de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur. «Les élections régionales nous offrent une fenêtre de tir importante pour faire remonter les préoccupations des entreprises et faire entendre notre voix.» Avant de céder la parole à Louis Aloccio, membre du Bureau de la CCIR, selon lequel : «Les CCI et les régions ont plus que jamais un objectif commun : le développement économique et l’attractivité de ce territoire. Le milieu économique veut être associé à sa gouvernance».
Michel CAIRE